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Décryptage

Une transition énergétique mondiale est-elle possible ?

Posté le par La rédaction dans Énergie

L'édition 2014 du WEO (World Energy Outlook), publiée par l'Agence Internationale de l'Energie, nous projette à l'horizon 2040. Hausse de la demande, nouvelles technologies... Une transition énergétique mondialisée - commune - est-elle envisageable à cette échéance ?

L’électricité est la forme finale d’énergie qui connaît la croissance la plus rapide, ce qui n’empêche pas ce secteur de contribuer plus que tout autre à la réduction de la part des combustibles fossiles dans le mix énergétique mondial. Afin de répondre à la demande croissante d’électricité, une capacité totale de près de 7 200 gigawatts (GW) supplémentaires est nécessaire, alors que 40 % du parc actuel de centrales électriques doit être remplacé d’ici à 2040 en raison de son vieillissement. Les énergies renouvelables connaissent un développement rapide dans de nombreux pays, et représentent un tiers de la production mondiale d’électricité à l’horizon 2040.

Des signaux de prix adéquats doivent être envoyés afin de garantir des investissements opportuns dans de nouvelles capacités de génération thermique, qui sont nécessaires pour  assurer le maintien d’une fourniture d’électricité fiable en accord avec les investissements réalisés dans les énergies renouvelables. Dans certains cas, des réformes du marché ou de la tarification de l’électricité s’imposent. Dans la majorité des pays, l’utilisation de technologies ayant un coût d’investissement important et les prix élevés des combustibles fossiles conduisent à une augmentation des coûts moyens de la fourniture d’électricité et du prix payé par le consommateur final. Néanmoins, l’amélioration de l’efficacité énergétique au stade de l’utilisation finale permet de réduire la part du revenu des ménages dépensée en factures d’électricité.

Les technologies d’énergies renouvelables représentent un élément essentiel du pilier « sources à faibles émissions de carbone » de l’approvisionnement énergétique mondial. Elles gagnent rapidement du terrain, grâce à des subventions qui s’élèvent à 120 milliards de dollars en 2013 au niveau mondial. Bénéficiant de baisses de coûts rapides et d’un soutien continu, les énergies renouvelables représentent près de la moitié de la hausse totale  de  production d’électricité jusqu’en 2040. Dans le même temps, l’utilisation  de biocarburant fait plus que tripler pour atteindre  4,6 mb/j, et celle des énergies renouvelables pour le chauffage est multipliée par plus de deux. C’est dans les pays de l’OCDE que la part des énergies renouvelables dans la production d’électricité augmente le plus,  atteignant 37 %. Leur  augmentation correspond à la hausse nette totale de l’approvisionnement électrique de l’OCDE.

Mais la production à partir de sources d’énergies renouvelables croît deux fois plus dans les pays hors OCDE, au premier rang desquels on retrouve la Chine, l’Inde, l’Amérique latine et l’Afrique. Globalement, l’énergie éolienne occupe la plus grosse part de la hausse de production basée sur les énergies renouvelables (34 %), suivie de l’hydroélectricité (30 %) et du solaire (18 %). Si l’éolien et le solaire PV voient leur part quadrupler dans le mix énergétique mondial, leur intégration du point de vue technique et commercial devient plus complexe, l’éolien comptant pour 20 % de la production totale d’électricité de l’Union européenne et le solaire PV pour 37 % du pic estival de la demande au Japon.

Le nucléaire : des décisions subordonnées à un ensemble complexe de conditions

Les politiques relatives au nucléaire restent un volet essentiel des stratégies énergétiques nationales, même dans les pays qui se sont engagés à abandonner progressivement cette technologie et qui doivent proposer des alternatives. Dans notre scénario central, la capacité  mondiale d’électricité d’origine nucléaire croît de près de 60 %, passant de 392 GW en 2013 à plus de 620 GW en 2040. Néanmoins, après avoir connu un pic il y a près de vingt ans, sa part dans la production mondiale d’électricité n’augmente plus que de 1 %, pour atteindre 12 %. Ceci reflète les défis qui se posent aux nouvelles centrales thermiques de tous types sur les marchés concurrentiels de l’électricité, ainsi que toutes les difficultés d’ordre économique, technique et politique spécifiques au nucléaire.

