La situation en Ukraine et les récentes déclarations du Président Trump ont fait l’effet d’une déflagration en Europe. Si rien n’est aujourd’hui acté, les dirigeants des pays de l’Union Européenne ont exprimé le besoin impérieux de renforcer leurs armées, en considérant comme acquis le fait que les Etats-unis ne constituaient plus un allié indéfectible. De fait, l’Europe, qui a pendant des décennies mis en sourdine ses capacités de défense et compté sur le géant américain pour garantir sa sécurité, se retrouve aujourd’hui dans une situation inédite et fragile. Et devant la nécessité de se réarmer et de mettre en place une stratégie continentale pour assurer sa défense militaire, devant une potentielle menace venue de l’Est. Menace déjà prise en compte depuis trois ans et l’invasion russe en Ukraine.
S’il apparaît aujourd’hui difficile d’évaluer concrètement la menace russe, le Président Macron a dans son discours au début du mois fustigé l’agressivité du Président Poutine et assuré que la passivité face à une telle situation serait pure folie.
Dès le 11 mars, Emmanuel Macron a réuni les 30 chefs d’état-major de l’UE, plus celui du Royaume-Uni et de la Turquie, pour évoquer la situation ukrainienne, et l’avenir immédiat de la défense européenne.
En ce qui concerne la défense exclusivement française, le ministre des Armées a évoqué l’objectif d’un budget de 90 milliard d’euros par an pour la défense, alors que ce dernier pour 2025 est de l’ordre de 50,5 milliards. La loi de programmation militaire prévoit de le porter à 69 milliards à horizon 2030. Il va donc falloir trouver de l’argent.
Au niveau continental, le plan ReArm Europe, annoncé il y a quelques jours, pourrait représenter quelque 800 milliards d’euros. Concrètement, le vieux continent veut faciliter la capacité des Etats à emprunter et à mobiliser des capitaux pour investir dans les industries de défense, sans que cela ne vienne poser de problème vis-à-vis des taux d’endettement des Etats, sujet sur lequel l’UE est en général plutôt inflexible. Il ne s’agit donc pas pour l’Europe d’investir à corps perdu dans son industrie de défense, mais plutôt de pousser ses pays membres à le faire plus facilement. Il est vrai que depuis les années 2000, alors que les Etats-Unis (+65,7 %), la Russie (+292 %) et la Chine (+592 %) poursuivaient le renforcement de leurs moyens de défense en augmentant leurs dépenses, l’Europe (+19,7 %) plafonnait.
Pourtant, force est de constater que de nombreux grands groupes industriels liés à la défense sont européens, et font partie des leaders mondiaux dans leur secteur d’activité.
Au niveau français, les fleurons de la défense s’appellent Airbus Defence and Space, Ariane Group, Arquus, Dassault Aviation, MBDA, Naval Group, Nexter, Safran, Thales… Des géants industriels, qui drainent avec eux tout un écosystème comptant pas moins de 4000 PME pour près de 260 000 emplois.
Au niveau européen, d’autres leaders industriels comme BAE Systems, Leonardo ou Rolls Royce font également partie des géants de la défense.
Le plan d’investissement ne cible pas spécifiquement le domaine de la défense, et pour ainsi dire aucun projet financé à l’heure actuelle n’est directement lié à l’augmentation de la capacité de l’hexagone à assurer sa propre sécurité. Pour autant, de nombreux domaines stratégiques, comme la souveraineté numérique, l’accès aux composants stratégiques, ont trait, de près ou de loin, à l’autonomisation de la France sur le plan militaire.
Parmi les grands groupes industriels fleurons de la défense tricolore, nombre d’entre eux bénéficient de soutiens financiers pour des projets portés par France 2030.
C’est le cas de Thalès – projet DECOR, projet CarbChaser entre autres – par exemple. Reste à savoir si certains de ces projets pourraient voir leur scope modifié, pour être en mesure d’offrir une synergie entre la volonté de réindustrialisation et la nécessité d’atteindre rapidement une autonomie dans le domaine de la défense, qu’elle soit étatique ou continentale.
Cet article se trouve dans le dossier :
France 2030, une réponse au contexte économique et géopolitique actuel ?
- France 2030, l’heure des ajustements
- « Le problème se situe dans l’exécution des décisions plutôt que dans le calibrage des aides »
- France 2030 : l'hydrogène à l'heure des choix
- La réindustrialisation et le réarmement, en même temps ?
- France 2030, entre crise sanitaire et mondialisation
- France 2030 : des choix industriels pragmatiques
- France 2030, un volet décarbonation ambitieux
- L’innovation, moteur de la croissance
- Les thèses du mois : "France 2030, une réponse au contexte économique et géopolitique actuel ?"
- « La période actuelle est très importante pour l’hydrogène »
- Déploiement de la filière hydrogène : « La difficulté principale se situe sur le terrain réglementaire »
- Des incertitudes sur le développement de la filière hydrogène
- « France 2030 est un signal fort pour le projet de SMR français NUWARD »
- Nuclear Valley intervient en appui du dispositif France 2030 dans le nucléaire
- « Avoir une approche durable en fermant le cycle du combustible »
Dans l'actualité
- Les thèses du mois : « France 2030, une réponse au contexte économique et géopolitique actuel ? »
- La réindustrialisation de la France nécessite de former 5 000 soudeurs supplémentaires par an !
- L’industrie de la défense doit-elle craindre les critères ESG ?
- Réarmement français : un vœu pieux ?
- L’innovation, moteur de la croissance
- France 2030, l’heure des ajustements
- Journées Usines Ouvertes : plus de 200 sites à découvrir partout en France, les 4 et 5 avril prochains
- La France relocalise sa production de poudre à canon
- Souveraineté numérique : l’Europe a-t-elle les moyens de s’émanciper des GAFAM ?
- Le patriotisme économique : bonne idée ou pas ?
- L’industrie française de l’armement est montée en cadence en 2024
- Les critères d’accès au programme de défense européen SAFE restent à définir
- Été 2025 : que s’est-il passé dans l’industrie pendant vos vacances?
- Nomination de Sébastien Lecornu à Matignon : quels enjeux pour l’innovation, l’industrie et la recherche ?
- Satellites : bientôt une coentreprise Airbus-Thales-Leonardo ?
- Lutte anti-drones : le laboratoire technologique des conflits modernes
- Exosens s’ancre dans la dynamique du secteur défense
- Réindustrialisation : Choose France met les projecteurs sur les investissements nationaux
- La quotidienne : revue de presse du 18 novembre 2025
Dans les ressources documentaires