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L’astate, ce grand inconnu

Posté le 16 juin 2013
par La rédaction
dans Chimie et Biotech

Le CERN parvient à lever un peu le voile sur l'astate, élément chimique radioactif de numéro atomique 85, le plus rare des éléments naturels présents sur Terre.

Il n’est jamais trop tard pour combler les lacunes du tableau périodique des éléments : une équipe internationale de physiciens est parvenue à mesurer, pour la toute première fois, l’énergie d’ionisation de l’astate, élément chimique radioactif de numéro atomique 85 et plus rare des éléments naturels présents sur Terre.

Les scientifiques responsables de cette découverte travaillent auprès de « l’usine alchimique » du CERN, l’installation de faisceaux radioactifs ISOLDE.

L’énergie d’ionisation d’un atome est l’énergie qu’il faut fournir à un atome neutre pour lui arracher un électron et ainsi le transformer en ion positif.

La mesure de cette valeur devrait pouvoir permettre de développer des applications dans la lutte contre le cancer, notamment dans le domaine des radiothérapies utilisant les rayons alpha, qui permettent d’endiguer la croissance des cellules cancéreuses.

Isotopes artificiels

Découvert en 1940, cet élément du groupe des halogènes ne se laisse pas aisément observer : la quantité totale d’astate dans la croûte terrestre serait constamment inférieure à… trente grammes.

Le groupe de physiciens aura donc dû contourner la difficulté en produisant des isotopes artificiels d’astate, dont ils sont parvenus à étudier la structure atomique par une technique répondant au doux nom de « spectroscopie par ionisation résonante par faisceaux laser au niveau de la source ».

Le CERN nous éclaire un peu : « Les faisceaux de protons de haute énergie issus du Booster du Synchrotron à protons du CERN sont envoyés sur des cibles d’uranium.

Les collisions produisent une gerbe d’éléments chimiques, qui se diffusent dans une cavité métallique à 2000°C.

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Si l’on envoie des faisceaux laser de longueurs d’onde déterminées dans cette cavité, on obtient une ionisation sélective de certains des atomes.

Un champ électrique extrait les ions chargés positivement, qui sont envoyés dans des aimants réglés de façon à permettre uniquement la transmission d’une masse choisie. Le résultat est un faisceau d’ions ne contenant qu’un seul isotope, qui est envoyé sur un détecteur. ».

Il aura donc suffi de surveiller la longueur d’onde pour obtenir la valeur de l’énergie d’ionisation de l’astate, à savoir 9,31751 électronvolts.

Prédire les propriétés atomiques et chimiques des éléments superlourds

Outre son utilisation dans la lutte contre le cancer, la mesure de cette valeur pourra également servir de pierre angulaire aux théories de prédiction des propriétés atomiques et chimiques des éléments superlourds, comme l’explique le chef de l’équipe RILIS, Valentin Fedosseev :

« La spectroscopie laser au niveau de la source est une méthode extrêmement sensible pour l’étude des propriétés atomiques des isotopes exotiques à vie brève. […] Elle est bien adaptée à l’exploration des spectres des éléments produits artificiellement, comme les éléments superlourds ».

Les résultats de l’équipe internationale de physiciens viennent d’être publiés dans la revue scientifique Nature Communications par l’Organisation européenne pour la recherche nucléaire (plus connue sous l’acronyme… CERN).

L’installation ISOLDE a pour but de permettre la production et l’étude de certains des isotopes les plus instables, en particulier ceux dont la période radioactive ne dépasse pas les quelques millisecondes.

Par Moonzur Rahman