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Décryptage

Les tarifs d’achat du solaire photovoltaïque doivent baisser… vite !

Posté le par La rédaction dans Environnement

[Tribune] Pierre Bacher

La loi Grenelle I a fixé des objectifs ambitieux pour le développement du solaire photovoltaïque en France. Alors que le Programme Pluriannuel d'Investissement de 2006 avait visé 500 MWc en 2015, la loi Grenelle I et les décisions ultérieures du MEEDDAT doivent aboutir à 5,4 GWc, soit près de 10 fois plus.

Au tarif d’achat actuel, la charge financière serait colossale : à chaque kWc (kilowatt-crête) installé correspond une somme engagée proche de 16.000€ €, somme qui va à peu près pour moitié au fournisseur/installateur des panneaux, et pour moitié au particulier /maître d’ouvrage qui investit dans cette énergie renouvelable [1].

Le financement est assuré pour moitié par les consommateurs d’électricité au travers de la contribution de service public de l’électricité (CSPE), et pour un peu moins du quart chacun par les contribuables (au travers de crédits d’impôt, de subventions directes, de prêts à taux zéro) et par les particuliers qui installent chez eux les panneaux PV.

Les parts d’EDF sont faibles, tant dans le financement (part de l’achat non remboursée par la CSPE) que dans les recettes (redevance annuelle) :

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Si ces tarifs sont maintenus jusqu’en 2015, l’engagement total pour les 500 MW prévus dépassera 8 milliards d’euros. Leur maintien jusqu’en 2020 conduirait à un engagement supérieur à 80 milliards d’euros. Ce sont là des sommes colossales !

La plupart des technologies en développement ont besoin d’aides à la fois pour stimuler la recherche et pour faciliter l’industrialisation. De nombreuses études ont observé que les coûts diminuaient exponentiellement sous le double effet des progrès technologiques et de l’industrialisation. Dans le cas du solaire, une multiplication par 100 des quantités pourrait se traduire par une division par 3 du coût, qui passerait de 7000 à environ 2000 €/kWc. L’EPIA se dit encore plus optimiste [2].

Les tarifs d’achat doivent « coller » au plus près au coût réel des installations si on veut éviter l’apparition de bulles spéculatives et de phénomènes d’aubaines préjudiciables à l’ensemble du programme de lutte contre le changement climatique. On a déjà montré [1] que l’on pourrait ainsi diviser par 2 les sommes engagées. Passer de 80 à 40 milliards d’euros, ce n’est pas rien !

D’autres pays européens sont arrivés aux mêmes conclusions : l’Espagne, qui avait instauré des tarifs comparables aux tarifs français, a plafonné en 2008 les puissances installées parce que la facture devenait trop lourde ; l’Allemagne a adopté en octobre 2008 la loi dite EEG (entrée en vigueur le 1er janvier 2009) qui diminue de 9 % par an le tarif d’achat de l’électricité photovoltaïque (le point de départ étant voisin du tarif français actuel). Il est urgent que la France adopte des dispositions similaires.

Quarante milliards d’euros, c’est encore beaucoup, même étalés sur 20 ans, durée garantie d’achat de l’électricité. Mais si ces sommes permettent de placer l’industrie française en bonne position face à la concurrence mondiale, peut-être sont-elles justifiées. Souhaitons que les débats en cours aux niveaux français (autour des lois Grenelle) et européen (autour du paquet énergie climat) soient l’occasion d’une analyse approfondie.

 

[1] P. Bacher – « Loi Grenelle I et flux financiers » – Revue de l’Energie (à paraître)
[2] European Photovoltaic Industry Association Global PV outlook until 2013 (avril 2009)

 

Pierre Bacher, ancien élève de polytechnique, est l’auteur de « L’énergie en 21 questions » – édition Odile Jacob (2007), membre du conseil scientifique de Sauvons le Climat et éditorialiste à l’Espace Veille de Techniques de l’ingénieur.

Posté le par La rédaction


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