Après trois années de turbulences, le bio respire à nouveau. Au premier semestre 2025, l’Agence Bio, dans son évaluation de la consommation alimentaire biologique, observe un rebond inattendu des ventes. Premier signe encourageant : la grande distribution semble sortir de sa longue traversée du désert puisque les ventes de produits porteurs d’un code-barres progressent de 0,1 %, une hausse minime mais symbolique après quatre années de repli. L’essentiel de la dynamique provient des produits vendus sans code-barres (fruits et légumes en tête), qui affichent une croissance de plus de 6 %. Résultat : la consommation bio en GMS (Grandes et moyennes surfaces) affiche +1,4 % en valeur sur le semestre.
La reprise est encore plus nette dans les magasins spécialisés et les épiceries bio, qui enregistrent une croissance de 6,2 %. Ces enseignes, fragilisées par les fermetures de 2022 et 2023, semblent avoir trouvé un nouveau souffle grâce à une politique de prix plus serrée et à un recentrage sur les produits essentiels, comme les fruits et légumes, plébiscités par les consommateurs réguliers. Quant à la vente directe, elle confirme son statut de moteur structurel du marché avec +8,8 % sur le semestre. Cette croissance illustre l’attachement des Français aux circuits de proximité et à la transparence sur l’origine des produits.
Plusieurs facteurs conjoncturels ont nourri ce renouveau. La modération de l’inflation alimentaire, nettement moins forte qu’en 2024, a permis à une partie des ménages de réorienter une fraction de leur budget vers des achats bio. À cela s’ajoute une sensibilité accrue aux questions de santé et d’environnement, qui continue de tirer la demande vers des aliments moins transformés et plus vertueux. Les conditions météorologiques ont également pesé, notamment la canicule de juin 2025, qui a stimulé la consommation de boissons fraîches, de glaces et de surgelés, dont les références bio progressent régulièrement.
Cette reprise de la consommation a été facilitée par une amélioration de la production dans certaines filières, telles que les fruits, les légumes, et les productions avicoles, qui montrent des signes de redressement après plusieurs campagnes compliquées. Mais si l’amont se stabilise, il reste encore très contrasté. L’élevage bovin bio demeure sous forte tension, avec une part importante des animaux écoulés en conventionnel faute de débouchés. Les cultures de maïs et de tournesol ont, elles aussi, été fragilisées par les aléas climatiques, rappelant la vulnérabilité structurelle de ces productions.
Environ 10 % des surfaces agricoles sont exploitées en bio
Dans ce contexte, la question du renouvellement agricole prend une importance particulière. Selon l’Agence Bio, l’agriculture biologique représente désormais environ 10 % des terres agricoles françaises, mais ces surfaces ont de nouveau reculé en 2024 pour la deuxième année consécutive. Paradoxalement, le nombre de producteurs continue d’augmenter, avec un solde net positif de 1 %, ce qui témoigne d’un attrait réel pour l’agriculture biologique.
Malgré l’embellie, les acteurs de la filière restent prudents. Les prix, bien que plus stables, demeurent un frein important pour les ménages les plus modestes. À cela s’ajoute la concurrence croissante de produits conventionnels premium, qui s’approprient une partie des arguments traditionnellement associés au bio, comme la naturalité, le local ou encore la traçabilité, à des prix plus abordables. La question de l’accessibilité financière apparaît désormais comme un enjeu central pour assurer la continuité de la croissance.
Les perspectives pour les mois à venir restent encourageantes, mais marquées par des tensions géopolitiques, la volatilité des matières premières et un climat économique incertain. Beaucoup d’acteurs du secteur alertent sur un manque de lisibilité des politiques publiques, alors que des aides supplémentaires pourraient consolider la filière à un moment charnière. La FNAB (Fédération nationale d’agriculture biologique) dénonce la forte baisse des aides environnementales octroyées aux producteurs bios avec la nouvelle PAC. Le marché bio reprend des couleurs, mais il reste de nombreux défis à surmonter.
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