Les géopolymères sont la réciproque des polymères organiques. À la place de dérivés du pétrole et de la chaîne carbonée, on utilise de la matière minérale composée de silice et d'alumine. Cette géosynthèse permet de réaliser des matériaux pouvant remplacer certains plastiques, mais ils n'ont aucun solvant dangereux, ne brûlent pas et ne dégagent pas de gaz ni fumées toxiques. Comme une roche, ils résistent aux agressions chimiques et à l'érosion du temps. Les matières premières sont principalement des minéraux d'origine géologique, d'où le nom « géopolymère ». Les géopolymères peuvent être classés en deux grands groupes : les géopolymères entièrement inorganiques et les géopolymères contenant une certaine quantité d'organique. Au début de la recherche, les renseignements qui étaient à disposition étaient très succincts. Ils provenaient essentiellement de la minéralogie et de la cristallographie des argiles, notamment de la kaolinite. Il était difficile de prédire et de comprendre la réactivité chimique et le mécanisme de géopolymérisation en se basant sur la représentation structurale géométrique sous forme de tétraèdre, pentaèdre ou hexaèdre, encore couramment en usage dans de nombreuses publications. D'où la nécessité d'introduire une écriture mettant en avant les groupes réactionnels chimiques, essentiellement basée sur l'analogie avec la chimie des polysilicones.
Dans cet article, le géopolymère est essentiellement un composé chimique minéral ou un mélange de composés constitués de motifs, par exemple silico-oxyde (—Si—O—Si—O—), silico-aluminate (—Si—O—Al—O—), ferro-silico-aluminate (—Fe—O—Si—O—Al—O—) ou alumino-phosphate (—Al—O—P—O—), créés par un processus de géopolymérisation. Il permet la fabrication de matériaux employés dans les applications céramiques, les composites fibreux de haute technicité pour l'industrie automobile, l'aéronautique et la défense, les peintures et colles anti-feu sans solvant organique, en passant par les biomatériaux pour prothèses osseuses, et les nouveaux ciments écologiques sans dégagement de gaz à effet de serre CO2 . Une nouvelle classe de matériaux hybrides à matrice organique et géopolymérique permet l'amélioration des propriétés mécaniques et physiques du géopolymère proprement dit. Le défaut des géopolymères est leur caractère céramique, c'est-à-dire leur manque d'élasticité. L'incorporation d'organique vise à améliorer cette propriété mécanique.
On distingue deux voies de synthèse :
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en milieu alcalin (Na+, K+, Li+, Ca2+, Cs2+, etc.), souvent confondu avec la simple activation alcaline des ciments ;
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en milieu acide avec de l'acide phosphorique et les acides humiques.
La voie alcaline est la plus importante en termes de R, d'innovation et d'applications commerciales et est celle décrite dans cet article.
La microstructure de la matrice géopolymère étant essentiellement amorphe, la diffraction aux rayons X n'est pas d'une grande utilité. Par contre, la spectroscopie RMN fournit les informations nécessaires pour la compréhension de la structure moléculaire et du caractère polymérique. Dans cet article, nous portons l'intérêt sur la réactivité du minéral qui fut à l'origine de la découverte des géopolymères en 1976, à savoir la kaolinite calcinée, ou métakaolinite, dénommée métakaolin ou MK-750 pour indiquer la température de calcination de 750 oC. Cette matière première est exempte d'impureté et permet ainsi une analyse plus simple du mécanisme de géopolymérisation alcaline.
Aperçu historique
Les différents incendies de grande ampleur provoqués par les matières plastiques qui avaient, dans les années 1970, causé la mort de centaines de personnes (le Dancing du Cinq Sept en 1970 près de Grenoble) furent un choc pour les chimistes experts en polymères organiques. Il fallait donc inventer et développer des polymères inorganiques, stables au feu. Pour cela, une société de recherche privée, Cordi SA (Coordination et développement de l'innovation), fut créée en 1972 à Saint-Quentin (Aisne) ; puis, en 1979, l'Institut géopolymère (association Loi 1901) commença ses travaux de publications.
C'est en mars 1983 que la recherche appliquée et universitaire fut continuée aux USA, plus particulièrement sur les ciments géopolymères (ciment Pyrament), tout d'abord à Miami, Barry University, Floride, puis à Pennsylvania State University, suivie par la recherche sur les applications en matériaux composites stables au feu pour l'aéronautique avec la FAA (Atlantic City) et Rutgers State University, New Jersey, jusqu'en 2000, date de la réouverture d'un laboratoire à Saint-Quentin, le nom de la société étant changé en Cordi-Géopolymère Sarl, jusqu'en 2009.
D'un autre côté fut créée en France, en 1983 à Pont-Ste-Maxence (Oise), une petite société d'innovation pour développer des applications commerciales de niche, Géopolymère Sarl, plus connue maintenant sous le nom de Pyromeral Systems Sarl. Il faudra cependant attendre la publication d'un article sur les ciments géopolymères en octobre 2006 dans une revue de vulgarisation scientifique, puis les directives du Grenelle de l'environnement (fin 2007) pour attirer l'attention des scientifiques français. Ainsi, dans son rapport Évaluation de la stratégie nationale de recherche en matière d'énergie du 3 mars 2009, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) (Assemblée nationale et Sénat) recommande d'anticiper « l'après pétrole » en développant la recherche sur les géopolymères. Cette recommandation fut également présentée le 18 mars 2009, à l'Assemblée nationale, devant la Commission des affaires économiques, de l'environnement et du territoire. Depuis, plusieurs thèses de doctorat furent mises en route par les institutions suivantes : École supérieure physique et chimie industrielles, Institut français du pétrole, CEA., École nationale supérieure céramiques industrielles, École des Mines d'Albi, Laboratoire central des ponts et chaussées IFSTTAR, INSA Toulouse.