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De l’instabilité des modèles de l’Univers

Posté le 13 février 2017
par Sophie Hoguin
dans Informatique et Numérique

Les scientifiques ne cessent de faire de nouvelles découvertes les obligeant à repenser les modèles théoriques de notre Univers proche ou lointain dans l'espace et dans le temps. De la variabilité de la constante de Hubble à la recherche de la matière sombre en passant par l'Univers holographique.

Faut-il revoir le modèle cosmologique ?

Cette question se pose régulièrement face à certains résultats qui ne collent pas avec la théorie actuelle du modèle standard cosmologique. C’est notamment le cas de nouvelles mesures de la constante de Hubble (H0) qui représente la vitesse d’expansion de l’Univers.

Le satellite Planck qui a observé le fond diffus cosmologique (c’est-à-dire les restes des rayonnements émis lors du Big Bang) a fourni des données grâce auxquelles les chercheurs ont construit un modèle cohérent de l’histoire de l’univers. En se fondant sur leur modèle, ils estiment H0 à 67,8 km/s et par mégaparsec (Mpc).

Cependant, voilà que deux études trouvent une valeur plus élevée incompatible avec le modèle issu de Planck.

Tout d’abord, l’équipe de l’américain Adam Riess, qui a publié l’an dernier une étude évaluant H0  à 73 km/s/Mpc, en utilisant une méthode fondée sur la distance et la vitesse d’étoiles spécifiques (les Céphéides) et les explosions d’étoiles.

Ensuite, l’étude publiée par Vivien Bonvin, Frédéric Courbin, Sherry Suyu et leurs collègues, issue de nombreuses observations de la collaboration H0LiCOW et dont la méthode s’appuie sur une approche totalement différente: celle des lentilles gravitationnelles appliquées aux quasars (en observant les photons émis par un quasar à travers une galaxie, ils apparaissent déviés, démultipliés et pour certains retardés – voir cette vidéo. Ils ont alors estimé H0  selon différents modèles cosmologiques ou différentes hypothèses concernant la matière noire. Parmi leurs résultats, utilisant le modèle cosmologique issu de Planck, l’estimation de H0 est de 71,9 km/s/Mpc, avec une précision de 3,8%. Ce qui semble corroborer la mesure faite par l’équipe d’Adam Riess, mais ce qui n’est plus en accord avec celle trouvée par la collaboration Planck.

Où est la faille ? Soit il existe des biais dans les études récentes, soit l’interprétation du fond diffus cosmologique doit être revu. Et dans ce cas, quelles sont les hypothèses qu’il faut revoir ? La réponse viendra-t-elle d’une meilleure connaissance de cette “énergie noire”  ou de la découverte d’une physique totalement différente dans les premiers âges de l’univers ? Adam Riess, lui-même s’interroge.

Et si, aux premiers temps, l’univers n’était qu’un hologramme ?

Des chercheurs britaniques, canadiens et italiens viennent de publier une étude dans le  journal Physical Review Letters qui remet au goût du jour l’hypothèse d’un Univers holographique née dans les années 1990. Cette hypothèse pourrait permettre d’unifier la physique relativiste et la physique quantique. En étudiant le fond diffus cosmologique, ils ont trouvé des preuves, substantielles, en faveur d’une explication holographique de l’Univers. Selon eux, on pourrait ainsi imaginer qu’aux premiers temps, l’Univers était dans une phase holographique où l’espace et le temps ne sont pas encore définis et qu’il serait entré dans une phase géométrique plus tardivement (voir schéma). Les propriétés physiques de la phase holographiques obéiraient à la physique quantique quand celles de la phase géométrique seraient mieux décrites par la physique relativiste.

Recherche matière/énergie sombre désespérément

Les recherches pour caractériser et trouver cette fameuse matière/énergie sombre sont pléthores et plusieurs pistes font l’objet d’études poussées.

C’est ainsi que dans le cadre du projet européen DarkMatterAMS qui s’appuie sur les données recueillies par un détecteur de particules (AMS-02) monté sur l’extérieur de la station spatiale internationale, les chercheurs estiment qu’il existe une source active de positrons dans notre galaxie qui ne proviendraient donc pas des rayons cosmiques. L’hypothèse aujourd’hui  privilégiée serait celle de nombreuses collisions de matière sombre engendrant ce surplus de positrons à des énergies faibles.

Sur Terre, c’est l’IceCube Neutrino Observatory qui a publié de nombreux résultats entre septembre 2016 et mi-janvier 2017 dont une synthèse de ses observations. Cet observatoire enterré sous 1,45 km de glace en Antarctique est dévoué à la détection des neutrinos. La glace opérant comme un filtre naturel pour isoler les effets des neutrinos par rapport aux autres particules et radiations.
L’un des objectifs de cet équipement est de mieux caractériser les trois saveurs de neutrinos connus actuellement (tau, muon et électron neutrino) et leurs différents mélanges, voire de réussir à trouver un quatrième type de neutrinos (les neutrinos stériles) qui pourrait expliquer la masse manquante de l’univers. Les premières analyses sont en défaveur de l’existence d’un neutrino stérile léger mais il reste beaucoup d’observations à faire. En attendant, IceCube a cependant déterminé qu’il n’y a pas de source unique de neutrinos dans l’Univers. Leur origine pourrait provenir de multiples sources (blazars, explosion de supernova tout comme d’autres corps peu lumineux de haute densité).

La Voie Lactée, poussée et tirée à la fois

Notre galaxie, la Voie Lactée se déplace non pas seulement attirée par un zone de haute densité de matière, mais aussi sous la poussée d’une zone de vide que des chercheurs français et israeliens ont détecté. Cette découverte résout une énigme de plus de 40 ans sur les forces expliquant le déplacement particulier de la Voie Lactée et de sa voisine Andromède (voir cet article pour plus de détails).

Notre système solaire évolue

Alors que l’on croyait que notre système solaire n’avait pas vraiment bougé depuis au moins un milliard d’années, l’analyse de météorites tombés lors de l’Ordovicien (-500 millions d’années) dont la composition est totalement différente de ceux d’aujourd’hui laissent à penser qu’il y a eu de forts remaniements au sein de notre système solaire à cette époque pouvant expliquer cette différence dans le flux météoritique selon une étude parue dans Nature Astronomy.

Sophie Hoguin


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