La  croissance se concentre sur les marchés dont le prix de l’approvisionnement en électricité est régulé, sur ceux où les opérateurs bénéficient d’un soutien de l’État ou bien sur ceux dont les gouvernements prennent des mesures pour faciliter des investissements privés. La Chine représente 45 % de la croissance de la production d’électricité d’origine nucléaire jusqu’en 2040, alors que la part cumulée de l’Inde, de la Corée du Sud et de la Russie se monte à 30 %. Cette production augmente de 16 % aux États-Unis, elle connaît un regain au Japon (sans pour autant retrouver les niveaux connus avant l’accident de Fukushima Daiichi), mais elle chute de 10 % dans l’Union européenne.

Malgré les défis auxquels il se trouve confronté,le nucléaire reste une option technologique future envisageable pour certains pays, en raison de ses caractéristiques spécifiques. En contribuant à la diversification des technologies de production d’électricité utilisées dans le mix énergétique, les centrales nucléaires peuvent rendre le système plus fiable. Pour les pays importateurs d’énergie, le recours au nucléaire peut leur permettre de devenir moins dépendants des approvisionnements étrangers et moins vulnérables aux fluctuations des prix des combustibles sur les marchés internationaux. Dans un scénario « Nucléaire faible » qui prévoit une chute de 7 % de la capacité mondiale par rapport à la valeur actuelle, les indicateurs de sécurité énergétique ont tendance à se détériorer dans les pays utilisant le nucléaire. Ainsi, dans ce scénario, la part de la consommation énergétique satisfaite par des ressources domestiques baisse de 13 points au Japon, de 6 points en Corée du Sud et de 4 points dans l’Union européenne par rapport à notre scénario central.

Le nucléaire est l’une des rares options disponibles à grande échelle qui permette de réduire  les  émissions  de  dioxyde  de  carbone  tout  en  fournissant  ou  en  remplaçant d’autres formes de production de base. On estime que depuis 1971, il a évité le rejet de 56 gigatonnes de CO2, soit près de deux ans d’émissions mondiales totales aux taux actuels.

En 2040, le nucléaire permet d’éviter près de 50 % des émissions annuelles en Corée du Sud, 12 % de celles prévues au Japon, 10 % aux États-Unis, 9 % en Union européenne et 8 % en Chine. Le coût moyen pour faire baisser le niveau des émissions par le recours à de nouvelles capacités nucléaires dépend du mix énergétique en place et du prix des combustibles remplacés. Il varie donc sur une échelle allant de niveaux très bas à plus de 80 dollars/tonne.

Des  434 réacteurs  opérationnels à  la  fin  2013,  200 seront  mis  à  l’arrêt  d’ici  à  2040, principalement en Europe, aux États-Unis, en Russie et au Japon. Les difficultés à compenser le déficit de production consécutif sont particulièrement aigües en Europe. Plusieurs années avant l’expiration des licences d’exploitation des centrales nucléaires, les opérateurs doivent commencer à planifier soit le développement de capacités alternatives, soit  la  poursuite de  l’exploitation  des  centrales nucléaires  existantes. Pour  faciliter  ce processus, les gouvernements doivent présenter clairement leur approche quant aux extensions de licence et fournir des détails sur les mesures réglementaires impliquées, bien avant les fermetures éventuelles de centrales. Nous estimons à 100 milliards de dollars le coût   du   démantèlement  des   centrales   nucléaires   mises   hors   service   avant   2040. Cependant, des incertitudes de taille subsistent concernant ces coûts, en raison de l’expérience encore relativement limitée en matière de démantèlement des réacteurs et de réhabilitation des sites pour d’autres utilisations. Les régulateurs et les opérateurs doivent continuer de s’assurer que les fonds adéquats sont provisionnés en vue de ces futures dépenses.

