Pour le secteur du jouet aux Etats-Unis, les droits de douane imposés par Donald Trump, en particulier sur les produits chinois, prennent de plus en plus l’allure d’un cadeau empoisonné. Et même la période de Noël pourrait en souffrir.
« Nous sommes d’ores et déjà pratiquement à l’arrêt », s’inquiète Josh Staph, le directeur général de Duncan Toys Company, une entreprise américaine qui comme le reste de l’industrie du jouet repose principalement sur une production en Chine.
Confrontée à des taxes de 145% sur les produits provenant de ce pays, la société a tout simplement « cessé toutes (ses) livraisons aux Etats-Unis », explique-t-il à l’AFP depuis un grand entrepôt dans l’Indiana.
Cent jours après le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, les entreprises américaines tentent de s’adapter à une politique commerciale sans direction précise et pour le secteur du jouet, le choc est sévère.
L’année dernière, le pays a importé pour 17,8 milliards de dollars de jouets, dont 13,5 milliards depuis la Chine, selon les données du gouvernement américain.
Si Duncan Toys conçoit et développe ses produits aux Etats-Unis, elle fait fabriquer en Chine, se reposant sur le savoir-faire de sous-traitants capables de réaliser les pièces qui lui sont nécessaires. Des éléments qui en fin d’année dernière étaient quasi exempts de droits de douane.
Ce revirement est donc « très handicapant », explique Josh Staph. « Mais en tant que chef d’entreprise, après 100 jours avec ce gouvernement, je dirais que le plus difficile, c’est l’incertitude ».
« Comment voulez-vous mettre en place une stratégie quand les choses peuvent changer du jour au lendemain? », poursuit-il, pointant les revirements du républicain.
– Retard de livraison –
Le choc se fait déjà sentir pour les commerçants, à l’image de Rita Pin Ahrens, propriétaire de trois magasins de jouets, dont un à Washington, qui assure avoir vu ses factures augmenter en mars de 15% à 25% à cause des droits de douane. Elle s’attend à ce que cela continue jusqu’à 145%.
Dans ses rayons, une grande partie des milliers de références sont fabriquées totalement ou partiellement en Chine.
« Nous tentons de limiter le coût pour nos clients », explique-t-elle. Cela passe par ne plus proposer de produits trop chers ou faire des stocks avant que les droits de douane ne soient appliqués. Mais des retards de livraisons se produisent déjà.
« C’est un cauchemar », souffle-t-elle. « Je suis vraiment inquiète pour l’avenir du magasin. »
Dans un secteur qui regroupe principalement des petites entreprises, devoir payer d’imposants droits de douane sur des conteneurs de jouets peut être un frein, estime Greg Ahearn, directeur général du lobby du secteur, la Toy Association.
« La production de jouets est tout simplement à l’arrêt en Chine », souligne-t-il.
– « Un Noël difficile » –
Selon Josh Staph, les inventaires de jouets des grandes surfaces en vue des fêtes de fin d’année ne sont pas encore entrés dans le pays.
Ces jouets sont généralement produits au printemps, arrivent à l’été et sont livrés à l’automne.
« Si rien n’est réglé d’ici un mois ou deux, on risque de vivre un Noël difficile, avec des rayons vides chez la plupart des distributeurs », prévient M. Staph.
Et pour ceux qui seront disponibles, les entreprises américaines auront eu à payer 145% de plus pour les faire venir, rappelle M. Ahearn. « Le prix des jouets risque d’être doublé, si ce n’est plus, comparé à l’année dernière », dit-il.
Selon lui, 90% des jouets vendus aux Etats-Unis sont produits en dehors du pays, dont la plupart en Chine.
Développer la production aux Etats-Unis prendra des années, souligne Greg Ahearn, d’autant que certains outils spécifiques ne peuvent tout simplement pas être déplacés, il faudrait en refabriquer.
Le secteur était prêt à s’adapter aux 10% initialement annoncés par le président Trump sur les importations chinoises mais le taux a progressivement gonflé au fil des semaines et de la surenchère commerciale entre les deux plus grandes puissances économiques mondiales.
L’espoir pour Josh Staph viendrait d’une exemption accordée au secteur, alors que Donald Trump commence à cibler des domaines spécifiques, tels que l’électronique, les terres rares ou les produits pharmaceutiques.
Mme Ahrens, qui souligne que « les jouets sont importants pour le développement des enfants », rappelle que les jouets avaient déjà été exemptés durant le premier mandat du républicain. « Je ne peux qu’encourager vivement le président à le faire de nouveau », glisse-t-elle.
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