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« Chez Veolia Eau, nous allons augmenter de 10 % les volumes des eaux usées que nous recyclons »

Posté le par La rédaction dans Environnement

Dominique Gâtel est Directeur technique délégué pour l'eau potable de Veolia Eau. Après avoir rappelé les enjeux du traitement de l'eau potable, il répond à nos questions sur les missions que s'est fixé Veolia Eau.

Techniques de l’Ingénieur : Pour commencer, pourriez-vous rappeler quels sont les enjeux du traitement de l’eau potable pour l’homme et les collectivités ?

Dominique Gâtel : L’eau potable est d’abord un enjeu de santé publique et de développement au sens large. Il y a une relation directe entre la qualité de ce service, et la santé d’une part, et le PIB d’autre part. Difficile de décoréller les trois, mais pour une société développée comme la nôtre, les coûts sanitaires et sociaux associés à des services dégradés sont rapidement mesurables dans le cadre d’études.

C’est aussi un enjeu difficilement isolable de la gestion du bassin-versant, car la question de la qualité de l’eau potable est révélatrice de la gestion de l’eau tout court : on doit éliminer en potabilisation ce qui reste une fois que les autres acteurs du bassin-versant sont passés par là : substances chimiques en tous genres y compris perturbateurs endocriniens, micro-organismes pathogènes, etc.

En lien avec cet aspect « gestion du bassin » se pose la question de la quantité d’eau consommée. On atteint progressivement les limites de capacité, d’autant plus qu’on cherche désormais à laisser suffisamment d’eau dans l’environnement pour maintenir la biodiversité, et que le changement climatique se traduit par des ressources plus fluctuantes en quantité.

Le tout, bien évidemment, dans un contexte de tensions budgétaires, les collectivités locales étant souvent proches de leurs limites de financement. Et là se pose un triple problème : investir pour faire face à des exigences réglementaires et de renouvellement croissantes, et donc trouver des économies et/ou augmenter le prix de l’eau, et enfin identifier et accompagner les usagers ayant des difficultés à payer leur facture d’eau.

Pouvez-vous expliquer rapidement les différentes étapes du traitement de l’eau potable ?

Le processus est différent en eau souterraine et en eau de surface. Pour une eau souterraine, il suffit en règle générale de retirer le fer (naturellement présent) par filtration, et de chlorer l’eau (obligation française). Pour une eau de surface, rivière ou lac, il faut en plus clarifier l’eau avec des coagulants, la décanter et la filtrer avant de la chlorer.

Ces 2 types de traitement de base peuvent en plus être complétés par des étapes de désinfection supplémentaires (ozone, membranes et/ou ultraviolets) pour inactiver les germes pathogènes, et de filtration sur résine échangeuse d’ions et/ou charbon actif pour retirer les micropolluants.

Quelles sont les sources d’eau utilisées pour le traitement de l’eau ? Viendront-elles à se tarir ?

Les collectivités, industries et exploitations agricoles sollicitent à peu près toutes les ressources naturelles : rivières, lacs, et eaux souterraines (à peu près 50/50 eau de surface/eau souterraine).

On atteint dans bien des cas les limites de ce que l’on peut tirer des ressources présentes. Des régions qui n’avaient pas connu de manques d’eau majeurs doivent maintenant attribuer des quotas de prélèvement, restreindre les usages, réquisitionner des ressources, etc. C’est loin d’être le cas général, mais la tendance est perceptible.

Donc, il faudra progressivement recourir à de « nouvelles » ressources en recyclant, plusieurs fois, l’eau usée avec des traitements appropriés ; c’est déjà très souvent le cas pour les industries.

En zone côtière, on se tourne progressivement vers le dessalement de l’eau de mer. C’est déjà très majoritairement le cas dans la péninsule arabique et bien des îles – dont l’Angleterre ! – et la France devra probablement y recourir aussi.

Les normes en vigueur sont-elles suffisantes ?

Cette question est à l’examen au niveau mondial, européen et français, le tout en coordination.

Au niveau mondial, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) mène une revue permanente (« rolling revision ») des publications épidémiologiques et toxicologiques pour adapter si nécessaire les recommandations : paramètres à suivre et niveau de contamination acceptable.

