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Décryptage

« Le cerveau se répare de lui-même dans une certaine mesure »

Posté le par La rédaction dans Innovations sectorielles

La journaliste Estelle Saget recueillait l'année dernière pour le site de L'Express le témoignage d'Hugues Duffau, célèbre neurochirurgien et lauréat en 2010 de la médaille de Herbert Olivecrona, sur les spécificités du cerveau. On y découvrait des choses surprenantes, notamment que l'aire de broca est à mettre aux oubliettes et que le cerveau a dans une certaine mesure la capacité de s'auto-réparer.

Hugues Duffau, si vous ne le connaissez pas, est une pointure reconnue en neurochirurgie. Une célébrité que l’on dit modeste, cherchant à éviter le feu des projecteurs. Pourtant il peut se targuer d’avoir été un précurseur. C’est en effet le premier chirurgien français à avoir retiré des tumeurs sans endormir ses patients. Il a par la suite largement contribué à répandre dans de nombreux pays cette technique devenue aujourd’hui une référence.

Depuis sa première opération, qui remonte à 18 ans, – une infirmière de 25 ans, qui avait ensuite pu reprendre son activité – le neurochirurgien s’est occupé de plus de 500 personnes (dont 90 % sont encore en vie). Il dit avoir beaucoup pratiqué sur des tumeurs gliales, des tumeurs issues du tissu de soutien neuronal appelé glie.

Dans l’entretien accordé à L’Express, Hugues Duffau exposait sa technique. Il expliquait que la chirurgie éveillée était possible parce que le cerveau n’est pas sensible à la douleur. Pendant une opération, le patient ne ressent aucune gène, c’est ce qui lui permet d’être conscient. Il est tout de même anesthésié généralement afin d’ouvrir sa boîte crânienne, mais il est réveillé peu après. L’intervention se fait avec son concours. Dirigé par l’orthophoniste, il effectue des tests simples. Ce peut être des mouvements à réaliser ou des mots à prononcer. Dans le même temps, le neurochirurgien envoie de légères décharges électriques dans certaines zones à la surface du cerveau.

Le cerveau est capable de se recomposer

En fonction de la façon qu’à le patient de répondre aux demandes de l’orthophoniste (si sa parole se trouble ou si elle reste normale), le neurochirurgien peut cartographier les zones du cerveau à réparer/ôter en mettant des marqueurs. Encore maintenant, cette méthode reste la plus directe pour déterminer un plan du réseau anatomique du cerveau.

L’avantage étant de ne pas en enlever une quantité trop importante et de provoquer le moins de dégâts possibles. Car le risque de ce genre d’opération est bien là. En enlever trop, même un tout petit peu trop, et laisser des séquelles aux patients. C’est un risque de plus en plus réduit, mais qui existe malgré tout. Il révèle une anecdote particulièrement édifiante à ce sujet. Sachant l’opération d’une pianiste russe polyglotte trop longue, il s’était mis d’accord avec elle pour ne préserver que les langues qu’elle estimait essentielles. Un diagnostic précoce favoriserait bien entendu le traitement préventif. À ce titre, Hugues Duffau déclare qu’un dépistage par IRM au sein de la population permettrait cela.

C’est une chose extraordinaire. Le cerveau peut délocaliser ses fonctions d’une région à une autre, dans le même hémisphère ou dans l’autre. C’est la raison pour laquelle il déclare que « l’aire de broca n’est pas l’aire de la parole ». Les conclusions de Paul Broca, l’auteur de cette découverte en 1861, sont fausses parce qu’il n’existe pas de zone du cerveau dédiée à la parole à proprement parlé. Le neurochirurgien parle plutôt de « réseaux parallèles capables de se compenser les uns les autres », de connexions entre des nœuds. Et de fait, il donne un bon coup de botte à 150 ans d’histoire de la médecine.

Par Sébastien Tribot

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