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Décryptage

Se préparer à IPv6 et éviter le grand bug

Posté le par La rédaction dans Informatique et Numérique

[Tribune] Philippe Cousin - eglobalmark, comité IPv6 Ready logo

Tout comme on a évité le bug de l’an 2000, il faut éviter le bug du futur Internet IPv6. Pour cela, il faut prendre en compte au plus vite et de manière sérieuse IPv6 au sein de toutes les entreprises pour se préparer et valider ses services ou produits. Le point avec Philippe Cousin, PDG d'eglobalmark et membre comité IPv6 Ready logo.

IPv6, suis-je concerné ?
A force de crier aux loups depuis de nombreuses années sur le crash du nombre d’adresses IPv4 disponibles et sur la vague IPv6 imminente, de nombreuses entreprises et ingénieurs se sont démotivés et démobilisés. Cependant quel que soit le débat sur la date à laquelle les adresses actuelles IPv4 ne seront plus disponibles, il est scientifiquement indéniable que la fin de IPv4 va arriver d’ici deux à trois ans. Sachant que nous sommes de plus en plus dépendants d’Internet ou du tout IP, il est impératif de se préparer, en prenant au minimum quelques mesures simples, voire en testant ses services et applications, ce qui ne demande pas d’effort si complexes ni coûteux.

Se préparer à l’IPv6
“J’appelle les pays de l’UE à faire en sorte qu’IPv6 soit largement employé par les autorités publiques et les entreprises d’ici à 2010″, a déclaré  en 2008 Viviane Reding, alors membre de la Commission européenne, responsable de la société de l’information et des médias. Que faire ? La Commission européenne apporte quelques briques de réponses à travers une communication en date du 27 mai 2008 « Faire progresser l’Internet, Plan d’action pour le déploiement du protocole Internet IP version 6 (IPv6) en Europe » COM (2008)313. De nombreux programmes mondiaux aident les entreprises à se préparer. Ce mouvement est amplifié par une logique sécuritaire aux Etats-Unis et un besoin vital en Asie qui manque d’adresses. L’Europe semble en sommeil depuis plusieurs années et espérons que cela ne va pas conduire à des handicaps pour l’innovation à venir, notamment pour la construction du futur Internet et de l’Internet des objets. Plutôt que d’attendre des incitations des autorités publiques ou des opérateurs, pourquoi ne pas se prendre en main et minimiser les risques, voire anticiper pour mieux innover ?

Estimation de la date de fin d’adresses IANA et RIR depuis 2007 – Extrait du rapport IANA IPv4 address report, mai 2010
Vérifier ma préparation, mes services, mes produits
Pour vérifier sa conformité et même obtenir un logo « IPv6 ready », des documents, essais et autres outils gratuits sont disponibles en ligne grâce au programme IPv6 ready logo détaillé plus bas.Toutefois, pour une vérification plus poussée ou adaptée à des besoins spécifiques actuels ou à venir, il est aussi possible d’utiliser des plateformes de développement ouvertes et gratuites et d’obtenir des soutiens d’experts français actifs dans le groupe G6  (www.g6.asso.fr). Est-il nécessaire de tester où valider ses produits ou solutions IPv6 si j’intègre un module IPv6 déjà éprouvé ? Des événements d’interopérabilité sont organisés tous les ans dans le monde et mettent en évidence le besoin d’effectuer des vérifications finales avec d’autres produits. Depuis 2000, l’Etsi a organisé huit événements IPv6 dont le dernier en 2006 (www.v6summit.com). Il semble que l’Europe soit tombée en léthargie sur l’IPv6 depuis et il est sûrement temps de se réveiller.

L’approche mondiale de validation IPv6, le comité « IPv6 ready logo »
Le forum IPv6 (www.ipv6forum.com), programme IPv6 Ready logo, est un programme de conformité et d’interopérabilité démarré en 2003 et visant à donner la confiance aux utilisateurs en démontrant qu’IPv6 est disponible et prêt à l’usage. Les objectives du programme IPv6 Ready logo (v6LC) sont les suivants :
  • définir les essais de conformité et d’interopérabilité ;
  • vérifier la mise en œuvre du protocole et valider l’interopérabilité avec d’autres produits ;
  • fournir l’accès à des outils gratuits d’auto-certification ;
  • délivrer les logos du programme ;
  • établir un réseau de laboratoires d’essais IPv6 Ready logo dans le monde pouvant fournir assistance et services.
Le V6LC comporte des représentants des fournisseurs d’équipement, des fournisseurs de service, des établissements universitaires, des organismes IPv6, des membres du projet Tahi (Japon), de l’université New Hampshire (UNH-IOL, Etats-Unis), d’Irisa/Inria (France), de l’Etsi (Europe), de BII (Chine), de TTA (Corée,  laboratoires CHT-TL (Taiwan) ou encore de JATE (Japon).Commencé en 2003 avec une phase I délivrant un logo « silver » sur la conformité aux protocoles IPv6 de base, le programme s’est développé depuis en ajoutant en 2005 un programme « gold » et récemment un programme pour la conformité SIP ainsi que pour les fournisseurs d’accès ISP. Plus d’informations, documents et procédures peuvent être obtenues sur le site www.ipv6ready.org. 

