Reportage

Experience#7 : Le soi du Gestalt consultant comme outil d’observation des processus

Posté le 11 août 2016
par Pierre Thouverez
dans Entreprises et marchés

Septième article d'une série qui en comportera 12. A travers le récit d'une expérience de management réelle, nous vous proposons de choisir, en votre âme et conscience, entre trois formules présentant chacune une manière différente de clôturer un problème concret. Aujourd'hui, l'accompagnement par l'approche Gestalt.

Une organisation c’est un système de ressources (humaines et matérielles) interactives coordonnées en structures pilotées et ayant pour finalité de satisfaire une mission de la meilleure façon possible. Une organisation n’est pas un système mécanique : c’est un système vivant.

L’efficacité des interventions visant à améliorer la façon de faire d’une organisation est donc intimement tributaire de la pertinence du modèle, de la philosophie et de la démarche qui sous-tendent ces interventions.

Ainsi, une démarche d’accompagnement du changement qui ne se focaliserait, par exemple, que sur la seule remise en question de  la personnalité des managers serait peu efficace. Ce serait comme prétendre soigner un bras cassé en cherchant à le remplacer par un bras neuf. En effet, l’analyse de personnalité (ensemble des comportements qui constituent l’individualité d’une personne) se limite à observer les caractéristiques intrinsèques des individus. Cette analyse postule que les conditions d’environnement ont peu d’influence sur la personnalité et qu’elle demeure relativement stable. Désigner la personnalité d’une population de managers, à la suite d’un test M.B.T.I. par exemple, comme les causalités du problème à résoudre ne ferait que compliquer le processus du changement. En négligeant le système environnant de ressources interactives, cette approche ne considère pas l’organisation comme un système vivant mais plutôt comme une combinaison de composants inertes. Difficile de soulager une indigestion avec une clé à molette !

L’approche Gestalt O.D. procède d’une observation globale des problèmes rencontrés par les organisations. Cette démarche considère que tout symptôme est le résultat d’un dysfonctionnement de l’ensemble du système en interaction avec son environnement. Dans les organisations, tout comportement, enchevêtré dans un réseau relationnel, est adopté en interaction avec les comportements des autres. Il a pour finalité de maintenir un certain équilibre au sein de ce réseau relationnel.

Ainsi, une démarche Gestalt O.D. focalise ses interventions sur la relation et sur l’impact qu’un système produit sur son environnement.

Prenons un exemple

Un chef d’entreprise désire renforcer l’efficacité de son organisation. Il a conscience qu’il devra transformer certains aspects de la culture d’entreprise (façon de travailler ensemble). Les comportements qui posent problème sont ceux qui concernent la prise en compte de la ressource temps.  Astreinte jusqu’alors à une obligation de moyens, cette entreprise a toujours soigneusement et minutieusement mené les projets qui lui étaient confiés avec un formalisme intraitable. Cette façon de procéder s’est bien ancrée à tous les niveaux de l’entreprise car elle lui a valu les éloges et la reconnaissance de ses clients. Aujourd’hui, ces derniers sont devenus plus exigeants. Ils réclament toujours plus de services de qualité mais surtout davantage de performance, notamment en matière de coûts. D’une logique de moyens, notre dirigeant doit aujourd’hui conduire son organisation vers une logique de résultats.

A la demande de ce haut responsable, une proposition détaillant la stratégie et la tactique de cette démarche lui a été soumise à l’issue de 4 réunions préliminaires en comité restreint. La stratégie envisagée pour transformer les comportements et la façon d’appréhender le temps s’appuie sur une éducation des membres de l’organisation qui serait dispensée par un leadership charismatique. L’accent est mis sur le développement des compétences suivantes : définir des objectifs réalistes et bornés dans le temps, choisir les ressources à mobiliser avec pertinence, améliorer l’efficience de ressources, formaliser les relations professionnelles sous la forme de contrats, apprendre à respecter ses engagements, etc.

Le soi du consultant comme instrument de mesure

Par la suite, une réalité embarrassante se précise de jours en jours à l’équipe de consultants engagés sur ce projet. En effet, la prise de décision d’engager la démarche de transformation de la culture d’entreprise est à chaque fois assortie de nouvelles précautions. Confirmée par une évaluation statistique d’impact, l’extrême prudence du directeur laisse apparaitre son net besoin de soutien de la part de ses équipes. Cette recherche d’approbation, caractérisant l’impact managérial qu’il transmet à ses adjoints,  lui apparaît comme une condition nécessaire au succès de son initiative. De leur côté, les consultants l’interprètent comme la recherche d’une garantie contre les risques d’échecs d’apprentissage des nouvelles compétences.

Les consultants trouvent le temps long. Les délais s’accumulent : temps de réflexion, ajournements pour vérification de la bonne adéquation des consultants, temporisations pour attendre l’approbation de ses collaborateurs directs, hésitations concernant les outils de tests d’impact, tergiversations autour de l’adhésion des collaborateurs du comité de direction, tâtonnements pour obtenir leur engagement « sincère », application minutieuse du processus d’établissement du contrat… Cette réalité autour de l’efficience de la ressource temps est embarrassante car elle ne semble pas apparaître au chef d’entreprise.

Dans une démarche Gestalt O.D., un consultant se concentre sur l’observation des processus en cours. Il est à la fois instrument de mesure et l’un des moteurs du changement. Parce qu’elle constitue un enjeu essentiel de la réussite de la stratégie de changement, cette information-sensation, concernant la relation au temps, mérite un échange entre les consultants et le client. La question qui se pose est donc :

« Comment attirer- sans jugement – l’attention de ce chef d’entreprise sur la nécessité de reconsidérer sa relation au temps ? »

Comment vous y prendriez-vous ?

N’hésitez pas à nous donner votre avis via le post d’un commentaire dans la zone prévue à cet effet à la suite de l’article . Racontez-nous également vos propres expériences analogues.

Par Dino Ragazzo

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