Reportage

Rosetta met à jour une cavité diamagnétique autour de Tchouri

Posté le 15 mars 2016
par Sophie Hoguin
dans

A la surprise des scientifiques au chevet de Rosetta, la sonde a réussi à détecter une cavité diamagnétique autour de la comète Tchouri, bien plus grande et plus active que ce qu'ils avaient prévu.

Avant même d’arriver à proximité de Tchouri, les scientifiques espéraient bien observer de près une région sans champ magnétique autour de la comète. Une cavité diamagnétique telle qu’avait pu détecter la sonde Giotto auprès de la comète de Haley il y a 30 ans. Rosetta avait été équipée d’un magnétomètre à cet effet, en vu de prouver que le noyau de la comète n’était pas magnétisé.

Quand tout espoir part en poussières

ESA

Comme Tchouri est beaucoup plus petite que Haley, les astronomes avaient prévu que la cavité serait de l’ordre de 50-100 km autour du noyau (contre plus de 4000 km pour Haley) et qu’elle ne se formerait que pendant la période où la comète est la plus proche du Soleil (périhélie). Malheureusement, au cours de l’année 2015, les poussières dégagées par la comète devinrent telles qu’il a fallu écarter Rosetta à plus de 170 km du noyau pour la sauvegarder. Les scientifiques avaient perdu presque tout espoir de détecter une éventuelle cavité diamagnétique. « C’est pourquoi, nous avons vraiment été très étonnés quand nous l’avons finalement trouvé ! », explique Charlotte Götz, de l’institut allemand de Géophysique et de physique extraterrestre de Braunschweig, qui signe l’étude de cette cavité dans Astronomy et Astrophysics et qui présente ses résultats à l’occasion du 50eme symposium ESLAB « de Giotto à Rosetta », qui se tient actuellement à Leiden aux Pays-Bas.

Comment expliquer une cavité aussi grande ?

Au final, depuis juin 2015, c’est plus de 700 détections de régions sans champ magnétique qui ont été mises à jour.  Pour comprendre pourquoi cette cavité était aussi grande, Charlotte Götz et ses collègues ont vérifié si les autres instruments détectaient une activité anormale qui aurait pu « pousser les limites de la cavité » de manière momentanée. Mais seule, une des mesures correspond à un fort rejet de gaz et de poussières. Pour expliquer la taille de cette bulle démagnétisée, ne reste plus qu’une explication liée à la dynamique de la frontière de la cavité.

Une bulle aux frontières oscillantes

Les frontières entre des régions aux propriétés physiques très différentes sont souvent instables. Et la chevelure d’une comète active est tellement chargée en gaz et poussières qu’elle est capable de bloquer les vents solaires, flots de particules chargées électriquement. Sur le côté où la comète fait face au Soleil, c’est comme si les vents solaires rencontraient un mur, un peu élastique. Ils s’accumulent avant d’être repoussés sur les côtés et de petites oscillations sont créées le long de la frontière. Ces oscillations s’amplifient dans la direction opposée au Soleil et font que la cavité s’agrandit périodiquement.

Une hypothèse qui concorde avec les enregistrements

Cette hypothèse est confortée par le fait que les enregistrements de l’absence de champ magnétique sont sporadiques et séparés de plusieurs minutes : ce n’est pas Rosetta qui traverse la cavité, mais cette dernière qui englobe Rosetta à intervalles répétés. Les scientifiques analysent maintenant les différents enregistrements pour mieux comprendre les propriétés du plasma autour de la comète et son interaction avec les vents solaires. Bien que la comète ait maintenant dépassé son périhélie depuis plusieurs mois, des zones sans champ magnétique ont été trouvées jusqu’à maintenant (février 2016), plus près du noyau, duquel Rosetta a de nouveau pu s’approcher. 

Sophie Hoguin


Pour aller plus loin

Dans les ressources documentaires