Après une longue période de relative stabilité au long de laquelle les services de télécommunication se déclinèrent sous les deux formes essentielles qu’étaient le service téléphonique et le service du télégraphe plus communément appelé télex et où les principales innovations techniques restèrent somme toute confinées à l’intérieur de métiers bien caractérisés, la commutation et la transmission, pour simplifier, plusieurs évolutions majeures marquent les décennies 70 et 80.
La première évolution est sous-tendue par la fantastique révolution technologique qui naît au début des années 1960 sous l’impulsion de l’informatique : le développement de composants logiques de plus en plus complexes provoque à la fois une mutation des techniques de traitement de l’information dans le monde des ordinateurs et, par extension, dans celui des organes de contrôle des réseaux de télécommunication, et une mutation des techniques de transport de l’information avec l’irruption de la modulation numérique. C’est l’époque de la commutation électronique et de la téléphonie numérique, deux évolutions qui iront de pair, après quelques avatars.
La seconde évolution est également une conséquence du développement de l’informatique, cette fois en tant que cliente des réseaux de télécommunication. L’émergence de « l’ère de l’information » provoque un besoin de communication de cette information via les réseaux de télécommunication. C’est l’époque de la transmission de données, aussi bien en domaine privé, avec la multiplication des réseaux locaux ou LAN (Local Area Network), qu’en domaine public avec le déploiement de réseaux X.25 et autres réseaux télé-informatiques. Cette première brèche dans la stabilité des services de télécommunication va conduire, vers la fin des années 1970, à la définition et à la mise en place du RNIS (Réseau numérique à intégration de services).
Ce dernier consacre dans les réseaux de télécommunication une interpénétration des deux mondes de l’informatique et de la communication. Cependant, et tandis que la transmission de données augmente régulièrement ses revendications en termes de débit, un troisième grand acteur reste partiellement sur la touche jusqu’au début des années 1980 : le monde de l’audiovisuel et de la radiodiffusion. Longtemps réfractaire aux techniques numériques, longtemps isolé en termes de télécommunication du fait de la spécificité de services de nature diffusée, il subit cependant successivement les assauts du son numérique du disque compact, des réseaux câblés non exclusivement de CATV (cable television) — nous reparlerons plus loin du Plan câble français — puis de l’irruption de l’image numérique et du multimédia dans le monde de l’informatique... et des jeux.
Le concept de réseau à large bande naît au point de rencontre des trois mondes de l’informatique, de l’audiovisuel et des télécommunications. Très tôt l’on parle de B-ISDN (Broadband Integrated Services Digital Network), sans bien savoir au départ s’il s’agira réellement d’un réseau entièrement numérique ni s’il sera vraiment à intégration de services, sans même savoir d’ailleurs de quels services l’on parle... C’est dans ce contexte, ambigu et imprévisible, que l’ATM (Asynchronous Transfer Mode) voit le jour.