Les systèmes réticulés spatiaux en état de tenségrité appartiennent à la classe des structures légères. Leur composition structurale est associée à un état d’autocontrainte qui nécessite une recherche de forme compatible avec sa réalisation. Elles représentent une généralisation de la « précontrainte » à des structures spatiales. Elles sont caractérisées par un couplage fort entre morphologie et mécanique.
Dans le domaine de la construction, en raison d’une apparente complexité, les applications de ce type de systèmes ne sont pas apparues naturellement aux concepteurs, mais quelques réalisations attestent de leur faisabilité. Elles trouvent leur pertinence dans des applications quelquefois inattendues, comme dans le domaine médical, mais aussi dans celui des systèmes contrôlables. Leur aptitude aux modifications géométriques sans retrait de composants, et à leur déploiement rigidifié sans ajout de composants, est un facteur décisif de progrès dans le domaine des structures pliables dépliables : elles représentent une solution innovante par rapport aux autres modes existants.
Pour répondre aux enjeux associés à leur spécificité, plusieurs développements ont été nécessaires. Ainsi, de nouvelles configurations morphologiques ont été proposées. Il s’agit en particulier de cellules aux géométries irrégulières comportant un nombre élevé de composants : elles se révèlent utiles pour la modélisation du cytosquelette de cellules endothéliales. La définition d’un anneau de tenségrité et l’étude de sa pliabilité sont à l’origine de propositions de passerelles piétonnes déployables ; le principe même de l’assemblage d’anneaux ne se réduit pas à des systèmes horizontaux, et des tours verticales, voire inclinées, peuvent être construites avec des anneaux de tenségrité. D’autres projets sont en cours d’étude pour des morphologies globales à deux et trois dimensions.
L’existence de l’autocontrainte, la possibilité de mise en place de capteurs et d’actuateurs autorisent le contrôle des systèmes de tenségrité, soit pour commander leur déploiement, soit pour modifier leurs caractéristiques mécaniques de façon à répondre à des impératifs fréquentiels. Ces progrès sont possibles en raison d’un développement simultané de logiciels de commande. Ces qualités sont désormais exploitées pleinement dans la conception de robots utilisés, tant pour la conquête spatiale, que pour des emplois terrestres. La conception des systèmes réticulés spatiaux est désormais facilitée par des modèles numériques intégrant le couplage entre morphologie et mécanique, modèles basés sur des procédures telles que la relaxation dynamique : le concepteur peut littéralement modeler en interaction son projet et, par exemple, modifier les courbures d’une arche tout en respectant la possibilité d’existence d’états d’autocontrainte.
En raison de leurs caractéristiques, les systèmes réticulés spatiaux en état de tenségrité ouvrent la voie de systèmes constructifs contrôlables à morphologie évolutive. Ils préfigurent peut-être le génie civil de l’Espace.
Le lecteur trouvera en fin d'article un glossaire de l'ensemble des termes techniques rencontrés ici.