Les piles à combustible sont considérées depuis au moins deux décennies comme une solution prometteuse aux problèmes énergétiques, représentant depuis peu davantage un maillon dans une chaîne de conversion ou de gestion de l’énergie qu’une solution universelle. De par son principe, une pile à combustible transforme l’énergie d’un combustible (hydrogène, alcool léger, hydrocarbures par exemple) en électricité, chaleur et eau – et dioxyde de carbone le cas échéant – en présence d’un comburant tel que l’oxygène de l’air.
On envisage la pile à combustible pour des applications stationnaires (notamment pour le résidentiel ou pour alimenter de petits appareils électriques portables) ou bien embarquées pour le transport, c’est-à-dire permettant la traction électrique. Par ailleurs, selon le niveau de température de la conversion de l’énergie, plusieurs technologies de pile existent, notamment pour les plus connues, les piles à membranes (en anglais polymer electrolyte membrane fuel cells, PEMFC), à des niveaux de température en deçà de 200 °C, et les piles à oxydes solides (en anglais solid oxide fuel cells, SOFC), généralement au-delà de 600 °C. En comparaison avec les piles à oxydes solides, les piles à membrane présentent certains avantages et notamment un temps de réponse plus court à une sollicitation, des émissions en gaz toxiques plus faibles, des contraintes thermomécaniques ou de corrosion nettement plus faibles. Le revers de la médaille est un rendement électrique inférieur à ceux offerts par les piles à haute température et une plus grande sensibilité à d’éventuels gaz polluants contenus dans le combustible ou le comburant.
Le combustible est oxydé à l’anode en différentes espèces selon sa nature, mais dans tous les cas l’oxydation produit des protons qui sont transférés à la cathode à travers la membrane insérée entre les deux électrodes : ici réside une propriété importante des membranes, c’est-à-dire permettre ce transfert avec une résistance (ionique) la plus faible possible pour limiter les pertes de tension de cellules de type ohmique. La membrane assurant le transport de protons est dite cationique. Certaines piles à membranes fonctionnent avec des membranes anioniques qui assurent le passage d’anions hydroxyde formés à la cathode vers l’anode : ces membranes sont appelées membranes anioniques. Dans cet article, seul le cas des membranes cationiques est traité, mais de nombreux points présentés ici sont applicables aux membranes anioniques.
Cet article présente les membranes de piles de type PEMFC selon leur nature ainsi que leur principe de fonctionnement : dans tous les cas, ce composant doit rendre le plus aisé possible le transfert des protons générés à l’anode par oxydation de l’hydrogène vers la cathode sous l’action du champ électrique créé par la polarisation des électrodes. Les membranes ne sont pas le siège de génération de charges électriques – comme le sont les électrodes – mais un milieu physiquement assimilable à un gel polyélectrolytique permettant le transfert de protons de l’anode vers la cathode, le courant généré par la pile étant directement proportionnel à ce flux de protons selon la loi de Faraday.
Après un court rappel sur les principaux constituants d’une pile à combustible puis de son principe de fonctionnement, nous présentons dans une deuxième partie les principaux types de membranes capables de transférer les protons, leurs propriétés et leurs points faibles selon qu’elles aient été conçues pour fonctionner en deçà ou au-delà de 100 °C environ. Les matériaux polymères, appelés ionomères en raison de leur aptitude à permettre la circulation des ions, sont comme d’autres composants de la pile à combustible relativement coûteux et sujets à des dégradations jugées encore trop rapides pour permettre une industrialisation en masse de la pile à combustible. Les mécanismes de dégradation et la recherche de solutions permettant de réduire leur importance est encore un important champ d’étude, ce qui nous a conduits à consacrer une part importante de l’article à l’examen de ces mécanismes et des solutions envisageables pour y remédier.