La détermination des masses moléculaires supérieures à 2 000 ou 3 000 daltons (Da) exige l’utilisation d’aimants à haut champ ou de spectromètres équipés d’analyseurs à temps de vol. Le premier type d’appareillage, fort coûteux, fait appel à l’ionisation par LSIMS (Liquid Secondary lon Mass Spectrometry) et reste limité à des masses inférieures à 10 000 Da ; dans le deuxième cas, l’ionisation par les produits de fission du 252Cf (PDMS - Plasma Desorption Mass Spectrometry) ne permet guère d’aller au-delà de 25 à 30 kDa, avec une précision souvent insuffisante pour vérifier sans ambiguïté la conformité des produits analysés.
Deux techniques récentes, le MALDI-TOF (Matrix Assisted Laser Desorption Ionisation - Time Of Flight) et l’électrospray, ont constitué une véritable révolution pour l’analyse des composés de haute masse moléculaire, tout particulièrement les peptides et les biomolécules (protéines, fragments d’ADN et d’ARN).
L’originalité de l’électrospray réside dans sa capacité à obtenir des molécules portant plusieurs dizaines de charges. La spectrométrie de masse mesure toujours le rapport de la masse d’un ion, divisé par le nombre de charges qu’il porte (m/z). Par conséquent, une protéine de 50 000 Da portant 50 charges dues à des protons est détectée à une masse apparente de 1 001 [(50 000 + 50)/50]. Autrement dit, la zone d’observation des différentes espèces ioniques est ramenée dans une gamme de rapports m/z tout à fait compatible avec l’utilisation d’analyseurs quadrupolaires.
Une autre caractéristique de l’électrospray vient du fait que le processus d’ionisation se produit en phase liquide et à la pression atmosphérique. Il est d’autre part tout à fait adapté à l’étude des composés polaires ou thermosensibles (l’ionisation se produit en effet à température ambiante). Son couplage avec les techniques chromatographiques en phase liquide était donc logique, supplantant même, tant sa réalisation est aisée, les techniques du thermospray et de l’interface à courroie mobile, délicates à mettre en œuvre et dont les applications restent, en comparaison, par trop ponctuelles.
Le nombre de publications dans ce domaine est devenu considérable, que ce soit pour l’analyse de métabolites, la caractérisation d’impuretés diverses, l’identification précoce de produits d’origine naturelle, ou encore pour l’étude de milieux biologiques complexes.