Mécanicienne, ajusteuse, chaudronnière: les métiers techniques de l’aérien s’accordent au féminin au salon du Bourget, reflet d’un secteur en tension qui cherche « tous les talents » mais doit, pour convaincre les femmes de le rejoindre, lutter contre des préjugés tenaces.
Dans un espace réservé aux formations sous l’un des hangars du plus grand salon aéronautique du monde, où trônent deux « Concorde », les groupes scolaires se succèdent devant des stands aux couleurs vives présentant chacun une spécialité, démonstrations à l’appui: ingénierie, travail des métaux, avionique…
Les jeunes filles « ne s’imaginent pas pouvoir venir dans l’aéronautique, déjà, et encore moins sur un métier technique », explique Perrine Krnezic, responsable de l’engagement et de la marque employeur de l’entreprise de maintenance Sabena Technics, entre deux sensibilisations.
« On fait des tests, on passe beaucoup de temps dans le cockpit, pour des gens qui sont passionnés, c’est super », s’exclame sa collègue Noémie Dutruc, 27 ans, décrivant son métier de technicienne de l’avionique, les systèmes électroniques des aéronefs.
– « Grande diversité » d’emplois –
Mais si des profils comme le sien sont mis en avant par le secteur, celui-ci peine encore à recruter davantage de femmes, en particulier dans les métiers scientifiques ou techniques.
« On a besoin de tous les talents », plaide Nicolas Gros, directeur de l’association Aérométiers qui réunit les plus grands noms de l’aéronautique, des compagnies aériennes et des aéroports français, pour informer et orienter vers la « grande diversité » des emplois qu’ils proposent.
Les carnets de commande d’Airbus sont pleins pour dix ans. Le secteur aéronautique français crée des emplois nets et veut recruter entre 25.000 et 30.000 personnes en rythme annuel.
« En recrutement on était à 20% de femmes il y a dix ans, on frôle les 30% aujourd’hui », explique Philipe Dujaric, directeur des affaires sociales et de la formation du Gifas, le Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales, qui fédère la filière et organise le salon du Bourget, en cours jusqu’à dimanche.
Côté effectifs, « dans le monde du transport aérien, le pourcentage de femmes, c’est 44% », dopé par le contingent d’hôtesses de l’air. « Dans le monde de l’aéroportuaire, c’est 33%. Dans la construction aéronautique, c’est 25% », énonce M. Gros. Un dernier chiffre que M. Dujaric voudrait voir approcher à long terme des 40%.
Selon le directeur d’Aérométiers, des femmes candidates à l’embauche, « il y en a, mais pas assez parce qu’il n’y en a pas assez de formées », que ce soit en CAP, Bac professionnel ou même en écoles d’ingénieurs.
L’association s’est intéressée avec l’Education nationale aux « causes profondes » de ce manque d’intérêt et s’est rendu compte que des stéréotypes s’installaient… dès le CP.
– « Vous avez toute votre place » –
« Ce sont les parents qui ne savent pas qu’il s’agit de métiers accessibles aux femmes, qu’on peut avoir une carrière incroyable », regrette Anne Brachet, directrice générale adjointe d’Air France-KLM, responsable de la branche ingénierie et maintenance. Elle défend la « mixité, qui donne les meilleurs résultats » en travail d’équipe.
« J’ai beaucoup de mal à recruter des profils techniques, et encore plus des femmes », témoigne Camille Mansiaux, ingénieure responsable de la production du fabricant de moteurs pour l’aviation légère Turbotech.
« Parfois, les femmes manquent un peu de confiance en elles, avoir des modèles de personnes qui ont réussi peut les aider », poursuit-elle.
Un concept saisi au vol par Aérométiers qui organisait jeudi au Bourget la remise de prix de son concours « Féminisons les métiers de l’aéronautique » ouvert aux lycéennes et collégiennes, accompagnées de « marraines » issues du secteur.
« Vous avez toute votre place et vous devez la prendre, maintenant, tout au long de votre vie, et ne jamais vous excuser (…) il n’y a aucun secteur qui par principe serait réservé à quelques-uns », leur a lancé jeudi Aurore Bergé, ministre déléguée chargée de l’Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations.
La crainte d’être victimes de comportement sexistes peut aussi contribuer à détourner les jeunes femmes de métiers encore très masculins.
Les collègues les plus âgés peuvent avoir « des idées un peu fermées » sur la mixité, « mais il y a beaucoup de jeunes, donc ça va », assure Aude Guillemon, 23 ans, technicienne maintenance chez Sabena.
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