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Biocarburants pour l’aérien : c’est pour bientôt ?

Posté le 30 novembre 2022
par Pierre Thouverez
dans Énergie

Un mois dans l'espace #35
Les recherches sur les biocarburants constituent aujourd’hui une voie à fort potentiel pour relever un ambitieux défi, à savoir la décarbonation partielle de l’aviation d’ici à 2050.

Le 16 novembre dernier, la Royal Air Force a réalisé une première. En effet, les forces aériennes britanniques ont fait voler un Airbus 300 MRTT, avec des cuves remplies à 100 % par des biocarburants. Une prouesse réalisée lors de la COP 27, qui se tenait en Egypte. Pour réaliser ce vol, les moteurs ont été très peu modifiés, et les ingénieurs ont calculé que les émissions de GES lors de cet exercice étaient quatre fois inférieures à celles d’un vol identique avec du carburant classique. Ce qui laisse entrevoir le potentiel des biocarburants pour verdir les transports aériens. D’ailleurs, les chercheurs restent persuadés que les biocarburants constituent, avec les avions électriques, le plus gros espoir pour permettre au secteur aérien d’atteindre ses objectifs de décarbonation.

Le développement de biocarburants innovants, dits SAF (sustainable aviation fuel), et de l’aviation électrique sont souvent cités comme étant les solutions miracles pour permettre aux compagnies aériennes d’atteindre leurs objectifs environnementaux. On le sait aujourd’hui, le secteur aérien ne pourra pas relever ses défis écologiques sans opérer d’importants changements dans sa façon de fonctionner. Même si l’empreinte écologique du secteur aérien (moins de 2 % des émissions totales) reste peu élevée, c’est donc une véritable révolution que va devoir opérer tout un secteur industriel pour rester compétitif et écologique en même temps.

Les biocarburants feront assurément partie de cette révolution, même s’il est difficile d’anticiper. En 2007, l’Association Internationale du Transport Aérien assurait que les biocarburants pour l’aviation représenteraient, en 2020, 10 % des carburants utilisés par l’aérien. La réalité a donné tort à l’AITA, puisque ce chiffre atteint aujourd’hui péniblement 0,01 % et fait l’objet de nombreuses critiques. Sauf que depuis, le secteur aérien a affronté une crise sanitaire et s’est engagé pour, sur le moyen terme, décarboner son activité. Dans l’immédiat, le développement des biocarburants semble, sur court-moyen terme, un outil efficace pour faire baisser les émission du secteur aérien de manière significative.

Les objectifs de la feuille de route publiée par le Ministère de l’Ecologie tablent sur une intégration progressive des biocarburants dans le mix aérien : 2% en 2025, 5% en 2030… puis 50% en 2050, pour être cohérent avec les objectifs nationaux et continentaux de neutralité carbone.

Seul problème, aujourd’hui la production de biomasse permettant de fournir la matière première pour produire des biocarburants fait l’objet d’une demande forte, dans de nombreux secteurs d’activité, et notamment celui du transport routier. Le coût de production des biocarburants destinés à l’aviation reste aujourd’hui entre 2 et 3 fois supérieur à celui du kérosène utilisé actuellement.

Cette course à la biomasse est donc la première étape vers un développement massif de nouveaux carburants dans le secteur aérien. Aujourd’hui les projets autour des biocarburants se multiplient, comme celui de TotalEnergies à Grandpuits-Bailly-Carrois. L’entreprise française veut convertir sa raffinerie en plateforme zéro pétrole, et transformer 400 000 tonnes de biomasse par an, en partie en biocarburant destiné au secteur aérien.

L’appel à projet lancé par le gouvernement pour le « développement d’une filière de production française de carburants aéronautiques durables », qui s’est clos il y a quelques semaines, pourrait constituer un catalyseur pour changer d’échelle en ce qui concerne la production de biocarburants tricolore destinée à l’aviation. 

 


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