Stellantis et CATL[1] ont conclu un accord en décembre 2024 pour investir jusqu’à 4,1 milliards d’euros dans la création d’une coentreprise en vue de la construction d’une usine européenne de batteries. Située sur le site de Stellantis à Saragosse, l’usine profitera d’un emplacement stratégique en Espagne, deuxième producteur automobile européen après l’Allemagne.
Expansion de la Chine
Cet accord illustre la volonté européenne de déployer une production locale de batteries et de véhicules électriques. Cette ambition a pris la forme d’une alliance européenne des batteries (EBA) lancée par l’UE en 2017. Elle vise à doter le continent d’une capacité indépendante de production de batteries et de technologies de recyclage.
La batterie représente actuellement plus du tiers du coût du véhicule. La fabrication locale offre des avantages en matière de coûts de production, notamment en permettant de supprimer les coûts liés au transport international de composants et d’optimiser la chaîne d’approvisionnement.
Néanmoins, l’association Stellantis-CATL révèle l’échec des efforts des Européens pour développer seuls cette technologie. La dépendance vis-à-vis de la Chine et en particulier de CATL, le plus grand producteur mondial de batteries au lithium, soulève des interrogations. Le point le plus problématique est l’envoi par la Chine de sa propre main-d’œuvre sur le continent européen. En effet, comme l’explique le Financial Times, CATL prévoit de faire venir 2 000 employés qualifiés en Espagne. Est-ce une manière de maintenir sa domination en protégeant la propriété industrielle ?
En outre, la future usine de Saragosse sera la troisième de CATL en Europe puisque la société chinoise est déjà présente grâce à ses deux usines de productions de batteries en Allemagne et en Hongrie.
Un autre acteur majeur chinois souhaite s’affirmer sur le continent : il s’agit du constructeur BYD. En septembre dernier, celui-ci affirmait son intention d’implanter une unité de production de batteries sur le sol européen.
Une souveraineté industrielle européenne en peine
La faillite du suédois Northvolt a freiné la montée en puissance des usines de batteries européennes. Ayant fait le choix de la technologie NMC (Nickel, manganèse, cobalt) pour ses batteries, le groupe n’a pas su prévoir la demande des fabricants automobiles pour les batteries lithium-fer-phosphate (LFP).
Une erreur que n’a pas reproduite Stellantis. Pour contrer le coût élevé des véhicules électriques, le groupe a misé sur les batteries LFP aux prix plus abordables.
Le fait que le groupe Stellantis – pourtant coactionnaire du fabricant européen de batteries ACC[2] – ait préféré se tourner vers CATL est révélateur des faiblesses de la filière européenne . Ce partenariat a débuté en novembre 2023 quand le tandem a signé l’accord stratégique pour l’approvisionnement local en LFP destiné à la production de voitures électriques en Europe.
ACC rencontre, de son côté, des difficultés : il a interrompu les projets de gigafactories en Italie et en Allemagne en juin 2024 pour modifier sa stratégie et miser sur la technologie de batteries LFP. Quant à sa première gigafactory en France (des batteries NMC), située dans le Pas-de-Calais, la cadence de production stagne. Le fabricant a finalement dû se résoudre à faire appel à un producteur chinois de batteries pour aider à la montée en puissance de sa ligne de production.
Preuve s’il en est qu’en matière de batteries, la Chine a une longueur d’avance sur l’Europe grâce à une expertise acquise de longue date.
[1] Contemporary Amperex Technology Co., Limited
[2] Automotive Cells Company. Coentreprise réunissant Stellantis, Mercedes-Benz et TotalEnergies via sa filiale Saft.
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