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Ghislaine Chartron, une carrière au service de l’information

Posté le 13 mars 2017
par Maud BUISINE
dans Informatique et Numérique

Professeure titulaire de la chaire d'ingénierie documentaire au CNAM et directrice de l'INTD, Ghislaine Chartron a reçu en janvier dernier les insignes de chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur. Entre Internet, big data et deep learning, elle revient sur les évolutions majeures qui ont marqué sa carrière de professionnelle de l’information.

Quel regard portez-vous sur votre parcours ?

Mon parcours a commencé comme ingénieure au centre de documentation du CNRS, et j’ai aujourd’hui la responsabilité de la chaire d’Ingénierie documentaire au Cnam de Paris. Je pense avoir contribué à l’accompagnement et à la reconnaissance des compétences et des métiers attachés à la gestion et au management de l’information dans les organisations. Depuis le début des années 1980, le domaine n’a pas cessé d’évoluer, de se reformuler tant par les besoins exprimés, les technologies mobilisées, les services développés. L’innovation est adossée à l’ingénierie des documents, de l’information et de la gestion des connaissances depuis plusieurs décennies. La richesse des échanges et des coopérations entre entreprises et acteurs académiques est une caractéristique majeure qui a nourri mes projets tout au long de ce parcours.

Quelles sont les évolutions les plus marquantes de ces dernières années ?

Une évolution majeure concerne, de façon évidente, l’accélération des mutations technologiques qui ont affecté les modes de production, de diffusion, de circulation de l’information. Ces mutations ont induit des évolutions profondes dans les pratiques, les modes de travail. La fonction documentaire s’est de plus en plus fondue dans le système d’information général des organisations ; de nouvelles problématiques d’interopérabilité, d’échanges, d’intégration de sources hétérogènes sont devenues très importantes. Les nouvelles architectures (portails, cloud, API…) ont impacté les services et les usages. Différents paradigmes ont transformé la production, la diffusion et le partage : le web social, le web sémantique, le web des données. Concernant les acteurs, le W3C et les Gafa ont endossé un rôle déterminant en termes d’émergence de nouveaux standards, d’innovations de services. Une autre transformation concerne l’économie des contenus : la valeur s’est déplacée du côté des technologies, et la propension à payer des contenus est devenue de plus en plus faible. Ceci impacte bien entendu les acteurs dont le métier était de produire des contenus labellisés : les éditeurs, la presse, tous les acteurs des « industries culturelles ». De nouveaux modèles économiques doivent être trouvés ; l’équation n’est pas simple, et les tensions entre acteurs des contenus et acteurs des contenants ont marqué ces dernières années, dans des rapports de force assez déséquilibrés. Le comportement des usagers a, par ailleurs, évolué : continuité d’accès, expérience utilisateur, fluidité des services quel que soit le contexte d’usage. Enfin, la sacralisation du terme « données » englobant aujourd’hui tout type de contenu traduit les enjeux désormais prioritaires du traitement automatisé de ces contenus : data-mining, analytics, datavisualisation, apprentissage automatique sont à l’ordre du jour.

Quelles sont les compétences les plus recherchées chez les professionnels de l’information aujourd’hui ?

Les compétences se sont beaucoup diversifiées, l’information est devenue un enjeu transversal aux autres activités. Les fondamentaux restent cependant majeurs et fondent l’identité des professionnels de l’information : traitement intellectuel des documents (synthèse, indexation, analyse des besoins des usagers, recherche qualitative, conception des services), compétences doublées d’une solide culture technique qui doit être sans cesse actualisée. Les compétences liées à la GED-archivage numérique sont une priorité pour les entreprises. La valorisation en ligne de contenus locaux et du patrimoine numérique ouvre de nouvelles opportunités. Le secteur de la veille, de la surveillance des environnements, de l’intelligence stratégique s’ancre aussi profondément aux métiers de l’information. Le virage est important : le professionnel de l’information doit savoir gérer qualitativement et quantitativement des données, comprendre les statistiques et les algorithmes d’analyse, donner du sens à ces traitements automatisés pour les usagers, les métiers et les décisionnaires.

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Ghislaine Chartron

Titulaire de la chaire d’ingénierie documentaire au Cnam, conseillère éditoriale de Documents Numériques


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