En chiffres

Fort rebond attendu des émissions de CO2 en 2021, selon l’AIE

Posté le 29 avril 2021
par Joël Spaes
dans Environnement

Le nouveau rapport de l'Agence internationale de l’énergie (AIE) publié le 20 avril confirme les mises en garde de l’agence de l’OCDE, en novembre dernier. Les émissions mondiales de dioxyde de carbone (CO2) liées à l'énergie devraient augmenter de 1,5 milliard de tonnes en 2021, soit la deuxième hausse la plus importante de l'histoire. Autant dire que le rebond post-pandémie de Covid-19 devrait annihiler la forte baisse des émissions de CO2 dues à l’énergie enregistrée en 2020.

Le rapport Global Energy Review 2021 de l’AIE estime que les émissions de CO2 augmenteront de près de 5 % cette année pour atteindre 33 milliards de tonnes, sur la base des dernières données nationales recueillies par l’AIE ainsi que d’une analyse en temps réel des tendances de la croissance économique et des nouveaux projets énergétiques qui devraient être mis en service.

La reprise économique, notamment en Asie, entraîne un rebond de la demande en charbon, 4,5 %, qui devrait ainsi dépasser son niveau de 2019, voire se rapprocher de son maximum historique de 2014. Et le secteur de l’électricité, via les centrales thermiques, devrait représenter les trois quarts de cette augmentation. L’AIE indique dans son rapport que ce pourrait ainsi être la plus forte hausse annuelle des émissions sur 10 ans, plus que la reprise enregistrée après la crise financière mondiale de 2008, qui avait entraîné une forte intensité de carbone.

Sous l’impulsion des marchés émergents et des économies en développement, la demande mondiale d’énergie devrait augmenter de 4,6 % en 2021, l’amenant au-dessus de son niveau de 2019, après le net recul de 2020 (-4 %). Cette augmentation inverserait 80 % de la baisse enregistrée en 2020, et les émissions ne seraient plus que de 1,2 % (ou 400 Mt) inférieures aux niveaux de 2019.

Corollaire, la consommation de tous les combustibles fossiles est en passe de croître de manière significative en 2021, le charbon et le gaz devant dépasser leurs niveaux de 2019. Le pétrole connaît également un fort rebond mais devrait rester en dessous de son pic de 2019, le secteur de l’aviation restant sous pression, insiste l’agence de l’OCDE.

L’augmentation prévue du recours au charbon pour la production d’électricité éclipse même celle des énergies renouvelables (ENR) de près de 60 %, malgré la forte accélération de la demande de ces dernières.

Beaucoup d’ENR mais pas assez

L’AIE se félicite pourtant que les ENR assurent 30 % de la production d’électricité dans le monde en 2021, soit leur plus grande part du mix électrique depuis le début de la révolution industrielle, contre moins de 27 % en 2019. La production d’électricité à partir de sources renouvelables, solaire et éolien en tête, devrait faire un bond de plus de 8% en 2021, soit plus de la moitié de l’augmentation de l’offre globale d’électricité dans le monde. La plus grande contribution à cette croissance provient du solaire et de l’éolien, qui sont en passe de connaître la plus forte hausse annuelle de leur histoire. La production d’électricité à partir du solaire photovoltaïque devrait augmenter de 145 térawattheures, soit une hausse de près de 18 % par rapport à 2020. De son côté, la production éolienne d’électricité devrait augmenter de 275 TWh, soit environ 17 % de plus par rapport à l’année dernière. La production combinée du solaire et de l’éolien est en passe d’atteindre plus de 2 800 TWh en 2021, précise l’AIE. La Chine devrait représenter près de la moitié de l’augmentation mondiale de la production d’électricité à partir de sources renouvelables, suivie par les États-Unis, l’Union européenne et l’Inde.

Fossiles, le retour

Plus de 80 % de la croissance prévue de la demande de charbon en 2021 devrait également provenir d’Asie, avec la Chine en tête, qui représentera 50 % de la progression de la demande. Le recours au charbon aux États-Unis et dans l’Union européenne devrait également augmenter, mais restera bien inférieur aux niveaux d’avant la crise.

En 2020, la demande de charbon a diminué de 220 millions de tonnes équivalent charbon (Mtce), soit 4 %. Les plus fortes baisses pour la production d’électricité ont été enregistrées dans les économies avancées, avec une diminution de 15 %, ce qui représente plus de la moitié du déclin mondial du charbon. Mais ce dernier a été particulièrement mis à mal dans le mix électrique par la baisse de la demande d’électricité, l’augmentation de la production des énergies renouvelables et la faiblesse des prix du gaz.

Parmi les combustibles fossiles, le gaz naturel est en passe de connaître la plus forte hausse par rapport aux niveaux de 2019. La demande de gaz naturel devrait croître de 3,2 % en 2021, grâce à l’augmentation de la demande en Asie, au Moyen-Orient et dans la Fédération de Russie. La demande mondiale devrait ainsi dépasser de plus de 1 % les niveaux de 2019.

Le secteur de l’électricité n’a contribué qu’à 50 % de la baisse des émissions liées au charbon en 2020. Mais le retour rapide de la production d’électricité à partir du charbon en Asie signifie que le secteur de l’électricité devrait représenter quasiment 80 % du rebond des rejets de CO2 en 2021.

« Il s’agit là d’un avertissement alarmant : la reprise économique après la crise du Covid est actuellement tout sauf durable pour notre climat », a insisté Fatih Birol, directeur exécutif de l’AIE, lors de la présentation le 20 avril dernier. « Si les gouvernements du monde entier n’agissent pas rapidement pour commencer à réduire les émissions, nous risquons d’être confrontés à une situation encore pire en 2022 », insiste le responsable de l’agence de l’OCDE chargée de l’énergie.


Pour aller plus loin