Il n’aura échappé à personne que la Chine est un fournisseur majeur de matériaux et de composants nécessaires à la transition énergétique mondiale : terres rares, graphite, lithium, cobalt, sans oublier la majorité des modules photovoltaïques, des turbines éoliennes et des cellules et composants de batteries[1].
Sur le long terme, la Chine a donc tout intérêt à voir la transition énergétique se réaliser. Le succès des COP à venir est ainsi un enjeu stratégique, surtout que l’administration américaine actuelle a fait le choix d’abandonner, voire de saboter l’action climatique internationale.
La Chine comble le vide laissé par les États-Unis
Le premier retrait des États-Unis de l’accord de Paris, en 2017, a clairement amorcé un changement de leadership dans l’action climatique mondiale. Alors que le Brésil et l’Inde se sont fait les champions de la justice climatique, la Chine a mis l’accent sur la production massive d’énergies renouvelables et profite désormais de la perte d’enthousiasme des économies les plus avancées pour s’afficher comme défenseur zélé du climat.
Le pays s’est d’ailleurs fait remarquer en jouant à fond sa carte de nouveau leader lors de l’Assemblée générale des Nations unies, le 22 septembre 2025. Preuve que l’action climatique revêt une importance stratégique pour la Chine, c’est le président Xi Jinping qui était intervenu en vidéo pour affirmer que « notre détermination doit être inébranlable » et que « la transition verte et bas carbone est la tendance de notre temps. »
Et le président chinois ne s’était pas privé de tacler les États-Unis au passage : « Même si certains pays vont contre ce courant, la communauté internationale doit persévérer dans la bonne direction, rester déterminée et continuer d’agir sans réduire l’effort. »
Quelques semaines avant l’ouverture de la COP30, les contours de la stratégie chinoise étaient donc clairs : faire du climat un puissant levier politique et économique.
Lors de cette COP30, la Chine n’a donc pas hésité à promouvoir ses industries de manière redoutablement efficace. Car si le pays demeure le premier émetteur de gaz à effet de serre (GES) de la planète et que ses engagements de réduction à dix ans sont insuffisants (- 7 % à – 10 % d’émissions de GES d’ici à 2035), le fait que sa production d’énergie renouvelable ait dépassé celle des énergies fossiles lui apporte, malgré tout, une certaine crédibilité.
Des relations tendues entre la Chine et l’Europe
Le retrait des États-Unis de l’accord de Paris pouvait laisser espérer un rapprochement entre l’UE et la Chine autour des questions environnementales. Malheureusement, leurs divergences d’intérêts rendent ce rapprochement impossible.
Car lorsque Ding Xuexiang, le vice-premier ministre chinois, appelle à « supprimer les barrières commerciales et garantir la libre circulation des produits verts », il vise bien entendu l’UE, qui cherche à protéger son marché intérieur et ses producteurs de batteries et de véhicules électriques.
Et sur ce point, la situation est particulièrement tendue entre l’UE et la Chine, puisque Pékin menace d’un chantage aux produits indispensables à la fabrication des batteries électriques fabriquées dans nos gigafactories. Or, ce chantage, la Chine en a les moyens, puisqu’elle domine toute la chaîne de fabrication des batteries, depuis l’extraction des matériaux jusqu’à la fabrication des cellules et cathodes.
Par conséquent, l’Europe fait donc face à un dilemme : doit-elle applaudir les progrès fulgurants de la Chine, compte tenu des enjeux climatiques, ou voir d’un mauvais œil ses avancées sur le plan industriel ? Car pour l’UE, accélérer la décarbonation ne doit pas rimer avec un achat massif de produits chinois qui risquerait d’affaiblir encore un peu plus son industrie.
[1] La Chine représente 69 % de la production mondiale et 85 % du raffinage des terres rares en 2023, plus de 80 % des modules photovoltaïques, 60 % des capacités de fabrication d’éoliennes et 85 % des cellules de batteries. Sources : BloombergNEF, IEA, USGS
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