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Le secteur du recyclage en pleine mutation

Posté le 8 novembre 2019
par Matthieu Combe
dans Environnement

La Fédération des entreprises du recyclage (Federec) a dressé le bilan du marché du recyclage en France en 2018. Malgré une hausse des volumes collectés, des emplois et des investissements, le chiffre d’affaires recule légèrement. Quelques filières sont en difficulté et de nombreux défis sont à relever.

La collecte des déchets en vue de leur recyclage a atteint 107 millions de tonnes fin 2018. C’est une hausse de 2 % par rapport à 2017, notamment grâce à une activité du bâtiment en croissance. Le nombre d’emplois continue sa progression pour atteindre 28 810 emplois, en hausse de 1,6 % par rapport à 2017. Ces évolutions positives ne parviennent cependant à entraîner une hausse du chiffre d’affaires. Il diminue de 0,8 % pour s’établir à 9,04 milliards euros fin 2018.

Des évolutions contrastées suivant les filières

« Nous avons traité plus de matières, mais nous les avons revendues moins cher, analyse Jean-Philippe Carpentier, président de Federec. Nous nous attendons malheureusement à une évolution similaire en 2019 ». A l’exception des papiers-cartons et des métaux non ferreux, la collecte augmente dans toutes les filières. Malgré cette hausse, les seules branches qui connaissent un accroissement de leur chiffre d’affaires sont les déchets du bâtiment, les déchets organiques et les solvants. Le secteur des papiers-cartons est particulièrement touché, avec une chute de chiffre d’affaires de 26 %. Le secteur des plastiques continue à souffrir de la fin des exportations asiatiques.

Le recyclage a tout de même permis d’éviter la consommation de 113 térawattheures d’électricité et l’émission de 21 millions de tonnes de CO2 en 2018. Cela représente l’équivalent de 100% des émissions annuelles du transport aérien et la consommation électrique de 16 réacteurs nucléaires.

Des investissements en hausse malgré des difficultés

Les entreprises du recyclage continuent d’investir pour entraîner la mutation du secteur. Après une hausse de 12% en 2017, l’investissement continue sa progression pour atteindre 568 millions d’euros. Soit une nouvelle hausse de 9%. Les investissements se concentrent en priorité sur les machines de tri (44%) et le matériel de collecte (27%). Le reste sert à moderniser les bâtiments (12%), à la numérisation (15%) et autres investissements liés à la production (2%).

Les entreprises du secteur ont de plus en plus de mal à valoriser les matières recyclées sur les marchés nationaux et internationaux. Ceci est particulièrement vrai pour la filière papiers-cartons et pour les plastiques de basse qualité. Certaines entreprises en difficulté sont rachetées, la concentration du secteur se poursuit, avec un univers du recyclage estimé à 2 000 établissements et 1000 entreprises en 2018. C’est 100 entreprises de moins et 50 établissements de moins dédiés au recyclage qu’en 2017.

De nouveaux défis en 2019 pour pérenniser les filières

Les choses ne s’arrangent pas en 2019. Seulement 50 % des entreprises interrogées par Federec pensent que l’année sera positive pour le secteur. Et seuls 15 % d’entre elles s’attendent à un accroissement du chiffre d’affaires pour l’année.

Les entreprises sont confrontées à un nouveau problème : l’enfouissement de leurs déchets ultimes. « Quand on fait du tri, quel que soit le matériau, on a des résidus que l’on peut qualifier d’ultimes : on ne peut plus les valoriser car ils sont trop petits, trop mélangés, trop imbriqués, explique Jean-Philippe Carpentier. On aimerait les valoriser énergétiquement par l’incinération ou par les combustibles solides de récupération (CSR), mais en absence de capacités disponibles, la profession se tourne vers l’enfouissement.»

Petit problème pour les recycleurs : la loi de transition énergétique pour la croissance verte prévoit une réduction de stockage des déchets inertes de 50% d’ici 2025. Dans certaines régions, les capacités disponibles sont saturées par les contrats de long-terme avec les collectivités locales.  « Certains acteurs ont dû arrêter leur activité car ils ne pouvaient plus éliminer les déchets ultimes, s’indigne Jean-Philippe Carpentier. Cette crise qui a commencé fin 2018 se retrouve pleinement en 2019 et s’accentue. »

Pour Federec, la voie à suivre pour ne pas « tuer le secteur du recyclage en France » est de favoriser l’utilisation des combustibles solides de récupération (CSR) en France. La technologie peine toujours à se développer. Malgré une capacité de production d’environ 900 000 tonnes, seulement 274 000 tonnes ont été consommées en 2018, en baisse de 6%.


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