L’histoire de BioUpp commence avec Pierre Fontanille, enseignant-chercheur à l’Université Clermont Auvergne (Polytech Clermont-Ferrand / Institut Pascal, UMR 6602 – UCA/CNRS) et gérant d’un bureau d’étude sur la méthanisation depuis 2016. « Nous travaillons sur les innovations autour de la méthanisation. L’un de nos objectifs était de trouver des solutions pour utiliser le CO2 biogénique, celui produit par la décomposition des plantes dans les méthaniseurs. Nous nous sommes donc penchés sur la méthanation, qui ne possède pas encore de technologie industrielle », explique le chercheur. Dès 2018 les équipes œuvrent sur ce procédé, ou comment synthétiser du méthane grâce à la réaction entre du dihydrogène et du dioxyde de carbone. Après six ans de labeur, Pierre Fontanille et ses collaborateurs ont développé une technologie « robuste, simple et performante de méthanation ». Elle emploie un catalyseur biologique, un microorganisme. « En plus de la sélection d’une souche très efficace, nous avons aussi créé un désign de réacteur. Notre système est peu énergivore, car il ne nécessite pas d’agitation mécanique. La technologie possède un rendement de conversion du CO2 en méthane de 90 % », se félicite Pierre Fontanille. En septembre 2024, le projet est lauréat du concours d’innovation de l’État i-Lab 2024 organisé conjointement par le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche et Bpifrance. Il reçoit alors un financement de 375 000 euros pour accélérer le développement industriel. Dans la continuité, BioUpp est officiellement créée en octobre, avec à sa tête Nadia Auclair, CEO de la société.
Stocker l’hydrogène
La technologie proposée par BioUpp utilise le principe de méthanation : des catalyseurs biologiques complexent du dioxygène de carbone (CO2) avec du dihydrogène (H2) pour produire du méthane (CH4). « Nous récupérons le CO2 sur les unités de méthanisation. Habituellement, ces installations séparent le méthane du dioxyde de carbone qui est relargué dans la nature. Le méthane est ensuite injecté dans le réseau de gaz », explique le cofondateur.
L’hydrogène, quant à lui, provient des unités de production d’énergie renouvelable. L’éolien ou le photovoltaïque, par exemple, ne fabriquent pas en continu et l’énergie créée n’est pas toujours consommée immédiatement. Il faut donc stocker cette électricité. « Nous proposons de convertir cette énergie en hydrogène grâce à l’électrolyse de l’eau. C’est encore une filière en développement avec des rendements autour de 40 %, mais c’est un domaine d’avenir », soutient Pierre Fontanille. BioUpp veut alors convertir cet hydrogène en méthane, qui peut être stocké ou injecté directement dans les réseaux de gaz naturel.
Petit à petit vers l’industrialisation
Aujourd’hui BioUpp exploite un pilote d’une vingtaine de litres, mais passera bientôt à des réacteurs de 300 à 500 L grâce au financement de i-Lab. « Nous envisageons d’utiliser un démonstrateur industriel d’ici 2027. Nos clients seront soit les producteurs d’électricité renouvelable : parcs éoliens ou solaires ; ou les méthaniseurs qui émettent du CO2 biogénique. Il nous faudra nous rapprocher soit de la source d’hydrogène, soit de celle de dioxyde de carbone », explique le cofondateur.
Le siège de la start-up est actuellement à Clermont-Ferrand. BioUpp emploie cinq personnes dont trois travaillent à la R&D.
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