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Lutter contre le givre en s’inspirant des végétaux

Posté le 11 mai 2020
par Arnaud Moign
dans Chimie et Biotech

Perturbation de l’aérodynamisme de l’appareil, diminution de la puissance des réacteurs, retards au décollage... Qu’il se forme au sol ou à haute altitude, le givre est l’ennemi juré de l’aviation. En s’inspirant de la nature, des chercheurs de l’université américaine Northwestern ont trouvé une méthode permettant de diminuer de 60 à 80 % la formation de glace sur n’importe quelle surface.

Il n’y a pas que dans l’aéronautique que la formation de givre est problématique. Elle réduit considérablement l’efficacité énergétique des congélateurs et perturbe l’approvisionnement en énergie lorsqu’elle s’accumule sur les câbles à haute tension ou dans les turbines des éoliennes.

Les techniques actuelles de lutte contre le givre

Cela fait des dizaines d’années que les chercheurs du monde entier étudient les solutions permettant de lutter contre la formation de glace. Surfaces superhydrophobes, surfaces glissantes, matériaux à faible résistance interfaciale… les stratégies de lutte “passive” contre la formation de givre sont nombreuses. Il faut cependant se rendre à l’évidence : les traitements de surface à l’échelle moléculaire ainsi que les solutions développées à l’échelle nanométrique ou micrométrique ont l’inconvénient de se dégrader rapidement.

“Au bout de quelques heures, 100 % de la surface de ces matériaux est recouverte de glace dans des conditions de givrage continu”, affirme Kyoo-Chul Kenneth Park, professeur assistant d’ingénierie mécanique de l’université de Northwestern.

La solution est dans l’observation de la nature

En observant les feuilles de certaines plantes en hiver, on constate que la glace se forme de manière discontinue. On doit ce constat à la présence d’une macro structure à l’échelle millimétrique et au principe physicochimique de formation du givre.

“Le transport de l’air humide vers les surfaces froides est gouverné par le principe de diffusion (loi de Fick). Si la surface contient des macrotextures concaves (comme les veines des feuilles), la vapeur d’eau est transportée préférentiellement vers les parties convexes ou plates à proximité, formant un condensat ou des cristaux de glace”, précise Park.

Formation de givre sur des feuilles /K.-C. Kenneth Park.

Un phénomène entièrement lié à la macrotexture

Les travaux que cette équipe de chercheurs ont publiés dans le numéro de mars 2020 de Proceedings of the National Academy of Sciences avaient pour but principal de “trouver un moyen d’obtenir un taux de couverture par la glace inférieur à 50 %, en analysant la macro texture des feuilles”, selon Park.

Pour y arriver, ils ont utilisé plusieurs outils :

Park et son équipe sont ainsi arrivés au constat suivant : les effets de la macrotexture sur la formation de givre sont totalement indépendants du type de plante ou des matériaux utilisés.

“Nous avons même obtenu des résultats reproductibles qui montrent la présence de zones dénuées de givre sur des surfaces superhydrophiles, en accord avec nos simulations numériques et notre modèle analytique”, ajoute Park.

Des résultats encourageants

Les travaux de ces chercheurs permettent d’établir une ligne directrice pour le design de surfaces macro texturées. Les deux paramètres à considérer étant les conditions d’humidité ambiante et l’angle caractéristique de la macrotexture.

Par ailleurs, des résultats encourageants ont également été obtenus dans des conditions de convection forcée, ce qui laisse imaginer des applications dans l’aéronautique par exemple.

Image de Une : Formation d’une zone dénuée de givre sur une surface polymère /Yuehan Yao


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