Les énergies renouvelables éoliennes et solaires présentent des possibilités étendues de développement si bien que leur croissance mondiale n'a aujourd'hui pas d'équivalent hormis celle des centrales à charbon. Or, les énergies renouvelables semblent bien plus inoffensives pour la santé et l'environnement, tant pour l'utilisation de ressources naturelles que pour l'impact climatique ou la qualité de l'air. Aussi leur développement est fortement encouragé dans de nombreux pays et bénéficie d'une image généralement positive auprès du public. Comme l'électricité qu'elles produisent est un vecteur énergétique aux usages nombreux et en extension, le développement de l'éolien et du solaire semble devoir se poursuivre à rythme soutenu dans les prochaines décennies.
Quelle part l'éolien et le solaire peuvent-ils prendre dans le futur mix électrique ? Leur croissance ne tient-elle qu'aux capacités d'investissement et à la durée de réalisation des projets ou bien y a-t-il d'autres raisons ou causes physiques qui la limiteraient ? Une telle cause physique est à chercher dans la sécurité de l'approvisionnement électrique. Cette sécurité est un impératif de toute société développée dont les activités et les infrastructures ne peuvent être soumises sans dommage à des aléas d'approvisionnement électrique. Or, la sécurité du réseau électrique repose sur un équilibre où l'ensemble des productions doit égaler la charge c'est-à-dire la puissance appelée pour la consommation. Cet équilibre est rendu nécessaire du fait que l'électricité se stocke difficilement et en petite quantité par rapport aux quantités qui transitent dans le réseau.
Les productions éoliennes et solaires sont soumises instantanément aux variations de flux naturels imposés par la rotation de la Terre et la dynamique de l'atmosphère. Par suite ces énergies renouvelables fournissent l'électricité d'une façon intermittente. Le réseau électrique doit être équilibré en tenant compte de ces flux intermittents quand ils ont un accès prioritaire, comme aujourd'hui. L'équilibrage du réseau doit alors être réalisé en ajustant la production d'autres centrales pilotables (centrales thermiques ou hydroélectriques) qui apportent l'appoint ou complément nécessaire pour égaler la charge. Cet équilibrage aujourd'hui réalisé pourra-t-il toujours l'être quand la part d'énergies renouvelables intermittentes sera plus importante ? C'est le questionnement central de l'article traité à partir de connaissances existantes pour la France et l'Allemagne.
L'Allemagne est aux avant-postes du développement de l'éolien et du solaire et pour cette raison peut être le premier pays à voir apparaître les effets de leur développement. F. Wagner a été un précurseur en réalisant une étude circonstanciée des conséquences d'une part croissante de ces énergies dans le mix électrique, en travaillant à partir de valeurs enregistrées sur le réseau allemand . Le présent article s'appuie sur la méthode qu'il a développée et que l'on utilise pour l'appliquer à la France et traiter en parallèle des situations futures des deux pays. Il propose une analyse des sollicitations d'un réseau électrique et des autres centrales en présence d'une forte part d'énergies renouvelables intermittentes. Cette analyse s'appuie sur les lois physiques et ordres de grandeur qui gouvernent les énergies renouvelables intermittentes. Grâce au parallèle entre les deux pays, des similarités apparaissent et permettent de dégager des résultats communs propres aux mix où les énergies renouvelables intermittentes ont une contribution majoritaire.