L’ISS[1], mise en orbite en 2000 et hébergeant des astronautes venus du monde entier dans le cadre d’une coopération internationale[2], va être probablement désorbitée plus tôt que prévu. Le premier à l’avoir suggéré est Elon Musk dans un message sur X, posté le 20 février dernier, dans lequel il précise la date fatidique : 2027 ; soit bien avant 2030, la date programmée par la NASA. « Il est temps de commencer les préparatifs pour la désorbitation de l’ISS. (…) Allons sur Mars », a-t-il écrit.
La plate-forme qui a permis la réalisation de plus de 4 000 expériences scientifiques a accompli sa mission et n’a plus d’utilité selon lui. Il souhaite concentrer les activités spatiales sur des projets plus ambitieux et notamment sur son cheval de bataille préféré : la conquête de Mars.
La volonté d’une désorbitation anticipée de l’ISS peut surprendre quand on sait que SpaceX a décroché un contrat de près d’un milliard de dollars pour concevoir le véhicule qui assurera la descente vers l’atmosphère terrestre à la date fixée par la NASA, à savoir 2030.
Un épisode de science-fiction
Une mésaventure récente illustre la phase de déclin dans laquelle se trouve la station : alors qu’ils étaient partis initialement pour huit jours afin de tester la capsule Starliner de Boeing, des astronautes américains sont restés bloqués dans l’ISS. Une histoire qui finit bien puisqu’ils sont revenus sur Terre, le 18 mars dernier, à bord d’une capsule Crew Dragon de l’entreprise SpaceX. Un séjour qui aura duré neuf mois dans l’espace.
Des fuites qui ouvrent une brèche
Cet épisode reste toutefois anecdotique par rapport à un autre problème plus préoccupant : une fuite d’air persistante à bord d’un module russe de l’ISS. Tout commence en septembre 2019 quand une fuite de 0,54 kg par jour est détectée. Le débit ne cessant d’augmenter, la fuite a atteint 1 kg par jour en janvier 2020. En octobre, la localisation de la fuite est identifiée sur le segment PrK situé à l’arrière du module russe de service et d’habitation Zvezda.
Des fissures sont découvertes et résorbées avec les moyens du bord en mars 2021. Un nouveau signalement a lieu en février 2024 par les responsables spatiaux russes qui quantifient, dans le même module, une perte de 1 kg d’air par jour. Deux mois plus tard, le volume est passé à près de 1,7 kg d’air par jour.
Le segment étant un tunnel de communication avec d’autres parties de la station orbitale, l’équipage à bord a opté pour la fermeture du sas du PrK ce qui permet de l’isoler du reste de la station.
Une fissure dans l’entente diplomatique
Depuis cinq ans, le problème n’a connu aucune résolution, car ni la NASA ni Roscosmos[3] ne parviennent à se mettre d’accord sur la cause de ces fissures. Selon l’Inspecteur général de la NASA, les causes sont à rechercher du côté des soudures internes ou externes, le module Zvezda lancé en 2000 étant un des éléments les plus anciens de l’ISS. Roscosmos, de son côté, minimise l’ampleur des dégâts. Comment envisager l’avenir lorsque le temps passé à maintenir en bon état la station est supérieur à celui consacré à des expériences scientifiques ?
Les partenaires internationaux de la NASA maintiennent toujours leur engagement jusqu’en 2030, Roscosmos étant engagée jusqu’en 2028 pour le moment.
En mai dernier, Washington a semblé abonder dans le sens de Musk en annonçant, pour 2026, une réduction budgétaire de 500 millions de dollars dans le programme de l’ISS. Une réduction qui suggère de revoir à la baisse la taille et les rotations de l’équipage, les vols de ravitaillement ainsi que les activités scientifiques. Le coût du maintien de l’ISS était déjà très lourd pour la NASA dont la participation s’élève, par an, à environ 3 milliards de dollars. Son engagement sera donc difficile à tenir si les financements ne suivent pas.
[1] Station spatiale internationale
[2] Entre les États-Unis, la Russie, l’Europe, le Japon et le Canada
[3] Agence spatiale de Russie
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