Les matériaux céramiques sont durs mais fragiles. De très nombreux travaux ont été consacrés à l'amélioration de la ténacité des céramiques notamment en dispersant dans la céramique des particules ou des fibres courtes afin de dévier les fissures ou de les fractionner. Il est également possible de réaliser des matériaux céramiques tenaces en fabriquant des matériaux composites à matrice céramique (CMC) et à fibres longues. Le renfort constitué par ces fibres assure les propriétés mécaniques du matériau et la matrice céramique les protège de l'environnement. Les différents CMC sont désignés sous la forme de deux intitulés séparés par une barre oblique (C/C, C/SiC, SiC/SiC...) le premier désignant le matériau de la fibre/le second celui de la matrice. Lorsque la matrice comporte des phases supplémentaires, c'est le composant principal de la matrice qui est mentionné.
Ces composites, qui sont utilisés majoritairement dans des applications en conditions extrêmes, sont dits « thermostructuraux », c'est-à-dire qu'ils peuvent être utilisés à haute température comme matériau de structure et doivent donc conserver leurs propriétés mécaniques en conditions de fonctionnement. Leurs domaines d'application sont actuellement essentiellement l'aéronautique, l'espace et le nucléaire. Suivant les applications, ils sont soumis à des températures de fonctionnement allant de 400 à plus de 2 000 oC dans des atmosphères oxydantes (air, gaz de combustion de réacteur...). Ils peuvent subir des contraintes allant de simples vibrations à des contraintes multiaxiales. Enfin, dans le domaine du nucléaire, ils peuvent être soumis à des irradiations. Les fibres qui sont essentiellement des fibres de carbone, de carbure de silicium ou d'oxydes (alumine, basalte, mullite) supportent l'essentiel de la charge appliquée. Ainsi, elles doivent avoir une résistance à la rupture et un module élastique les plus élevés possibles, associés à une bonne résistance à la fatigue et une faible densité (pour les applications aéronautiques et spatiales). Selon le type d'utilisation, elles doivent également présenter une bonne résistance à l'oxydation, au fluage et à la fissuration sous critique (propagation d'une fissure, le plus souvent par corrosion, pour des facteurs d'intensité de contraintes appliquées inférieures aux contraintes macroscopiques qui déclenchent l'endommagement), une conductivité thermique élevée et être compatibles avec l'interphase ou la matrice, lors de l'élaboration ou de l'utilisation. Elles peuvent être tissées, tressées ou assemblées sous forme de produits semi-finis (feutres, nappes unidirectionnelles...), ce qui constitue une préforme de la pièce finale. Cette préforme est densifiée par une matrice en céramique qui rend la pièce dense et protège les fibres contre les agressions de l'environnement. Contrairement aux composites habituels (composites à matrice organique ou métallique CMO ou CMM), dans les CMC le module d'élasticité de la matrice est supérieur ou égal à celui de la fibre et la déformation à rupture de la matrice est inférieure à la déformation à rupture de la fibre.
Les matériaux céramiques sont cependant fragiles et un troisième composant est introduit dans ces composites afin de les « défragiliser ». Il s'agit d'une interphase aisément clivable de faible épaisseur, comprise entre la fibre et la matrice. Le rôle et la conception de cette interphase seront détaillés plus loin dans l'article. Mentionnons seulement dans cette introduction qu'elle doit conférer une liaison fibre/matrice suffisamment élevée pour transférer correctement vers le renfort fibreux la charge appliquée à la pièce, mais suffisamment faible pour empêcher les fissures générées dans la matrice de se propager au renfort et de rompre les fibres. Elle joue donc le rôle de « fusible » mécanique, mais peut, suivant la nature de ces phases, également jouer le rôle de protection des fibres contre l'oxydation. Cette interphase confère au composite son caractère tenace et « endommageable » qui prévient sa rupture catastrophique. L'objet de cet article est de présenter ces matériaux dont les applications sont encore réservées à des utilisations très spécifiques. Il s'agit en particulier de présenter l'état de l'art de leur élaboration et de la compréhension de leur comportement mécanique, thermique et sous oxydation. Quelques exemples d'application seront présentés en dernière section de cet article.