L’intelligence artificielle est devenue un outil incontournable dans l’industrie française. Dans l’énergie, le transport, l’aéronautique, la santé ou encore les télécommunications, les ingénieurs s’appuient aujourd’hui sur une variété de modèles, du deep learning aux méthodes statistiques plus classiques, en passant par les jumeaux numériques et les approches hybrides mêlant physique et apprentissage automatique. L’objectif reste le même : améliorer la productivité, la fiabilité et la qualité, tout en réduisant les coûts.
Les exemples d’applications sont nombreux. Dans le ferroviaire par exemple, la SNCF a recours à la maintenance prédictive pour diagnostiquer l’état de ses infrastructures et anticiper les défaillances. Grâce à des modèles exploitant des milliers de variables, l’entreprise atteint aujourd’hui environ 95 % de fiabilité dans ses diagnostics, ce qui permet de mieux planifier les interventions et d’optimiser les coûts. Autre exemple dans le secteur des transports, l’automobile. Le leader du secteur, Renault, participe au programme Confiance.ai, et a développé à cette occasion un système d’IA capable de contrôler automatiquement la qualité des soudures de châssis. La robustesse et l’explicabilité des modèles sont ici cruciales, car les enjeux de sécurité sont majeurs.
Dans le secteur des télécommunications, l’entreprise Orange mise sur la reconnaissance visuelle pour vérifier la conformité des interventions de terrain. Les techniciens documentent leurs opérations avec des photos et des vidéos, que l’IA analyse en temps réel, réduisant ainsi les erreurs et accélérant les contrôles.
L’intelligence artificielle se déploie également sous des formes plus récentes, comme les grands modèles de langage. La SNCF a ainsi développé son propre “Group GPT”, destiné à assister ses agents dans la recherche documentaire, le support opérationnel ou la formation. Ces outils conversationnels améliorent la réactivité des équipes et réduisent le temps consacré aux tâches administratives. Enfin, des acteurs comme Dassault Systèmes exploitent depuis longtemps les jumeaux numériques. Ces simulations combinent modèles physiques et IA pour accélérer les calculs et affiner la précision, en particulier dans les situations où les équations déterministes sont trop lourdes ou incomplètes.
Ces applications reposent sur un large éventail de modèles. Ainsi le deep learning domine les usages liés à la vision, au langage ou aux séries temporelles. Les méthodes statistiques classiques, comme les régressions ou les forêts aléatoires, conservent leur pertinence dans des contextes où la transparence est essentielle. Quant aux modèles hybrides, ils gagnent en importance en intégrant des lois physiques et des contraintes de simulation, alliant performance et robustesse.
Au-delà des algorithmes, deux défis majeurs s’imposent aux ingénieurs : la donnée et le calcul. La collecte, le nettoyage et la protection des données représentent en effet un enjeu considérable, d’autant plus que le respect du RGPD impose des contraintes très strictes. Côté calcul, l’entraînement de modèles puissants nécessite des ressources conséquentes, mobilisant des GPU et des supercalculateurs, comme par exemple le supercalculateur Jean Zay.
La supervision reste indispensable
À ces contraintes techniques s’ajoutent des enjeux éthiques. La fiabilité des modèles est cruciale : une erreur de détection peut avoir de lourdes conséquences matérielles ou humaines. La supervision humaine reste donc aujourd’hui indispensable, tout comme la traçabilité des décisions.
Pour les ingénieurs, en France notamment, l’adoption de l’IA ne se résume pas à la maîtrise des algorithmes. Il s’agit de les intégrer dans l’ensemble des chaînes de valeur : conception, production, maintenance et logistique. Le contexte national, avec des investissements publics importants, des capacités de calcul renforcées et une stratégie dédiée, constitue un cadre favorable. Les prochaines innovations – modèles multi-physiques, jumeaux numériques dynamiques, agents spécialisés – repousseront encore les frontières de l’entrée de l’IA dans l’industrie et dans les usines en particulier, à condition de disposer d’IA de confiance.
Pour résumer, l’IA constitue un levier stratégique pour l’industrie française. Elle automatise des tâches, améliore la qualité, prévient les défaillances et optimise les systèmes complexes. Mais son avenir dépendra de la capacité des ingénieurs à garantir des modèles explicables et robustes, tout en étant économes en énergie et respectueux des exigences éthiques. Un équilibre loin d’être aujourd’hui atteint.
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