Il s’agit d’une condition de fond de brevetabilité (article L. 611-10, 1. du Code de la propriété intellectuelle et article 52(1) de la CBE). En substance, il est légalement prévu qu’une invention implique une activité inventive si, pour l’homme du métier, elle ne découle pas d’une manière évidente de l’état de la technique (article L. 611-14 du Code de la propriété intellectuelle et article 56 de la CBE). Autrement dit, le critère de l’activité inventive consiste à vérifier objectivement la non-évidence de la solution technique pour laquelle un brevet est sollicité et non à porter un jugement sur la qualité ou la démarche de l’inventeur : cette condition a ainsi pour objet l’invention elle-même et non l’inventeur.
Est évident ce qui relève du « progrès normal de la technique » ou encore de ce qui découle « manifestement et logiquement de l’état de la technique » (Dir. OEB G VII 4) ; l’évidence peut encore résulter du fait que l’homme du métier, pour atteindre la solution technique examinée, ne s’est livré qu’à de simples opérations d’exécution (Cass. com. 24-4-1990, n° 88-14.416).
La condition d’activité inventive procède de la même logique que celle de nouveauté en ce qu’elles permettent d’évaluer, de manière objective, si l’invention constitue bien un enrichissement de l’état de la technique qui, lui-même, justifie la délivrance d’un brevet. Mais l’activité inventive va plus loin : l’invention, certes nouvelle, doit de surcroît ne pas être évidente pour l’homme du métier. En d’autres termes, il y a, avec l’activité inventive, le franchissement d’un obstacle supplémentaire sur la voie de l’éligibilité à la protection par brevet d’invention.
La condition d’activité inventive est autonome à celle de nouveauté et chacune d’elle doit être appréciée distinctement (Cass. com. 6-3-1979, n° 77-13.334) de telle sorte qu’il n’est pas possible de déduire l’inventivité de la nouveauté et réciproquement.
En matière de demande de brevet européen, l’OEB évalue expressément l’activité inventive, ce qui implique, concrètement, qu’il ait préalablement admis le caractère nouveau de l’invention examinée (Dir. OEB G VII 1). S’il conclut à un défaut d’activité inventive, la demande sera rejetée. Pour une demande de brevet français, le système est différent : l’INPI n’est pas légalement investi du pouvoir de rejeter une demande de brevet français pour défaut d’activité inventive. Pour autant, l’activité inventive n’en demeure pas moins vérifiée, ce que restitue l’opinion sur la brevetabilité (dite opinion écrite) qui accompagne le rapport de recherche préliminaire (article R. 612-57 du Code de la propriété intellectuelle). Autrement dit, confrontée à une invention dont la nouveauté est acquise au contraire de l’activité inventive, l’INPI ne rejettera pas la demande. C’est au juge, saisi d’une demande en nullité du brevet français délivré, qu’il appartiendra de trancher.
C’est la raison pour laquelle il est coutume de dire que les brevets européens sont plus « solides » que les brevets français (au sens où ils sont théoriquement moins susceptibles de faire l’objet d’une décision judiciaire d’annulation). Somme toute, cette remarque doit être relativisée car les juridictions françaises peuvent parfaitement annuler la partie française d’un brevet européen pour défaut d’activité inventive, par exemple à la lumière d’une antériorité non visée par le rapport de recherche européen ou interprétée différemment. Il est à cet égard souvent rappelé que les tribunaux français ne sont tenus ni par les directives de l’OEB ni par les décisions rendues par lui (encore qu’elles puissent bien entendu être prises en compte à titre de preuve ou d’indice).