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Pour une surveillance pérenne des pesticides dans l’air

Posté le 15 juillet 2020
par Matthieu Combe
dans Chimie et Biotech

L’Anses, l’Ineris et Atmo France ont récemment publié les premiers résultats concernant leur campagne nationale exploratoire de présence des pesticides dans l’air. Les Associations agréées de surveillance de la qualité de l’air (AASQA) fédérées au sein d’Atmo France en appellent à une surveillance pérenne assortie de valeurs de gestion.

Il n’existe pas de réglementation encadrant la présence des pesticides dans l’air. Seules les AASQA fédérées au sein d’Atmo France mesurent depuis 2002 les concentrations de ces substances sur l’ensemble du territoire. En attendant la surveillance généralisée des pesticides dans l’air, celles-ci ont d’ailleurs récemment ouvert au public PhytAmo, leur base de données de mesure des pesticides dans l’air. Entre 2002 et 2015, pas moins de 321 matières actives ont été recherchées, à travers 6 837 prélèvements, effectués sur 176 sites.

Une nouvelle campagne nationale menée par l’Anses, l’Ineris et Atmo France entre juin 2018 et 2019, a permis de mesurer la présence de 75 pesticides dans l’air ambiant à l’échelle nationale. Au total, la campagne a permis de collecter 100 000 données, d’analyser 1 800 échantillons sur 50 sites. Bonne nouvelle : cette campagne identifie de faibles indices du risque sanitaire. Elle cible tout de même 32 substances nécessitant un examen approfondi pour évaluer la nécessité de leur intégration dans la surveillance nationale des pesticides dans l’air. Parmi ces substances, le lindane fait tâche. Son interdiction sur le territoire date de 1998. Pourtant, la campagne de mesures le quantifie dans « près de 80 % des échantillons analysés », s’inquiète l’Anses. L’évaluation de ce pesticide devient une priorité de l’agence pour identifier les motifs de persistance.

De la mesure volontaire à la mesure réglementaire

Sur la base de ce diagnostic partagé, Atmo France et les AASQA rappellent la nécessité d’instaurer une surveillance nationale réglementaire adossée à des valeurs de gestion. « L’élaboration de ces dernières est incontournable afin de répondre aux questionnements et problématiques locales des territoires », prévient Atmo France. Les AASQA réaffirment le besoin de multiplier le nombre des sites de mesures pérennes afin de produire une information locale, fiable et représentative. En plus, elles appellent à prendre en compte la mesure des pesticides dans l’air ambiant comme indicateur de suivi dans les dispositifs actuels de réduction de l’usage des pesticides. Pour l’instant, le principal indicateur lié au plan Ecophyto pour mesurer cette évolution reste le Nodu, le nombre de traitements « moyens » appliqués annuellement sur l’ensemble des cultures, à l’échelle nationale.

Les AASQA invitent par ailleurs à mettre en place une plate-forme nationale d’enregistrement des pesticides. Elle permettrait de centraliser les achats de pesticides et leur utilisation recommandée par le rapport parlementaire de la mission d’information commune sur le suivi de la stratégie de sortie du glyphosate de novembre 2019. Enfin, les associations invitent à prendre en compte le suivi des pesticides dans l’air dans les politiques de santé environnementale.

L’Anses formulera dans les prochains mois une proposition de surveillance nationale pérenne des pesticides dans l’air. Il s’agira de réaliser des analyses plus fines des situations locales ou de proximité qui n’ont pas été abordées dans cette première étape. L’étude approfondira les complémentarités avec les autres dispositifs de surveillance et les comparera aux recommandations déjà formulées par l’agence. Enfin, elle s’attachera à évaluer les impacts environnementaux de la présence des pesticides dans l’air.


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