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RÉSUMÉ
Cet article présente, après un état de l’art sur l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) en géotechnique, une méthodologie détaillée pour l’application du machine learning (ML) dans des cas pratiques en géotechnique, avec un focus particulier sur la prédiction des tassements induits par le creusement des tunnels. Chaque étape du processus, du cadrage du problème à la conception du modèle, en passant par la préparation des données, l’entraînement des algorithmes, et l’obtention du modèle final, est illustrée par des exemples concrets issus de cette problématique. L’article met également en lumière les défis associés à chaque phase, de l’élaboration des données à leur nettoyage, de l’entraînement des modèles à leur validation et optimisation, offrant ainsi une approche méthodique pour intégrer le ML dans les projets géotechniques.
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Lire l’articleAuteur(s)
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Tatiana RICHA : Ingénieure data en géotechnique - Terrasol Setec, Paris, France
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Lina-María GUAYACÁN-CARRILLO : Chargée de recherche en géotechnique (laboratoire Navier), maître de conférences de l’ENPC - École nationale des ponts et chaussées, Institut polytechnique de Paris, Marne-La-Vallée, France
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Jean-Michel PEREIRA : Directeur du laboratoire Navier, professeur de l’ENPC - École nationale des ponts et chaussées, Institut polytechnique de Paris, Marne-La-Vallée, France
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Gilles CHAPRON : Directeur des projets data - Terrasol Setec, Paris France
INTRODUCTION
Le machine learning (ML), ou apprentissage automatique en français, est une branche de l’intelligence artificielle (IA) qui permet aux systèmes informatiques de s’améliorer automatiquement grâce à l’expérience. Or, la géotechnique, discipline à l’interface entre la géologie et le génie civil, fait face à des défis croissants de complexité et de précision dans l’analyse des sols et la conception des ouvrages. Dans ce contexte, l’émergence du ML comme outil d’analyse et de prédiction ouvre des perspectives prometteuses pour répondre aux enjeux contemporains du secteur.
Les méthodes traditionnelles de calcul en géotechnique, bien qu’éprouvées, présentent certaines limitations face à la complexité inhérente des sols et des interactions sol-structure. La variabilité naturelle des paramètres géotechniques, la non-linéarité des comportements mécaniques et la multiplicité des facteurs environnementaux rendent parfois difficile l’application des approches analytiques classiques.
L’IA, et plus particulièrement le ML, apporte une nouvelle dimension à l’analyse géotechnique en permettant d’exploiter les vastes quantités de données accumulées par la profession depuis des décennies, ou plus modestement à l’échelle d’un projet, pour recaler un modèle au fur et à mesure de la réalisation des travaux. Ces techniques permettent de détecter des tendances et motifs complexes dans les données, d’automatiser certaines tâches d’analyse, et d’améliorer la précision des prédictions géotechniques, terme consacré dans ce domaine, mais on pourrait utiliser également celui de prévision.
Les deux exemples suivants illustrent deux cas d’usage simple de l’IA appliqué à des problématiques géotechniques :
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la prédiction du tassement d’un remblai sur sol compressible nécessite traditionnellement des calculs complexes intégrant de nombreux paramètres (indice de compression, contraintes effectives, etc.) ; le ML pourrait permettre d’enrichir cette approche en exploitant les retours d’expérience de projets similaires pour affiner les prédictions ;
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l’utilisation des réseaux de neurones ou d’arbres de décision pour la classification des sols peut permettre d’accélérer voire d’automatiser l’interprétation des essais in situ, réduisant le temps d’analyse tout en maintenant un haut niveau de précision.
Dans cet article, nous explorerons l’application du ML à la géotechnique selon trois axes principaux :
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les concepts fondamentaux du ML et leur état de l’art en géotechnique, illustrés par des cas d’application concrets qui démontrent la pertinence de ces approches dans notre domaine ;
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le cadrage et la préparation des projets de ML en géotechnique, étape cruciale qui conditionne la réussite de la démarche, depuis la structuration des données jusqu’à la sélection des données d’entrée pertinentes ;
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la mise en œuvre pratique, de l’entraînement des modèles jusqu’à leur déploiement en conditions réelles, en passant par leur optimisation et leur évaluation.
Notre approche vise à démystifier l’application du ML en géotechnique en associant systématiquement les concepts théoriques à un exemple pratique « fil rouge ». L’application présentée est la prédiction du tassement induit par le creusement au tunnelier. Cette démarche a vocation à rendre ces notions complexes aussi claires et applicables que possible et à donner aux lecteurs les clefs pour comprendre non seulement les grands principes sous-jacents, mais aussi les modalités concrètes de mise en œuvre de ces techniques dans leur pratique professionnelle.
L’objectif est de fournir aux géotechniciens les clefs pour intégrer ces nouvelles approches dans leur boîte à outils, en complément – et non en remplacement – des méthodes traditionnelles. Car si le ML ouvre de nouvelles perspectives, il ne remplace pas l’expertise de l’ingénieur, mais vient plutôt l’enrichir en lui permettant de traiter plus efficacement des problèmes complexes.
Note : l’IA et le ML constituent un sujet en évolution rapide. Les avancées technologiques et méthodologiques se succèdent et s’ouvrent au plus grand nombre, notamment à travers la démocratisation des grands modèles de langage (LLM pour large language model) dont le plus connu d’entre eux au moment où l’article est écrit est ChatGPT. Cet article ne peut donc offrir qu’un instantané des connaissances et des pratiques. Notamment, il n’aborde pas les modèles de langage, ou plus généralement l’IA générative.
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3. Méthodologie d’implémentation d’un modèle d’apprentissage automatique
3.1 Entraînement et validation
La première étape commence par l’entraînement d’un algorithme avec ses hyperparamètres par défaut. Pour cela, il suffit de prendre 70 ou 80 % de l’ensemble des données pour l’entraînement et garder le reste pour le test. Cette répartition dépend de la taille de l’ensemble de données à disposition : il faut avoir suffisamment de données pour l’entraînement tout en gardant un jeu de données d’une taille acceptable de données pour le test et donc la vérification de la capacité de généralisation du modèle.
À ce stade, les données sont divisées aléatoirement avec mélange pour garantir une répartition homogène. Le jeu de données, composé de 2 592 observations, est séparé en 80 % pour l’ensemble d’apprentissage (2 072 observations) et 20 % pour l’ensemble de test (518 observations). Les résultats mettent en évidence des variations significatives entre les performances des algorithmes. Le modèle linear regression affiche un score faible avec un R2 de 0.44, confirmant ainsi la complexité du problème. Les modèles fondés sur les arbres de décision (DT, RF et XGBoost) montrent des R2 proches de 1, mais présentent des signes de surapprentissage nécessitant un travail d’optimisation. Les SVM, quant à eux, offre une performance compétitive avec un R2 de 0.91, légèrement inférieur à RF et XGBoost, tout en démontrant une bonne capacité de généralisation.
L’optimisation des modèles d’apprentissage automatique est essentielle pour éviter à la fois le surapprentissage (overfitting) et le sous-apprentissage (underfitting), assurant ainsi la capacité du modèle à généraliser efficacement à partir de nouvelles données. Ce processus repose principalement sur l’ajustement des hyperparamètres, qui jouent un rôle clef dans le comportement et les performances des algorithmes. Un réglage optimal permet d’atteindre une précision maximale tout en réduisant les erreurs sur les...
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BIBLIOGRAPHIE
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