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Energy Observer : Le Solar Impulse des mers

Posté le 5 avril 2018
par Pierre Thouverez
dans Innovations sectorielles

L’Energy Observer, un navire énergétiquement autonome grâce à des énergies renouvelables, a levé l’ancre mercredi 28 mars du port de Marseille pour un tour de la Méditerranée avant de se lancer sur les mers du monde. Son épopée a vocation à préfigurer le modèle énergétique de demain et à ramener de ses différentes escales les retours d’expériences des projets innovants en matière d’énergie et d’environnement rencontrés à travers le monde.

Un laboratoire flottant

L’Energy Observer a beau être un bijou de technologie ultra-moderne, ce catamaran a déjà une belle histoire comme le raconte à Techniques de l’Ingénieur son fondateur Victorien Erussard : « C’est un bateau emblématique qui a remporté le record du tour du monde à la voile en 1994 lorsqu’il était piloté par Sir Peter Blake. Depuis, il était plus ou moins en sommeil, et nous avons décidé de le racheter pour lui donner une seconde vie ». Le navire n’a plus grand chose à voir avec sa première version. Il a été refait de fond en comble pour l’alléger et le transformer afin d’en faire un laboratoire d’énergies renouvelables sur eaux. « C’est une sorte de Solar Impulse des mers », s’amuse son capitaine, en référence à l’avion propulsé uniquement par des panneaux photovoltaïques.

©Romain Chicheportiche

Energy Observer fonctionne en effet avec deux moteurs électriques (un à babord, l’autre à tribord) alimentés par 120 m² de panneaux solaires issues de trois technologies (conformable, bifaciale et avec un revêtement antidérapant) cumulant 21 kWc. Le vent ne pousse pas de voile, mais fait tourner deux éoliennes à axe vertical muni d’un système antivibratoire d’1 kW chacune. Enfin, les deux moteurs produisent également de l’électricité par hydrogénération de 2x2kW. Deux systèmes de stockage viennent compléter l’ensemble pour pallier à l’intermittence : des batteries de puissance lithium-ion de 400 V/106 kWh et 8 réservoirs à hydrogène cumulant 62 kg en charge pleine. Le tout est piloté par un système de monitoring en temps réel qui gère et optimise les flux énergétiques.

Le problème, c’est la vitesse

Le concept a déjà été éprouvé et il a montré qu’il fonctionnait lors des 4 000 miles nautiques déjà parcourus au large de la France en 2017. « Nous avons à cette occasion pu tester les systèmes en conditions réelles et avons depuis éliminé les défaillances techniques qui apparaissent toujours lorsque l’on passe des phases de tests en laboratoire à la réalité. Aujourd’hui nous sommes prêts », indique Victorien Erussard, qui a reçu le concours notamment de l’Institut national énergie solaire (INES) et du CEA-Liten. « Nous avons d’ores et déjà atteint notre objectif de l’autonomie énergétique, mais nos vitesses restent relativement faibles, de l’ordre de 4 à 5 nœuds. Pour démontrer que notre concept peut être répliqué à une échelle commerciale, il nous faut atteindre le double, ce qui représente un enjeu considérable ». En effet, le besoin d’énergie grimpe de manière exponentielle à mesure que la vitesse augmente : NRJ nécessaire = vitesse au carré.

©Romain Chicheportiche

Sensibiliser et apprendre

Lors de son voyage en Méditerranée, puis autour du monde, l’Energy Observer va faire plus d’une centaine d’escales dans 50 pays pour sensibiliser la population mondiale aux problématiques de changement climatique et d’énergies renouvelables. Des tentes seront montées à chaque point d’arrêt pour présenter le projet et les réseaux sociaux seront massivement mis à contribution pour faire partager le quotidien de l’équipage d’une petite quinzaine de personne. Parmi eux, Jérôme Delafosse, chef d’expédition, réalisera des documentaires sur le navire, mais aussi sur les projets innovants en matière de transition énergétique rencontrés à travers le monde. Car l’Energy Observer compte bien continuer à promouvoir un nouveau modèle énergétique : « En, mer nous avons autant besoin de soleil que de vent, des batteries que de l’hydrogène. Il en va de même sur terre. Les énergies alternatives et les moyens de stockage sont complémentaires et nous devons apprendre à les faire fonctionner ensemble : il n’y a pas une seule solution contre le réchauffement climatique, mais une multitude de possibilités », conclue Victorien Erussard.

Romain Chicheportiche


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