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Satellites : bientôt une coentreprise Airbus-Thales-Leonardo ?

Posté le 19 septembre 2025
par Aliye Karasu
dans Entreprises et marchés

Les trois spécialistes de l'aérospatial européen sont prêts à fusionner leurs activités satellites. Un accord pourrait même être conclu avant la fin de l'année 2025. Une union qui a pour ambition de les renforcer face à la rude concurrence américaine et chinoise.

La fusion des activités satellites d’Airbus, Leonardo et Thales, en gestation depuis 20 ans, est-elle sur le point de se concrétiser ? Quelques mois seulement après une présentation devant la Commissaire européenne à la concurrence, les trois entreprises européennes semblent bien engagées sur cette voie.

C’est ce qu’a indiqué Michael Schoellhorn, directeur général d’Airbus Defence and Space dans un entretien accordé le 14 septembre dernier au quotidien italien Corriere della Sera : « Nous sommes sur la bonne voie, mais plusieurs questions doivent encore être clarifiées avant de franchir cette étape majeure ». En effet, la fusion doit suivre un processus en deux étapes. Tout d’abord, un engagement à unir les forces respectives doit être pris (c’est l’accord-cadre). Ensuite, une nouvelle phase devrait mener à la conclusion effective de l’accord. L’étape concernant l’accord-cadre pourrait aboutir avant la fin de l’année selon le directeur général d’Airbus Defence and Space.

Une co-entreprise en construction

Engagée mi-2024, la phase de discussion portant sur la valorisation des actifs de chaque acteur devrait conduire à la finalisation de la consolidation. Les trois grands fabricants européens de satellites vont devoir réussir à s’entendre sur la valorisation de cinq entreprises. Effectivement, Thales et l’italien Leonardo sont déjà associés dans le spatial, depuis 2007, via deux filiales communes : Thales Alenia Space et Telespazio. À ces deux filiales, s’ajouteront Airbus Space Systems, Airbus Intelligence et Leonardo.

Au sein de la nouvelle entité créée, les parts détenues seront-elles équitables pour chacun des acteurs en présence ? Si oui, ce choix serait calqué sur le modèle de MBDA, le leader européen des missiles[1]. Celui-ci s’est montré très efficace en sachant trouver un équilibre entre les intérêts nationaux des trois industriels impliqués dans le projet. Il affiche aujourd’hui des records historiques de commandes.

L’union fait la force

Face à SpaceX et à la multiplication de lanceurs et de constellations en orbite basse, il est impératif de faire émerger une puissance européenne capable de faire le contrepoids. Les satellites à orbite basse faisant l’objet d’une demande croissante sur le marché, il faudra être en mesure d’en proposer à des prix plus compétitifs pour rivaliser avec Starlink, la constellation de satellites d’Elon Musk.

L’alliance des trois fabricants européens pourrait aboutir à la création d’un acteur pesant plus de 6 milliards d’euros de chiffre d’affaires, et valorisé, selon les premières estimations, à 10 milliards d’euros. De quoi être en mesure de contrebalancer les énormes investissements américains dans le domaine spatial.

Un moyen aussi de relancer leurs activités respectives en perte de vitesse dans un contexte économique difficile qui a entraîné, l’année dernière, l’annonce de suppressions d’emplois. Concernant la filiale Thalès Alenia Space, le PDG a finalement annoncé, le 2 juin dernier, le gel jusqu’à mi-2026 des 1 300 suppressions de postes prévues, dont 1 000 en France. Quant à Airbus Defence & Space, un communiqué a confirmé la suppression de 2 500 postes, dont 540 en France.

Les précédentes tentatives de rapprochement dans le spatial ont souvent été freinées par la crainte de porter préjudice aux intérêts nationaux ou au droit de la propriété industrielle. Mais cette fois-ci, l’essor spectaculaire de Starlink change la donne et amoindrit les réticences initiales.

Avant ce rassemblement, il reste néanmoins un obstacle à franchir : les règles antitrust européennes. Celles-ci visent à contrer les entreprises qui pratiqueraient des ententes illicites à l’origine de comportements anticoncurrentiels.


[1] Regroupe Airbus, le britannique BAE Systems et Leonardo


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