1/ Quel est le principal enjeu pour la filière des e-fuels ?
Les installations de production d’e-fuels sont conséquentes : elles sont conçues pour produire plusieurs milliers de tonnes par an. En amont, cela implique de produire massivement de l’hydrogène et de capter massivement du dioxyde de carbone. Ce dernier ne manque pas. En revanche, l’hydrogène doit être entièrement produit, par une filière encore en phase de lancement. La massification de la production d’hydrogène est donc un enjeu majeur. À l’horizon 2030, le volume dédié aux e-fuels atteindrait 20 à 40 % de la production d’hydrogène. Aujourd’hui, les tailles d’installation peuvent monter jusqu’à 200 MW, mais elles ne sont pas encore matures pour la production à l’échelle industrielle.
2/ Comment faire diminuer leur coût ? 1:21
Aujourd’hui, le prix d’une molécule de synthèse se situe entre deux et trois fois le prix de sa molécule fossile. Par exemple, le kérosène coûte 800 €/t, contre 2 000 à 2 500 €/t pour le e-kérosène. L’enjeu est de diminuer le prix en baissant les coûts de production. La réglementation, en mettant une pression croissante sur le prix des molécules fossiles (via le prix de la tonne de dioxyde de carbone), va aussi contribuer à diminuer l’écart entre les prix. Il faudrait atteindre 150 à 200 €/t de dioxyde de carbone (contre 100 € actuellement) pour que, combiné avec une baisse des coûts de production, les e-fuels deviennent compétitifs.
3/ Quels acteurs s’intéressent à ce marché ? 2:21
La carence en volume de la production d’hydrogène implique une réflexion à l’échelle mondiale. À l’échelle géopolitique, on retrouve des acteurs étatiques, comme le Chili, les États-Unis, l’Égypte ou la Mauritanie, qui vont produire massivement de l’hydrogène. Ce dernier est transformé sur place en e-fuel ou bien envoyé dans les pays consommateurs qui le transforment eux-mêmes. À l’échelle des projets, on retrouve trois types d’acteurs. Les émetteurs de dioxyde de carbone souhaitent valoriser les quantités importantes de dioxyde de carbone qu’ils possèdent (par exemple, Arcelor-Mittal pour la sidérurgie, Vicat ou Lafarge pour les cimentiers). Les fournisseurs d’énergie vont s’intéresser au développement de projets (par exemple, Engie, EDF, ou de nouveaux acteurs comme Elyse Energy). Ils achètent des équipements, du dioxyde de carbone, achètent ou produisent l’hydrogène et vendent ensuite les e-fuels aux troisièmes acteurs, les distributeurs de carburant. Il s’agit de producteurs historiques (comme Total Energie, Shell, BP) qui vont incorporer les e-fuels à leur production actuelle.
4/ Les objectifs d’incorporation peuvent-ils être atteints ? 4:22
La réglementation prévoit des taux d’incorporation élevés (20-25 % d’ici 2050). Malgré les acteurs importants impliqués et le développement prévu de projets, cela demande des volumes de production et de consommation encore inatteignables. La demande est aujourd’hui très supérieure à l’offre, et la technologie et les infrastructures de production ne pourront pas permettre à elles seules d’atteindre ces objectifs. Cela pose donc la question de la sobriété de consommation pour réduire les volumes, ce qui permettrait de satisfaire les objectifs.
Pour aller plus loin
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