La notion de filtrage électrique est apparue avec les premiers systèmes de communication utilisant des bandes spectrales très étroites. Dans les années 1910, les premiers ingénieurs radioélectriciens envisagent la possibilité de transmettre plusieurs communications téléphoniques sur une même ligne : ils utilisent pour ce faire une modulation du signal autour d'une fréquence porteuse, différente pour chaque canal de communication. C'est la même idée qui préside encore aujourd'hui dans pratiquement toutes les communications multiplexes (comme dans le cas du dégroupage où la téléphonie, la télévision et les transmissions numériques coexistent sur une même ligne de transmission). De cette manière, le spectre du signal est réparti dans une bande de fréquence centrée autour de la fréquence porteuse. À la réception, la sélection d'un canal spécifique nécessite un filtrage du signal pour ne sélectionner que la bande utile. On en arrive donc à la notion de filtre sélectif, capable d'éliminer efficacement tout signal hors bande utile sans pour autant altérer de façon trop importante l'information transmise. Au départ, des filtres linéaires à éléments discrets de type résistance, inductance et capacité (R, L, C ) sont utilisés pour assurer des opérations de filtrage à des fréquences allant de 10 à 40 kHz. L'utilisation de méthodes de communication exploitant les ondes hertziennes et le besoin d'élargir les bandes utiles pour augmenter la quantité d'information véhiculée imposent rapidement la mise au point d'autres principes de filtrage, mieux adaptés à de tels besoins. La réalisation d'éléments passifs stables et compacts pour le filtrage a également poussé à rechercher des solutions alternatives aux guides d'ondes et cavités résonantes électromagnétiques généralement efficaces mais chères et encombrantes.
Les techniques de filtrage ont été rapidement étendues par l'introduction d'éléments actifs permettant de résoudre entre autre le problème des pertes dans la bande utile, généralement importantes, associées à l'utilisation d'éléments passifs (RLC ). Néanmoins, et malgré les progrès incessants de la microélectronique, les bandes passantes des circuits actifs d'amplification restent souvent peu compatibles avec les applications « télécoms » pour lesquelles les fréquences de travail ne cessent d'augmenter. De nombreuses tentatives ont été engagées pour remplacer le filtrage linéaire analogique par des techniques numériques. Celles-ci supposent l'existence de composants électroniques capables d'échantillonner et de traiter le signal à des fréquences également très élevées, et s'avèrent moins immunes aux parasites et aux effets de recouvrement spectral que les composants passifs.
On s'intéresse ici aux filtres « électriques », fondés sur l'utilisation de composants acoustoélectriques, dont la destination est d'être insérés dans un circuit électronique afin de réaliser une fonction de filtrage en fréquence. L'objet de cet article est de décrire et de comparer entre elles des technologies de filtres passifs appartenant à une catégorie particulière que sont les filtres « acoustiques » basés sur une conversion d'énergie électrique en énergie acoustique et vice versa. Un second article [E 2 001] sera consacré à la modélisation de ces filtres.
On limitera l'analyse aux filtres de bande, non dispersifs, parce que c'est le seul terrain commun à l'ensemble des filtres électroacoustiques. La technologie des ondes de surface permet par ailleurs d'adresser le domaine des filtres analogiques dispersifs, mais il s'agit là d'un sujet très spécifique.