Un remboursement en France des médicaments anti-obésité pourrait changer la donne pour des milliers de Français. Reste à savoir si l’État et les laboratoires pharmaceutiques parviendront à s’entendre sur un prix et quelle sera la facture pour l’Assurance maladie.
Commercialisés depuis 2024 en France mais sans être remboursés, le Wegovy du laboratoire danois Novo Nordisk et le Mounjaro de son concurrent américain Eli Lilly sont des médicaments de la classe des analogues GLP-1 qui, en imitant une hormone digestive, favorisent la perte de poids.
Ces médicaments onéreux sont pris en charge par certaines assurances privées aux États-Unis mais ne sont généralement pas remboursés en Europe.
L’an dernier, la Haute autorité de santé (HAS) a ouvert la porte à une prise en charge dans des conditions de prescription très strictes pour des personnes atteintes d’obésité sévère.
Interrogé par l’AFP, Novo Nordisk assure être « mobilisé et déterminé pour obtenir dans les meilleurs délais une prise en charge de Wegovy pour les patients », soulignant ne pas maîtriser « malheureusement » le calendrier de remboursement dont les « discussions sont en cours ».
Son concurrent Eli Lilly, qui a déposé un nouveau dossier de demande de remboursement à la HAS dans le traitement de l’obésité en avril, dit à l’AFP attendre que le dossier soit évalué « dans les prochains mois ».
Les deux géants pharmaceutiques répètent à l’envi être « en capacité de fournir la demande » et « d’approvisionner le marché français et au-delà », même avec l’élargissement du pouvoir de prescription à tous les médecins annoncé vendredi.
– Soutenabilité financière –
Mais faut-il étendre l’accès à ces traitements au moment où le comité d’experts chargé de surveiller les dépenses de santé a alerté mercredi d’un « risque sérieux » de dépassement des dépenses d’assurance maladie en 2025, notamment en raison d’ « économies non réalisées sur le remboursement des médicaments?
« L’obésité, dans la grande majorité des cas, c’est une maladie chronique, ça veut dire un traitement au long cours, à vie en fait », car l’arrêt des médicaments entraîne une reprise du poids, fait remarquer la professeure en nutrition (APHP), Judith Aron.
Selon des projections d’octobre 2024 de la HAS, la population éligible au Wegovy se situe entre « 1,050 million et 2,1 millions de patients ». Mais « le prix n’étant pas défini à ce stade, il est complexe et prématuré de réaliser des estimations fiables sur l’impact en termes de remboursement de ces produits », a indiqué la Cnam à l’AFP.
Pour l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), chaque euro dépensé pour la prévention de l’obésité, facteur de risque de maladies cardiovasculaires, de diabète et de certains cancers, génère 6 euros de retour sur investissement.
Estimé à 12,7 milliards d’euros, le coût de l’obésité (soins remboursés et absentéisme au travail) devrait potentiellement dépasser les 15 milliards d’euros en 2030 en France, selon une étude du cabinet Astérès mandatée par Novo Nordisk parue en janvier.
– Décision « à l’automne » –
« Admettons qu’on paye, parce qu’on anticipe qu’effectivement qu’il y aura moins de comorbidités, moins de pathologies et donc, il y aura des économies pour le système de santé. Mais combien de temps le traitement va-t-il durer ? Est-ce qu’on prend en compte les effets indésirables, l’observance ? », déroulait mardi Virginie Beaumeunier, la présidente du CEPS, l’organisme public qui négocie les prix des médicaments remboursés en France.
Interrogée par l’AFP, en marge d’un colloque mardi, sur l’horizon d’une décision de remboursement, elle a répondu que celle-ci était attendue à « l’automne » après une évaluation médico-économique pour déterminer l’impact sur les dépenses de l’assurance maladie.
« Cet avis économique sera prochainement rendu en vue de la négociation tarifaire » concernant Wegovy, a précisé la HAS, à la demande de l’AFP.
Nul ne sait encore si un accord pourra être trouvé sur le prix.
« Quand le négociateur n’arrive pas à toper, c’est que soit le prix revendiqué par le négociateur, en l’espèce l’État, est trop bas, soit la revendication de prix par l’industriel est trop haute, et quand il y a un écart trop important, à la fin il n’y a pas de deal », expliquait en mars le directeur général de la Santé, Grégory Emery, devant des journalistes.
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