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L’industrie française de l’armement est montée en cadence en 2024

Posté le 28 mai 2025
par Pierre Thouverez
dans Entreprises et marchés

Accélération de la production, augmentation des exportations, innovations… Les acteurs tricolores de l’armement ont changé de dynamique, portés par la nouvelle Loi de programmation militaire (LPM).

La loi de programmation militaire a en effet permis à la Direction générale de l’armement, qui vient de publier son bilan d’activité 2024, d’orchestrer une montée en cadence sans précédent, assumant pleinement la transition vers une véritable économie de guerre. Une montée en cadence qui aura finalement précédé les multiples et contradictoires annonces de Donald Trump sur la volonté américaine de laisser l’Europe gérer sa propre sécurité.

Avec plus de 21 milliards d’euros engagés pour équiper les forces militaires cette année, et 1,6 milliard d’euros pour préparer les technologies du futur, l’effort budgétaire est sans précédent. Avec à la clé des cadences de production qui s’envolent : le temps de fabrication des radars a par exemple été divisé par trois, les livraisons de missiles multipliées par six, et la production d’obus de 155 mm par soixante. C’est toute une filière industrielle qui est poussée à se réorganiser et à accélérer, pour s’adapter à un contexte international plus incertain que jamais.

La DGA a lancé en 2024 un plan d’accompagnement des PME stratégiques, tandis que des innovations de rupture sortent des laboratoires et rejoignent déjà les armées : drones téléopérés, armes laser, simulateurs, outils de cybersécurité… Plusieurs d’entre elles ont été déployées en conditions réelles à l’occasion des Jeux olympiques de Paris, renforçant ainsi les capacités de surveillance et de neutralisation des menaces.

Les exportations tricolores se portent bien

Sur le front des exportations, la France confirme son statut de poids lourd mondial. En effet, Les commandes d’armement ont atteint 18 milliards d’euros en 2024, grâce notamment aux contrats Rafale, aux sous-marins, ou aux canons CAESAR. La coopération européenne s’intensifie également, avec de nouveaux jalons pour le SCAF (avion de combat du futur), le MGCS (char de nouvelle génération) et la production conjointe de missiles Mistral.

Ce que le rapport de la DGA laisse également transpirer, c’est une réorganisation en profondeur de la chaîne logistique en cours depuis l’année dernière, avec une relocalisation de la production de poudres, la création de stocks stratégiques chez les industriels, la sécurisation des approvisionnements critiques et la mise en place de référentiels cybersécurité, entre autres.

Ainsi, la DGA multiplie les dispositifs pour rendre la Base industrielle et technologique de défense (BITD) plus résiliente et autonome.

Cette accélération pose aussi un défi humain, notamment en termes de recrutement, de formation et de fidélisation : une réserve industrielle de défense a été créée pour renforcer les effectifs en cas de besoin. Des actions ont aussi été engagées pour faciliter l’emploi dans les territoires, notamment via des conventions avec France Travail, et pour mieux faire dialoguer le secteur civil et le monde militaire.

2024 marque donc un tournant stratégique qui, au vu du contexte international, que ce soit sur le front russe ou par rapport aux américains, paraît s’imposer. Face aux tensions géopolitiques, la France a décidé de transformer sa capacité militaire en profondeur, notamment en termes de souveraineté technologique, d’agilité industrielle et d’attractivité économique. Une tendance qu’on devrait voir opérer chez nos voisins européens également, si l’on en croit l’ambition européenne affichée récemment. Reste à savoir dans quelle mesure le contexte économique tendu actuellement rendra possible cette mutation.


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