Les  préoccupations du  public  relatives  à  l’électricité  d’origine  nucléaire  doivent  être prises en compte. L’expérience récente a montré que l’opinion publique sur le nucléaire pouvait évoluer rapidement et jouer un rôle déterminant pour l’avenir de cette technologie sur certains marchés. La sûreté est la préoccupation majeure, particulièrement en ce qui concerne les réacteurs en exploitation, la gestion des déchets radioactifs et la prévention de la prolifération des armes nucléaires. La confiance dans les compétences et l’indépendance des organes de surveillance réglementaire est essentielle, en particulier avec l’extension du déploiement du nucléaire : dans notre scénario central, le nombre de pays ayant recours à l’électricité d’origine nucléaire passe de 31 à 36, les nouveaux-venus étant plus nombreux que les pays sortant progressivement du nucléaire. Le total cumulé de combustible nucléaire usé double, pour atteindre plus de 700 000 tonnes sur la période considérée. Mais  à  ce  jour,  aucun  pays  n’a  ouvert de  centre  de  stockage permanent permettant d’isoler les déchets hautement radioactifs à longue durée de vie produits par les réacteurs à usage commercial. Tout pays ayant produit des déchets radioactifs devrait être tenu de développer une solution de stockage permanente.

De l’électricité pour façonner l’avenir de l’Afrique subsaharienne

Ceux qui n’ont pas accès aux services énergétiques modernes souffrent de la forme la plus extrême d’insécurité énergétique. On estime qu’en Afrique subsaharienne, 620 millions de personnes sont privées d’accès à l’électricité. Pour les autres, l’approvisionnement est souvent insuffisant, aléatoire et parmi les plus chers au monde. Dans la région, près de 730 millions de personnes recourent à l’utilisation de la biomasse solide pour la cuisson. Or, utilisée en intérieur avec des foyers peu efficaces, elle provoque

une pollution de l’air à l’origine de près de 600 000 décès prématurés par an en Afrique. L’Afrique subsaharienne représente 13 % de la population mondiale, mais seulement 4 % de la demande énergétique mondiale (plus de la moitié étant de la biomasse solide). La région est riche en ressources énergétiques, qui restent très peu exploitées. Près de 30 % des découvertes de pétrole et de gaz réalisées dans le monde ces cinq dernières années ont été faites en Afrique subsaharienne, qui est également dotée d’énormes ressources d’énergies renouvelables, en particulier solaires et hydroélectriques, mais également éoliennes et géothermiques.

Le système énergétique subsaharien est amené à se développer rapidement, mais de nombreux défis énergétiques existants ne seront que partiellement relevés. D’ici à 2040, la région voit son économie quadrupler, sa population presque multipliée par deux et sa demande énergétique croître de près de 80 %. Sa capacité de  production d’électricité quadruple et près de la moitié de cette croissance est issue des énergies renouvelables, qui alimentent de manière croissante les systèmes énergétiques autonomes et les mini-réseaux dans les zones rurales. Près d’un milliard de personnes accèdent à l’électricité, mais plus d’un demi-milliard en sont toujours privées en 2040. Grâce à la production du Nigeria, de l’Angola et d’un nombre de plus petits producteurs, l’Afrique subsaharienne reste un centre important d’approvisionnement en pétrole au niveau mondial, même si une part croissante de la production est consommée dans la région. Cette région devient en outre un acteur important du marché gazier, avec le développement des grandes découvertes offshore le long de la côte est du Mozambique et de la Tanzanie et la hausse de la production au Nigeria et ailleurs.

Le secteur énergétique d’Afrique subsaharienne a la capacité de faire plus pour aider une croissance inclusive. Dans un cas de figure « Siècle de l’Afrique », trois mesures appliquées au secteur de l’énergie pourraient générer un gain de 30 % pour l’économie subsaharienne d’ici à 2040, soit l’équivalent d’une décennie supplémentaire de croissance des revenus par habitant, à condition de s’accompagner de réformes plus générales de la gouvernance :

  • Développer le secteur de l’électricité : par des investissements supplémentaires pour réduire les coupures de courant de moitié et assurer un accès universel à l’électricité dans les zones urbaines.
  • Approfondir la coopération régionale : en développant les marchés et en libérant une plus grande part du potentiel hydroélectrique du continent.
  • Mieux gérer les ressources énergétiques et les revenus tirés de l’énergie : en adoptant des processus plus efficaces et transparents de financement des améliorations essentielles aux infrastructures d’Afrique.

Grâce à un système énergétique plus moderne et intégré, les ressources sont utilisées de manière plus efficace et l’énergie est mise à la disposition d’une plus grande partie des zones les plus démunies de l’Afrique subsaharienne. Une action concertée d’amélioration du fonctionnement du secteur énergétique subsaharien est nécessaire pour que le 21ème siècle devienne le Siècle de l’Afrique.

Source : Agence Internationale de l’Energie

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