Le projet européen GO4IT
Pour une validation d’IPv6 plus poussés ou pour de nouveaux besoins plus complexes comme par exemple sur les objets communicants, le programme IPv6 ready logo peut apparaître limité. Cela a conduit l’Etsi à spécifier de nouveau les essais IPv6 utilisant son approche méthodologique rigoureuse (méthodologie TTCN-3) surtout si les essais doivent s’inscrire dans les mêmes logiques que les essais des terminaux mobiles conformément aux spécifications 3GPP. 1, 5 million d’euros ont été investis dans ce travail et les spécifications sont gratuitement disponibles.En parallèle, afin de fournir en Europe une solution pragmatique et « gratuite » comme au Japon (à l’origine du projet Tahi, www.tahi.org, qui a servi  de base à l’IPv6 ready logo programme), la Commission européenne a soutenu le projet de recherche GO4IT pour plus d’un million d’euros de 2005 à 2008 (www.go4-it.eu). Le projet GO4IT fournit un environnement générique d’essais à prix réduit, des services associés, ainsi que les suites exécutables d’essai IPv6. Cette plateforme, du fait de la mise en œuvre d’approches méthodologiques standardisées qui ont fait leur preuve, pourrait permettre d’étendre facilement le champ d’application à d’autres protocoles au-dessus d’IPv6 comme ceux mis en œuvre dans les objets (par exemple 6lowpan), chose plus difficile dans des environnements pragmatiques plus fermés qui n’ont pas à l’origine été conçus dans une vision globale des essais plus larges.

Les nouveaux défis et besoins
La marche de la migration IPv4 vers IPv6 semble se faire à pas forcés dans certains pays ou au contraire à petits pas dans d’autres pays. Il faut rappeler qu’IPv6 entraînera une nouvelle architecture Internet dont l’objectif final est louable : éviter une pénurie des adresses IP et favoriser l’émergence de services innovants liés à l’Internet des objets. La Commission européenne recommande aux Etats membres de “rendre obligatoire” l’utilisation d’IPv6 dans le cadre des marchés publics, de sensibiliser les entreprises et les organisations et de les aider lors de la transition.Avec plus de 1,3 milliard de personnes connectées, Internet est à un tournant de son histoire. Ce chiffre devrait atteindre 2,5 milliards d’ici à cinq ans. Le manque d’adresses IPv4 limitera la croissance d’Internet. Seul l’IPv6 permettra l’augmentation du nombre d’adresses.Pour rappel, IPV6 favorise le développement d’applications Internet innovantes, notamment dans le cadre de la mise en réseau d’un très grand nombre d’appareils simples. A titre d’exemple, la gestion de l’éclairage public et des bâtiments intelligents pourrait être améliorée. L’Internet pourrait également servir à connecter entre eux, à peu de frais et de manière fiable, des capteurs sans fil intégrés à des appareils domestiques. Au Japon, l’entreprise NTT utilise ce protocole pour connecter des milliers de capteurs à un système informatique permettant de détecter les tremblements de terre et de prendre des mesures immédiates par Internet pour limiter les dommages éventuels (par exemple des alertes à toutes les chaînes de télévision ou une gestion automatique des feux de signalisation passant tous les feux au rouge). Ce type d’application requiert des millions d’adresses et ne peut fonctionner sur l’Internet d’aujourd’hui. Les entreprises européennes doivent tirer parti de ce mouvement mondial très prometteur. Mettre IPv6 dans des objets ne suffira pas, il faudra assurer encore plus la fiabilité et l’interopérabilité des objets pour que cela puisse fonctionner sinon on observera de-ci de-là des solutions prometteuses qui auront des déploiements limités alors que les enjeux sont mondiaux. Philippe Cousin est CEO eglobalmark et membre comité IPv6 Ready logo. Il a été directeur services d’interopérabilité Etsi, organisant plusieurs événements mondiaux d’interopérabilité IPv6, et directeur technique projet de recherche GO4IT sur une plateforme ouverte d’essais IPv6. Contact : [email protected]

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