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Étudier l’impact de l’ajout de biocarburants dans les carburants conventionnels

Posté le 8 novembre 2021
par Nicolas LOUIS
dans Énergie

Un projet de recherche vient de démarrer pour évaluer les conséquences de l'ajout de biocarburants dans les carburants conventionnels vis-à-vis de la stabilité à l'oxydation. Il aura aussi pour objectif d'étudier les nouveaux polluants émis lors de la combustion de ces mélanges.

Pour réduire leur impact carbone, certains secteurs du transport, comme celui de l’aviation, vont difficilement pouvoir remplacer les moteurs thermiques (alimentés par des carburants fossiles) par de l’énergie électrique. La solution envisagée est alors l’utilisation de biocarburants issus de la biomasse. Or, ces carburants alternatifs sont réputés comme moins stables dans le temps. Un projet de recherche, baptisé Bioscope, vient de démarrer dans le but d’évaluer l’impact de l’ajout de biocarburants dans les carburants conventionnels.

Le premier objectif sera d’évaluer le degré d’oxydation des biocarburants au cours de leur vieillissement. Actuellement, la littérature scientifique s’est principalement attachée à observer ce phénomène sur les carburants conventionnels. Face à ce problème, les compagnies pétrolières ont pris l’habitude de rajouter des additifs à l’intérieur pour améliorer la stabilité à l’oxydation. Et lors de leur commercialisation, ces carburants sont garantis avec un temps d’utilisation limité d’environ 12 mois.

« Les biocarburants sont réputés comme ayant une résistance au vieillissement moins importante que les carburants conventionnels, explique Baptiste Sirjean, chargé de recherche CNRS au sein du LRGP (Laboratoire réactions et génie des procédés) et lauréat d’une bourse ERC (European Research Council) pour mener à bien le projet Bioscope. Lors d’un précédent travail de recherche, j’ai découvert qu’une famille de biocarburants améliorait la résistance des carburants conventionnels sur le plan de l’oxydation. Il s’agit de biocarburants de type alcools provenant de la fermentation de sucres issus par exemple du blé ou de la canne à sucre, pour ceux dits de première génération, ou de la biomasse non comestible comme le bois pour ceux de deuxième génération. C’est un résultat très surprenant, mais qui sera à confirmer au cours de ce nouveau projet de recherche. »

L’étude de l’oxydation des carburants est d’autant plus importante que ce phénomène peut provoquer d’importants problèmes dans les systèmes motorisés. Lorsque ce processus va jusqu’à son terme, il conduit en effet à la formation de dépôts ou de gommes qui vont alors encrasser les filtres, les pompes et jusqu’aux injecteurs des moteurs. Dans l’aviation, cette problématique peut entraîner de graves risques pour la sécurité des appareils. Dans ce secteur, les carburants sont en plus confrontés à une accélération du processus d’oxydation, car ils servent également à refroidir le moteur des avions, à l’image d’un liquide de refroidissement. Les carburants ont pour fonction de capter l’énergie dégagée par le moteur, et par conséquent se réchauffent jusqu’à environ 150 degrés. Autant à température ambiante, l’oxydation des carburants est un phénomène relativement lent, autant leur réchauffement va provoquer une accélération de ce processus. Actuellement, l’industrie aéronautique maîtrise bien cette problématique, car les carburants conventionnels utilisés sont des produits ultra-normés.

Retirer l’oxygène des biocarburants pour les utiliser dans l’aviation

« Lorsqu’on rajoute des biocarburants dans des carburants conventionnels, on ne sait plus très bien comment ce mélange évolue, poursuit le chercheur. Alors, avant d’en ajouter, le secteur de l’aviation procède à leur traitement pour retirer l’oxygène présent à l’intérieur afin qu’ils ressemblent à des carburants d’origine fossile d’un point de vue chimique. Bien sûr, ce traitement entraîne un surcoût sur le plan économique et n’est pas neutre non plus sur le plan des émissions de carbone. La biomasse est en effet traitée deux fois, la première lors de sa transformation en carburant et la seconde pour lui retirer son oxygène. Ces carburants sont appelés SAF pour Sustainable Aviation Fuel et sont actuellement ajoutés en toute petite quantité dans les carburants conventionnels. »

Le deuxième objectif du projet Bioscope va consister à étudier les différents polluants émis par les biocarburants lors de leur combustion. Tout comme l’oxydation, ces rejets vont dépendre de la famille à laquelle appartient le biocarburant. Il en existe principalement trois : les esters méthyliques d’acide gras (EMAG) obtenus à partir d’huiles végétales, les biocarburants de type alcools issus de la fermentation et enfin ceux de type éthers issus de la biomasse lignocellulosique. « En règle générale, l’ajout de biocarburants provoque une diminution des émissions de suie, mais peut entraîner l’apparition de nouveaux types de polluants comme de petits composés oxygénés, par exemple des aldéhydes, ajoute Baptiste Sirjean. Ceci s’explique par la présence d’oxygène dans ces carburants alternatifs, alors que les carburants conventionnels n’en contiennent pas. Même produits en faible quantité, ces composés oxygénés peuvent avoir un impact sur l’environnement. »


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