Les fondamentaux

Matériaux biosourcés pour le bâtiment et stockage temporaire de carbone

Posté le 25 mars 2020
par La rédaction
dans Chimie et Biotech

Le réchauffement climatique est un phénomène devenu incontestable, grâce aux mesures précises de températures réalisées à la surface du globe et aux nombreuses études scientifiques, notamment rassemblées par les experts du GIEC depuis 1988. Le secteur du BTP évolue et innove en conséquence.

Extraits choisis de l’article Matériaux bio-sourcés pour le bâtiment et stockage temporaire de carbone de Thibault Lecompte.

Les matériaux du bâtiment sont souvent vus comme des « émetteurs de GES », à l’image des matériaux cimentaires et des produits de la sidérurgie. Pour ces secteurs, l’effort écologique consiste à limiter la production de GES liée à leurs produits : optimisation des procédés, filières de combustibles alternatifs, utilisation d’énergies renouvelables, économie circulaire, filières de matières premières à faible impact environnemental.

Les matériaux biosourcés, au contraire, captent du CO2 au cours de leur croissance via la photosynthèse. L’usage de ces matériaux pour la construction pourrait compenser les émissions des autres matériaux à l’échelle d’un bâtiment, voire permettre de considérer les bâtiments comme des puits de carbone. La condition pour cela est que leur gisement soit géré de manière durable, notamment dans le cas du bois d’œuvre ou des matériaux d’isolation issus de bois d’arbre : en termes de bilan carbone, une forêt exploitée est dite durable si la biomasse extraite durant une année est compensée par la biomasse créée durant cette même année. Ceci nécessite de prendre en compte plusieurs facteurs tel que la croissance d’un arbre et donc la période de révolution au sein d’une exploitation forestière qui dure entre quelques dizaines d’années (minimum 20 ans pour certains résineux) et quelques centaines d’années (jusqu’à 300 ans pour certains feuillus). Cependant, la période de croissance d’un arbre doit être mise en vis-à-vis de la durée de vie du bâtiment. Compte tenu de cette problématique, les matériaux agro-sourcés, qui sont des plantes annuelles, pourraient être considérés comme de meilleurs candidats pour répondre à la demande croissante de matériaux de construction tout en stockant temporairement du carbone. Les principaux matériaux issus de plantes annuelles actuellement utilisés en Europe comme matériaux d’isolation sont les fibres de chanvre et de lin, la chènevotte de chanvre et la paille de blé. Mais d’autres sont actuellement étudiés, parmi lesquels les anas de lin, la moelle et l’écorce de tournesol, le miscanthus, la balle de riz ou le roseau phragmite. Le bois d’arbre quant à lui se destine principalement à quatre types de produits : le bois de structure (poteaux, poutres et ossatures), les revêtements de sols et de parois (parquets, lambris, bardages), les panneaux de particules (sols, contreventements) et la laine de bois (isolation).

L’ensemble de ces produits biosourcés pourrait représenter à moyen terme un volume conséquent de stockage de carbone. Mais ce potentiel de stockage doit être calculé et validé scientifiquement, en réalisant une analyse de cycle de vie complète et en répondant à plusieurs questions importantes.

Quels sont les principaux gaz à effet de serre liés aux matériaux biosourcés, quel est leur effet sur le réchauffement climatique et comment est-il calculé et pris en compte actuellement ?

Les principaux gaz à effet de serre émis dans le milieu de la construction dépendent du type de matériau et des procédés utilisés. Le Tableau 1 reprend les données de Berje et du GIEC, et propose un inventaire des principaux gaz à effet de serre émis dans le cycle de vie des matériaux du BTP.

Quelle est la contribution potentielle des matériaux de construction biosourcés à la réduction des gaz à effet de serre dans l’atmosphère ?

Un changement de pratique aura donc un effet immédiat et à long terme. Cet effet sera d’autant plus bénéfique si certaines conditions sont respectées :

– Une gestion réellement durable des forêts, respectant des temps de révolution raisonnables et en accord avec la cinétique naturelle de croissance des arbres. Cette gestion durable doit aussi éviter les intrants d’origine fossile et optimiser l’usage de carburant et les transports. De fait, les pratiques sylvicoles doivent tendre vers une approche « écosystème » (biodiversité, mélange des essences et des âges) plutôt qu’une approche « produit » (plantations de monoculture, arbres du même âge, coupes claires) afin d’optimiser le stock de carbone dans les forêts.

– Dans le but de limiter les quantités de bois utilisées, les structures doivent être optimisées (utilisation de poutres en I, poutres treillis, travail sur les coefficients de sécurité des calculs de structure).

– Certains débouchés de la foresterie, comme le bois énergie ou l’électricité biomasse, devront aussi décroître en volume. L’isolation améliorée des bâtiments, et les règlementations sur l’usage domestique du bois-énergie devraient aller dans ce sens.

– Le développement de l’agroforesterie pourrait être un moyen d’augmenter le stock de carbone dans les sols et d’approvisionner les filières locales de bois de structure.

– limiter les intrants synthétiques et les labours profonds pour les agro-ressources ;

– privilégier les filières locales pour limiter les transports et maîtriser les ressources ;

– privilégier les liants minéraux qui carbonatent au cours de la vie en œuvre (chaux aériennes) ou utiliser si possible des liants à base de terre ;

– d’une manière générale, les matériaux en vrac (paille, chènevotte, ouate de cellulose) sont à préférer aux matériaux sous forme de plaques ou de rouleaux, souvent liés par des fibres synthétiques.

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Matériaux bio-sourcés pour le bâtiment et stockage temporaire de carbone , un article de Thibaut LECOMPTE


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