Fact checking

Monsanto connait la toxicité du glyphosate depuis 1999

Posté le 28 mars 2017
par Matthieu Combe
dans Environnement

Selon un article du journal Le Monde, le géant de l'agrochimie Monsanto connaissait les dangers du glyphosate. Depuis 1999, la firme sait que cette substance utilisée dans le Roundup est génotoxique.

Encore du rififi autour du glyphosate. Le 15 mars 2017, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) a reconnu que le glyphosate pouvait causer de graves lésions oculaires et avoir des effets néfastes à long terme sur la vie aquatique. Officiellement, rien de plus. À aucun moment l’ECHA ne soupçonne le glyphosate d’être cancérigène ou mutagène. Néanmoins, l’Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA) proposait quand même récemment de renforcer le contrôle des résidus de glyphosate dans la nourriture.

Mais c’était sans compter sur la révélation des « Monsanto papers » par le journal Le Monde. L’histoire se passe aux États-Unis. Des personnes atteintes d’un lymphome non hodgkinien ont fini par avoir accès à des documents secrets. Ces malades atteints d’un cancer du sang accusent le Roundup d’en être la cause. La justice fédérale a choisi de déclassifier 250 pages de correspondance interne de la firme. Ces courriels de Monsanto révèlent que le caractère génotoxique du glyphosate est connu depuis 1999, tout comme son potentiel mutagène.

La vérité sur le glyphosate arrangée par le patron de Monsanto ?

À la fin des années 90, Bill Heydens demande à un expert d’écrire un rapport sur le glyphosate. Le professeur James Parry est contacté, mais son étude ne convainc pas. Le Roundup est vertement pointé du doigt par le scientifique. Conséquence : son étude est enterrée. Ce dernier avait conclu que « le glyphosate est un clastogène potentiel in vitro ». Autrement dit, la substance est potentiellement mutagène, donc capable d’influer négativement sur l’ADN et les chromosomes.

Comme l’atteste le Huffington Post, le patron de Monsanto a voulu dissimuler la vérité sur le glyphosate. Le but était de riposter efficacement au cas où une étude scientifique dénoncerait le glyphosate comme étant cancérigène. Heydens a demandé à des employés d’écrire des rapports à l’avantage du glyphosate. Endossant parfaitement l’habit du boni-menteur, Heydens a suggéré à des scientifiques de « juste signer de leurs noms » les rapports fallacieux.

Mais en 2015, les découvertes de Parry sur la génotoxicité du glyphosate sont rendues publiques. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) reconnaît le « stress oxydatif » du glyphosate. Monsanto s’enflamme, et accuse le rapport d’être de la « science pourrie ». Parry avait suggéré à la firme de faire des analyses complémentaires. Mais les courriels révélés ont montré que Monsanto a décidé de faire autrement : « nous n’allons simplement pas conduire les études qu’il suggère ». Forts de cette découverte, une trentaine d’eurodéputés ont écrit à Jean-Claude Junker, président de la Commission européenne, pour faire interdire le glyphosate dans l’Union européenne.

Par Matthieu Combe, journaliste scientifique


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