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Internet décentralisé : retour au Web 1.0 !

Posté le 10 octobre 2018
par Philippe RICHARD
dans Entreprises et marchés

Désinformation, surveillance étatique, fuites de données... Le web actuel souffre de différents maux. Avec des réseaux décentralisés, les utilisateurs garderaient le contrôle de leurs données, interagiraient et échangeraient des messages directement entre eux sans passer par des services centralisés. L’idée d’un dWeb est-elle utopique ou réalisable ?

Fin septembre, Facebook annonçait avoir été victime d’une fuite de données impactant des dizaines de millions de comptes. Cet été, Google a décidé de coopérer à nouveau avec les autorités chinoises pour lancer une version censurée de son moteur de recherche.

Ironie de l’histoire, cette décision du géant du web est intervenue au moment où 800 webmasters et autres experts (dont Tim Berners-Lee, qui a créé le World Wide Web) se réunissaient à San Francisco pour discuter de projets visant à contourner la mainmise de Google et Facebook. Parmi ces projets se trouve le Web décentralisé, ou dWeb.

Lorsque le World Wide Web a vu le jour à la fin des années 80, les rares utilisateurs se connectaient directement entre eux. Mais avec l’avènement du Web 2.0, au début des années 2000, les internautes ont été de plus en plus nombreux à communiquer et à partager des informations par le biais de services centralisés développés par Google, Facebook, Microsoft et Amazon.

Le dWeb consiste à redécentraliser afin de ne plus dépendre de ces intermédiaires pour se connecter. Une utopie pour quelques geeks ? Impliquée dans ce projet, la fondation Mozilla a publié une série de billets un peu techniques sur son blog. Ils présentent des applications concrètes de ce web décentralisé.

Les données appartiennent aux internautes

On peut y découvrir plusieurs solutions émergentes comme Scuttlebutt (réseau social décentralisé qui repose sur un protocole chiffré et du P2P), WebTorrent (lecteur de torrent qui fonctionne dans le navigateur) ou encore IPFS (protocole qui pourrait remplacer le protocole HTTP). Mais les réseaux décentralisés les plus connus restent ceux utilisés pour les cryptomonnaies comme Ripple, NEM (New Economy Movement) et bien sûr Bitcoin. De nouvelles applications sont apparues, comme Stealthy (un système de messagerie instantanée décentralisée), OpenBazaar (une place de marché décentralisée), GraphiteDocs (une alternative à Google Doc) et Textile (une alternative à Instagram).

« Nous devons le faire maintenant », affirme Tim Berners-Lee dans un article publié le 29 septembre. Il explique qu’il prend un congé sabbatique du MIT pour travailler à plein temps sur Inrupt. L’entreprise sera la première grande entreprise commerciale construite à partir de Solid, une plate-forme Web décentralisée que lui et d’autres employés du MIT ont passé des années à construire.

Sur son blog, il explique : « dans l’écosystème Solid, vous décidez où vous stockez vos données. Les photos que vous prenez, les commentaires que vous écrivez, les contacts de votre carnet d’adresses, les événements du calendrier, le nombre de kilomètres que vous parcourez chaque jour à partir de votre tracker de fitness… sont tous stockés dans votre Solid POD. Ce Solid POD peut être installé chez vous ou sur votre lieu de travail, ou encore avec un fournisseur Solid POD en ligne de votre choix. Étant donné que vous possédez vos données, vous êtes libre de les déplacer à tout moment, sans interruption de service. »

Mais différents défis restent à relever et, en particulier, celui de la gouvernance. Comment le web décentralisé se met-il en place alors que personne n’est en charge ? Il faudra surtout ne pas sous-estimer la force du statu quo et de la désinformation orchestrée par les géants du web…

Par Philippe Richard


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