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Décryptage

Nanos : un plombage qui tue les bactéries et reminéralise la dent

Posté le par La rédaction dans Chimie et Biotech

Une équipe de chercheurs de l'université du Maryland a mis au point le premier plombage composite et le premier apprêt permettant à la fois de tuer les bactéries nocives et de régénérer la structure de la dent dévorée par une carie, et ce grâce aux nanotechnologies.

Régénérer la structure d’une dent abîmée par une carie, tout en se débarrassant des bactéries nocives qui pourraient encore se nicher dans la dent cariée : c’est le pari ambitieux que s’est lancé une équipe de chercheurs du département dentaire de l’université américaine du Maryland, à Baltimore, dont la trouvaille pourrait bien révolutionner le milieu de la dentisterie.

Dirigée par le professeur Huakun Hockin Xu, PhD, enseignant et directeur du département bio-matériaux et ingénierie tissulaire de l’université du Maryland, spécialiste en régénération osseuse et en restaurations dentaires, l’équipe de chercheurs a choisi pour ce faire de s’orienter vers un nouveau composite, en lieu et place du conventionnel plombage qui ne sert en général qu’à limiter la propagation de la carie. Lorsqu’il prend place dans la cavité dentaire, le composite limite non seulement la propagation de la carie, mais permet aussi de contrôler la flore bactérienne coexistant naturellement dans les colonies de micro-organismes à l’intérieur même de la bouche.

Carie dentaire

Une carie dentaire est une maladie infectieuse de la dent extrêmement courante chez l’homme, caractérisée par une lésion de l’émail et de la dentine. Elle résulterait « d’un déséquilibre dans la flore bactérienne du biofilm présent à la surface de la dent suite à un changement brutal de l’environnement local », d’après Laurence Brousseau et Camille LeGoff et leur livre « Les déterminants de la carie ». La carie s’attaque d’abord à l’émail, puis en fonction de son degré d’avancement, s’attaque à la dentine puis à la pulpe, faisant évoluer l’ensemble vers une pulpite, puis vers une nécrose pure et simple de la pulpe.

« Une carie signifie que le contenu minéral de la dent a été partiellement dissous par les acides organiques sécrétés par les bactéries résidant dans le biofilm à la surface de la dent », précise le professeur Huakun Xu. « Ces micro-organismes convertissent les glucides en acides altérant les minéraux formant la structure dentaire », ajoute-t-il.

Apprêt et adhésif

Après qu’un dentiste ait nettoyé une dent cariée à l’aide d’une fraise, la cavité dentaire contiendrait encore et toujours du résidu bactérien. D’après le professeur Xu, il est souvent presque impossible pour un dentiste d’enlever tout la partie infectée d’une dent, rendant la neutralisation des bactéries et de leurs effets nocifs particulièrement importante. « C’est le rôle que joue ici le nanocomposite », explique-t-il.

L’équipe de chercheurs a donc conçu un apprêt dentaire contenant des agents antibactériens, utilisé par les dentistes pour préparer une cavité nettoyée, combiné à un adhésif permettant au plombage une adhésion optimale aux tissus dentaires. « La raison pour laquelle nous voulions des agents antibactériens au sein de l’apprêt et de l’adhésif est qu’ils forment la première couche couvrant la surface interne de la dent et les très nombreux tubules dentinaires », perpendiculaires à la surface, et contenant un fin prolongement cytoplasmique des odontoblastes. Selon le professeur Xu, la principale raison d’un échec lors d’une restauration dentaire serait l’apparition de caries secondaires à la marge de la restauration dues aux bactéries restantes, problème a priori résolu par l’application de l’apprêt et de l’adhésif que son équipe aurait mis au point.

Nanocomposite à base de phosphate de calcium

L’élément clé du nanocomposite et de l’apprêt-adhésif nanostructuré serait le phosphate de calcium, composant la partie minérale des os et des dents, ici sous forme de nanoparticules qui régénèrent les minéraux de la dent. Le composant antibactérien est composé d’une base d’ammonium quaternaire, dérivé de l’atome d’azote et connu pour être bactéricide et fongicide, ainsi que de nanoparticules d’argent, le tout à un pH élevé. En effet, un pH alcalin neutralise l’excès d’acidité engendré par les bactéries présentes dans la flore buccale.

Le plombage en nanocomposite élaboré par l’université du Maryland, combiné à l’apprêt et à l’adhésif antibactériens, devrait pouvoir avoir une durée de vie bien plus longue que les habituels dix années observées pour un plombage traditionnel, selon une estimation de l’équipe du professeur Wu. Leur découverte, bien que nécessitant des travaux complémentaires, a néanmoins été testée en laboratoire, à l’aide de biofilms provenant de la salive de quelques volontaires. La prochaine étape devrait amener les scientifiques à tester le plombage et l’apprêt sur des animaux et des volontaires humains, en partenariat avec l’université fédérale de Ceara, au Brésil.

Par Moonzur Rahman, journaliste scientifique

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