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Puces pour l’IA : le monopole de NVIDIA va-t-il durer ?

Posté le 14 novembre 2025
par Philippe RICHARD
dans Informatique et Numérique

Le cours de l'action NVIDIA a atteint des sommets historiques, reflétant sa position inébranlable comme pilier majeur de la révolution mondiale de l'IA. Mais les poids lourds de la tech commencent sérieusement à réfléchir à développer leur propre puce. Plus facile à dire qu’à faire ?

Quelle mue en quelques années ! Avant la pandémie du Covid, rares étaient ceux, hormis les passionnés de jeux vidéo, qui connaissaient le nom de Nvidia. Mais, avec l’essor de l’IA générative, ce fabricant californien de cartes graphiques est devenu l’une des entreprises à la croissance la plus rapide de tous les temps.

Sa capitalisation boursière a été multipliée par plus de trente en seulement cinq ans. Pourquoi cette envolée exceptionnelle ? Sans les puces de Nvidia, ChatGPT et autres outils d’IA n’auraient jamais franchi toutes les étapes importantes de l’IA en si peu de temps.

La puissance de calcul phénoménale de ces puces leur a permis de gagner des années de développement en quelques mois. Par ailleurs, les calculs immenses qui sous-tendent l’IA générative nécessitent des dizaines, voire des centaines de milliers de puces extrêmement puissantes comme celle de Nvidia.

Mais, Nvidia n’est pas seulement le pilier de l’IA. C’est aussi l’un des investisseurs en capital-risque les plus influents de cet écosystème. Selon le Financial Times, en 2024, Nvidia a investi 1 milliard de dollars dans des start-ups spécialisées dans l’IA à travers 50 levées de fonds et plusieurs acquisitions stratégiques, contre 872 millions de dollars répartis sur 39 transactions en 2023.

Les investissements de Nvidia couvrent un large éventail d’applications d’IA, notamment les technologies médicales, la robotique, le cloud computing et les grands modèles linguistiques. Parmi ses investissements les plus notables en 2024, on peut citer : xAI, l’entreprise d’IA d’Elon Musk, OpenAI (ChatGPT), Mistral (équivalent français et européen de ChatGPT) ou encore Perplexity, un moteur de recherche fondé sur l’IA.

La bulle IA

Récemment, Nvidia a annoncé investir 100 milliards de dollars dans OpenAI dans les prochaines années mais également 5 milliards dans Intel, le fondeur qui avait lui aussi un quasi-monopole sur les processeurs installés dans les ordinateurs…

Comme quoi un monopole n’est pas éternel. Yahoo! constituait la référence en matière de moteurs de recherche avant d’être supplanté par Google. De même, Nokia et BlackBerry occupaient respectivement les positions de leaders sur le marché des téléphones mobiles grand public et professionnels à la fin des années 1990, avant d’être largement dépassés par l’iPhone et les appareils Android.

Le fabricant de puces IA subira-t-il le même sort ? Les principaux fournisseurs de services cloud tels que Microsoft, Google et Amazon développent leurs propres puces IA afin de réduire leur dépendance vis-à-vis de Nvidia.

Une coalition d’entreprises technologiques, dont Qualcomm, Google et Intel, s’efforce de contester la domination de Nvidia par le biais de la fondation UXL (Unified Acceleration, qui fait partie de la fondation Linux).

Cette initiative open source vise à créer un écosystème logiciel permettant d’exécuter du code sur n’importe quel matériel, quel que soit le fabricant de puces. En un mot, remplacer les puces Nvidia par celles d’Intel, Qualcomm, Fujitsu ou ARM.

Tous les acteurs de ce regroupement ont des raisons de vouloir couper le cordon ombilical qui les retient encore à Nvidia. Pour Arm, une société britannique de semi-conducteurs réputée pour ses puces à faible consommation d’énergie qui équipent d’innombrables appareils mobiles et applications de l’Internet des objets (IoT), cette coalition lui permettrait d’étendre sa présence dans le domaine du matériel d’IA.

Pour Google, qui est à l’origine de TensorFlow, l’un des frameworks d’IA les plus utilisés au monde, c’est une piste pour ne plus dépendre de CUDA. Quant à Intel, qui a développé la norme ouverte OneAPI, cette coalition lui permettrait d’assurer son projet qui sert de base aux ambitions indépendantes du matériel du projet UXL.

Et, si finalement, c’est l’éclatement de la bulle IA qui venait à bout de l’hégémonie de Nvidia ? La Banque d’Angleterre redoute une « forte correction des marchés », quand le FMI alerte sur des « similitudes avec la bulle Internet ».


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