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Décryptage

La réindustrialisation et le réarmement, en même temps ?

Posté le par Pierre Thouverez dans Entreprises et marchés

Alors que les événements récents voient les Etats-Unis s’éloigner de l’Europe, le vieux continent doit remettre la main sur ses capacités de défense. L’industrie de la défense se met déjà en ordre de bataille. Voyons comment cette stratégie impactera l’industrie française et avec elle France 2030.

La situation en Ukraine et les récentes déclarations du Président Trump ont fait l’effet d’une déflagration en Europe. Si rien n’est aujourd’hui acté, les dirigeants des pays de l’Union Européenne ont exprimé le besoin impérieux de renforcer leurs armées, en considérant comme acquis le fait que les Etats-unis ne constituaient plus un allié indéfectible. De fait, l’Europe, qui a pendant des décennies mis en sourdine ses capacités de défense et compté sur le géant américain pour garantir sa sécurité, se retrouve aujourd’hui dans une situation inédite et fragile. Et devant la nécessité de se réarmer et de mettre en place une stratégie continentale pour assurer sa défense militaire, devant une potentielle menace venue de l’Est. Menace déjà prise en compte depuis trois ans et l’invasion russe en Ukraine.

S’il apparaît aujourd’hui difficile d’évaluer concrètement la menace russe, le Président Macron a dans son discours au début du mois fustigé l’agressivité du Président Poutine et assuré que la passivité face à une telle situation serait pure folie.

Dès le 11 mars, Emmanuel Macron a réuni les 30 chefs d’état-major de l’UE, plus celui du Royaume-Uni et de la Turquie, pour évoquer la situation ukrainienne, et l’avenir immédiat de la défense européenne.

En ce qui concerne la défense exclusivement française, le ministre des Armées a évoqué l’objectif d’un budget de 90 milliard d’euros par an pour la défense, alors que ce dernier pour 2025 est de l’ordre de 50,5 milliards. La loi de programmation militaire prévoit de le porter à 69 milliards à horizon 2030. Il va donc falloir trouver de l’argent. 

Au niveau continental, le plan ReArm Europe, annoncé il y a quelques jours, pourrait représenter quelque 800 milliards d’euros. Concrètement, le vieux continent veut faciliter la capacité des Etats à emprunter et à mobiliser des capitaux pour investir dans les industries de défense, sans que cela ne vienne poser de problème vis-à-vis des taux d’endettement des Etats, sujet sur lequel l’UE est en général plutôt inflexible. Il ne s’agit donc pas pour l’Europe d’investir à corps perdu dans son industrie de défense, mais plutôt de pousser ses pays membres à le faire plus facilement. Il est vrai que depuis les années 2000, alors que les Etats-Unis (+65,7 %), la Russie (+292 %) et la Chine (+592 %) poursuivaient le renforcement de leurs moyens de défense en augmentant leurs dépenses, l’Europe (+19,7 %) plafonnait. 

Pourtant, force est de constater que de nombreux grands groupes industriels liés à la défense sont européens, et font partie des leaders mondiaux dans leur secteur d’activité.

Au niveau français, les fleurons de la défense s’appellent Airbus Defence and Space, Ariane Group, Arquus, Dassault Aviation, MBDA, Naval Group, Nexter, Safran, Thales… Des géants industriels, qui drainent avec eux tout un écosystème comptant pas moins de 4000 PME pour près de 260 000 emplois.

Au niveau européen, d’autres leaders industriels comme BAE Systems, Leonardo ou Rolls Royce font également partie des géants de la défense. 

Le plan d’investissement ne cible pas spécifiquement le domaine de la défense, et pour ainsi dire aucun projet financé à l’heure actuelle n’est directement lié à l’augmentation de la capacité de l’hexagone à assurer sa propre sécurité. Pour autant, de nombreux domaines stratégiques, comme la souveraineté numérique, l’accès aux composants stratégiques, ont trait, de près ou de loin, à l’autonomisation de la France sur le plan militaire.

Parmi les grands groupes industriels fleurons de la défense tricolore, nombre d’entre eux bénéficient de soutiens financiers pour des projets portés par France 2030.

C’est le cas de Thalès – projet DECOR, projet CarbChaser entre autres – par exemple. Reste à savoir si certains de ces projets pourraient voir leur scope modifié, pour être en mesure d’offrir une synergie entre la volonté de réindustrialisation et la nécessité d’atteindre rapidement une autonomie dans le domaine de la défense, qu’elle soit étatique ou continentale.

Pour aller plus loin

Posté le par Pierre Thouverez


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