Mettre en mouvement les hommes et les équipes sur l’atteinte d’objectifs communs constitue une préoccupation majeure pour tout manager, que ce soit au sein d’une entreprise privée ou publique, d’une administration, voire d’une association sans but lucratif. Pour inciter un collaborateur à s’engager dans une action, le manager dispose de sa force de conviction et d’entraînement, de son charisme propre, mais aussi d’un certain nombre de moyens (rémunérations, promotions, sanctions, etc.) qui sont mis à sa disposition par l’organisation. Pour lui, la question est de discerner le bon levier sur lequel il doit jouer pour inciter, provoquer, améliorer, réguler... Manager revient pour une bonne part à bien connaître l’individu et sa situation dans son environnement (physique, organisationnel, social, culturel...) afin d’exercer sur lui l’influence qui sera mobilisatrice.
Or, la réponse à ce défi, connu classiquement en GRH (Gestion des Ressources Humaines) sous le nom de « problème de la motivation », est loin d’aller de soi. En premier lieu, le mot est piégé : véritable fourre-tout, il désigne les choses les plus dissemblables, le pire et le meilleur. D’où les critiques véhémentes dont il a été l’objet de la part de certains chercheurs et universitaires. C’est pourquoi nous avons jugé nécessaire, dans un bref premier paragraphe, de procéder à une indispensable clarification.
En second lieu, pour les auteurs (la plupart Américains) qui ont pris son étude au sérieux, la motivation a donné lieu, au cours du dernier demi-siècle, à une littérature immense. Chacun a tenté de comprendre le phénomène à partir de la grille d’analyse qui lui était familière : biologique, psychologique, psychanalytique, sociologique, anthropologique, cognitiviste, voire philosophique. Le passage par un examen comparatif des principaux modèles explicatifs est donc nécessaire. Ce sera l’objet du paragraphe 2.
Il nous restera ensuite à tirer de ces modèles des méthodes d’action qui soient réellement utilisables par les managers. Cette ambition est d’autant plus fondée que le thème de la motivation revient aujourd’hui en force dans les préoccupations d’entreprises. Avec le développement des organisations en réseaux, des structures par projets, de la flexibilité globale, du temps partagé, etc., motiver les hommes et les équipes devient une opération de plus en plus complexe et difficile qui ne peut s’accommoder de recettes et d’à peu-près. Or, si les théories sectorielles sont nombreuses (comme il sera vu au paragraphe 2), on ne dispose pas d’une vision suffisamment globale pour orienter la décision et l’action des managers. Une synthèse, à vocation opérationnelle, s’avère donc indispensable.
À un tel objectif cherche à répondre le dernier paragraphe de cet article. De facture délibérément descriptive et pratique, fortement inspiré par l’approche systémique, ce paragraphe cherche à articuler de manière interactive quelques-unes des principales théories. Il le fait sur un mode qualitatif, qui se veut simple mais non simpliste, de manière à « donner à penser » au manager, lui permettant de mieux comprendre sa situation pour mieux orienter son action.