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L’aide à la conduite pourrait-elle nous transformer en « fous du volant » ?

Posté le 30 avril 2019
par Philippe RICHARD
dans Innovations sectorielles

Les accidents récents du Boeing 737 MAX (en octobre 2018 et mars dernier) confirment que la débauche de technologies complique la maîtrise par les pilotes. Cette problématique pourrait-elle s’appliquer aux voitures de plus en plus équipées d’aide à la conduite ?

Afin de ne pas se laisser distancer par son concurrent Airbus, Boeing n’aurait-il pas grillé les étapes obligatoires en matière de sécurité ? On peut se poser la question avec les crashs des Boeing 737 MAX.

L’avionneur avait en effet décidé d’installer le MCAS (Maneuvering Characteristics Augmentation System) sur tous ses 737 MAX, une nouvelle version modernisée et remotorisée du moyen-courrier. Officiellement, l’intégration de son logiciel du système anti-décrochage n’entraîne que de faibles modifications. Il n’était donc pas nécessaire de former les pilotes ou même de leur apprendre l’existence… du nouveau logiciel.

Aides à la conduite et sentiment de sécurité

En janvier 2016, le premier exemplaire d’essai du Boeing 737 MAX décolle. Sans souci. On connaît la suite… Et si demain, cela se produisait avec nos voitures ? D’ici trois ans, tous les modèles des constructeurs devront donc présenter par exemple le maintien de trajectoire et le contrôle de la somnolence. Objectif : renforcer la sécurité routière.

Megacities Institute, avec le soutien de ses membres (Allianz, Bosch et GiPA), a réalisé une étude auprès de conducteurs de véhicules semi-automatisés, c’est-à-dire équipés d’au moins un des trois systèmes d’aide à la conduite étudiés (freinage d’urgence, régulateur de vitesse adaptatif, parking automatisé).

Selon cette étude parue en février dernier, 94 % des conducteurs gardent le freinage d’urgence activé en permanence et 79 % activent régulièrement le régulateur adaptatif de vitesse. Ils apprécient ces aides à la conduite pour la sécurité procurée.

Freinage « plus sûr »

Mais cette débauche d’électronique représente-t-elle une réelle avancée pour la sécurité routière ? Selon un sondage réalisé par Bloomberg en juillet 2018, la moitié des automobilistes reconnaissent que les assistances à la conduite changent effectivement leur manière de conduire. Comme pour les pilotes d’avion, une formation ne serait-elle pas nécessaire pour mieux appréhender ces outils et savoir réagir correctement ?

L’automatisation créé un faux sentiment de sécurité. Le monde de l’aviation en est le parfait exemple. Mais elle pourrait s’appliquer aussi à l’automobile. Lors du déploiement de l’ABS en série sur les automobiles, une étude réalisée sur des taxis allemands a montré que les conducteurs, convaincus de disposer d’un freinage « plus sûr », réduisaient leurs distances de sécurité et augmentaient sensiblement leur vitesse.

Cependant, il faut noter que ce comportement de compensation (en référence aussi à l’homéostasie du risque, une théorie de Gérard Wilde établie en 1982) a tendance à disparaître dans le temps.

Reste que la vigilance doit être constante.  75 % des accidents ont lieu à proximité du domicile, la plupart du temps lors des trajets domicile-travail (source : Sécurité routière).


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