L’Europe en fait autant, mais en cherchant à limiter l’exigence européenne aux problèmes d’ampleur européenne, et en faisant le lien avec les autorisations de mise sur le marché des produits chimiques, désormais délivrées par l’Europe : on pense ici à la réglementation REACH (produits chimiques), réglementations pesticides, etc. Car le meilleur moyen d’éviter la pollution de l’environnement par des substances dites « prioritaires » est d’en limiter la mise sur le marché, et cela ne peut se faire qu’au niveau européen.

Reste à charge de la France de respecter ces exigences européennes, minimales donc, et d’examiner les substances qui posent un problème particulier à la France, ou à une région.

C’est ainsi que, par exemple, les perturbateurs endocriniens font l’objet de recherches, dont les résultats sont examinés à la loupe en termes de risques pour l’eau potable et les populations, en cumulant à la fois la toxicité des molécules, et leur présence dans les ressources. Concrètement, si des milliers de substances sont potentiellement en cause, la pratique révèle que seules quelques-unes pourraient nécessiter de nouvelles normes à l’avenir pour protéger les populations sur le long terme. À suivre donc.

Quels sont les objectifs, les missions que se fixe Veolia Eau ?

Nous sommes une société de services, au public, aux collectivités locales et aux industries. Notre stratégie se résume en 3 lettres, SVR, pour Services, Valeur et Responsabilité.

Notre mission consiste à apporter des services dans la distribution de l’eau et la collecte, en s’assurant que les installations que nous gérons fonctionnent toujours de manière optimale. À l’échelle du groupe, cela consiste par exemple à diminuer de 5 % les volumes de fuites sur l’ensemble des réseaux qu’on gère pour alimenter plus de 100 millions d’habitants dans le monde. Un autre exemple de service que l’on améliore est l’efficacité énergétique des usines de traitement des eaux usées, de telle sorte que les KWh dépensés par gramme de DBO5 éliminé diminuent aussi de 5 %.

Le second élément de notre stratégie consiste à créer de la valeur, notamment en utilisant toutes les sources d’énergies et en recyclant ce qui peut l’être ; c’est ainsi que nous allons augmenter de 10 % les volumes des eaux usées que nous recyclons ; un autre exemple de cette volonté est sur la station d’épuration de Bruxelles Nord, où nous recyclons du bioplastique.

Le 3e élément concerne notre responsabilité, notre comportement éthique par rapport à l’ensemble des collectivités et des pays dans lesquels nous intervenons, et au-delà, pour la planète. Nous mettons bien évidemment ces mêmes engagements au service des industries qui doivent, elles aussi, optimiser leur gestion de l’eau. Cette responsabilité passe par différentes actions, par exemple la comptabilisation des émissions globales de gaz à effet de serre des exploitations gérées par Veolia Eau, l’accroissement du nombre de sites ayant réalisé un diagnostic ou mis en place un plan d’actions pour restaurer la biodiversité locale, ou encore la généralisation des systèmes de management environnemental.

Qu’ a mis en place Veolia pour répondre à ces objectifs ?

Difficile de résumer une organisation en quelques minutes ! Veolia est fondamentalement un réseau professionnel coordonné de taille mondiale, capable de tester, ou détecter, et généraliser une expérience positive, de porter une solution qui prouve son efficacité quelque part sur la planète, et ce aux meilleures conditions économiques, pour satisfaire les orientations et critères des différents clients industriels et municipaux.

Qu’apportent les centres de recherche ?

Les centres de recherche développent et mettent à disposition des opérationnels un support méthodologique et expérimental pour détecter, évaluer, fiabiliser et optimiser les solutions dont j’ai parlés, évidement en lien avec le monde de la recherche tant fondamentale qu’appliquée.

Quels sont vos projets à venir ?

On travaille à peu près sur tous les procédés de traitements, en particulier beaucoup sur les membranes qui apportent à la fois robustesse aux performances et compacité aux installations.

Notre portefeuille de projets comprend aussi des projets d’ordre méthodologique, notamment pour mieux systématiser l’usage d’indicateurs de performance, au-delà de ce qui est réglementaire, notamment dans le domaine des pressions sur les ressources d’émission de gaz à effet de serre et économies d’énergie.

Interview réalisée par Sébastien Tribot, journaliste

 

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