La méthode des éléments finis s'est imposée comme un outil majeur de la représentation numérique des comportements en mécanique et plus largement en physique. Si les modèles sont maintenant de plus en plus évolués, incluant des hypothèses de plus en plus larges et exigeant des ressources de calcul de plus en plus grandes, ils ne font que calculer avec quatorze chiffres significatifs une réponse pour laquelle le concepteur ne dispose que de peu d'information sur les données. La théorie des probabilités offre un moyen de représenter l'incertitude de celles-ci par des variables ou des champs aléatoires. Les quantités d'intérêt résultant du calcul (contraintes, déplacements...) sont donc également aléatoires et la question est alors celle de la propagation des entrées dans le modèle de comportement, supposé représenter au mieux la réalité physique. De ces constatations est née la méthode des éléments finis stochastiques (MEFS, en anglais SFEM : « Stochastic Finite Element Method »), terme large regroupant différentes approches selon qu'elles concernent les variables ou les champs, les phénomènes statiques ou dynamiques.
L'objectif est donc simple dans son principe : connaissant le modèle stochastique des données, comment calculer le modèle de la réponse en sortie ; mais il implique des méthodologies complexes selon le but poursuivi. L'analyse de sensibilité recherche les propriétés centrales (moyenne, médiane ou variance de variables aléatoires) alors que l'analyse de fiabilité s'intéresse aux quantiles extrêmes et va jusqu'à rechercher la loi de probabilité. De par son caractère global, la méthode des éléments finis stochastiques est particulièrement bien adaptée à l'analyse de sensibilité.
L'héritage actuel des codes de calcul par éléments finis est considérable. C'est pourquoi une MEFS s'appuyant directement sur la très grande expertise de ceux-ci est proposée même si elle limite les possibilités de représentation de l'incertain. Elle est dite non intrusive car elle découple la résolution du modèle mécanique – le code de calcul est utilisé sans modifications – de celle du modèle stochastique. La méthode intrusive quant à elle, intègre le modèle stochastique dans les équations de la mécanique et oblige à modifier en profondeur le code de calcul. La MEFS non intrusive est la seule abordée dans cet article qui reste limité aux variables aléatoires après discrétisation.
Après un premier paragraphe rappelant les principes et les notations du modèle des éléments finis, le modèle stochastique des données est introduit dans un second paragraphe. La troisième paragraphe décrit les méthodes proposées : perturbation et chaos polynomial ; en les illustrant sur un exemple mécanique simple. Quelques champs d'applications sur des questions industrielles sont présentés en quatrième paragraphe et un exemple d'étude réelle commenté. Enfin, le dernier paragraphe discute l'intérêt et les limites de la MEFS pour les analyses de sensibilité et de fiabilité en conception mécanique. Il conclut par des perspectives.