Logo ETI Quitter la lecture facile

Décryptage

Le café, c’est bien plus que de la caféine

Posté le par La rédaction dans Chimie et Biotech

[Tribune] Ariel Fenster, professeur de chimie à l’Université McGill (Canada)

Ne vous affolez pas, mais je veux vous confier un secret : le café, c’est plein de produits chimiques !

Beaucoup boivent du café pour son effet stimulant, mais la caféine qui en est responsable n’est qu’une des quelque 800 molécules que l’on retrouve dans ce breuvage. Et, outre la caféine, ce sont ces composés chimiques qui sont responsables du goût et de l’arôme du café, mais aussi de ses effets sur la santé.

Une grande partie de ces composés sont naturellement présents dans le grain, notamment, ceux de la famille des acides chlorogéniques, auxquels on associe des propriétés antioxydantes bénéfiques. D’ailleurs, du fait que nous en consommons beaucoup (90 pour cent de la population boit du café quotidiennement), le café est notre première source d’antioxydants, bien avant les fruits et les légumes.

L’autre apport de molécules bénéfiques vient du processus de torréfaction. Les réactions de Maillard, les mêmes qui donnent leur goût au scotch, au roast-beef et au pain grillé – en fait, à tout ce qui est rôti –, produisent des centaines de nouvelles molécules, certaines amères, d’autres veloutées. Le talent du torréfacteur est de bien doser la température et le temps de torréfaction pour obtenir le meilleur équilibre entre les différents composés. Nombre de ces composés sont très volatils et s’expriment dans l’odeur du café. Il y a en particulier le 2-furfurylthiol, qui est associé à l’arôme du café fraîchement préparé. C’est grâce à lui que je fais sortir ma femme du lit le matin ! Oui, comme je suis matinal, c’est moi qui suis en charge.

Le secret d’un bon café est d’extraire le maximum de composés agréables et de ne pas laisser passer ceux qui ne le sont pas. C’est là que je trouve que la méthode espresso offre, à mon goût, un réel avantage. Le vrai « barista » peut jouer avec la température, la pression et la vitesse d’effusion pour préparer son nectar. Il peut ainsi obtenir le maximum de 2-éthyl-3,5-diméthylpyrazine, à la saveur de chocolat, et laisser derrière le 2,4 décadienal au goût d’amertume. Quoi qu’il en soit, il ne faut jamais dépasser 30 secondes d’infusion, car, après ce délai, les molécules au goût de ranci deviennent prédominantes. Contrairement à ce que l’on pourrait penser, une tasse d’espresso a plus de goût, mais contient moins de caféine qu’une tasse de café filtre. Cela vient du fait qu’au départ, les volumes sont moindres, mais aussi que, dans le cas de l’espresso, le liquide d’extraction, l’eau, reste bien moins longtemps en contact avec le café.

Dans le cas du café filtre, qui reste sur la plaque chauffante trop longtemps, les composés volatils plaisants s’échappent, ce qui augmente la concentration en acides chlorogéniques amers et désagréables. L’attention que porte Tim Horton à cet effet a fait le succès de la compagnie. Comme le dit sa publicité – si le café n’est pas servi dans les 20 minutes, il n’est pas servi du tout.

Je me souviens que, lorsque j’habitais en France, il m’arrivait, le matin, par économie et par paresse, de réchauffer dans une casserole du café restant de la veille. Malheureusement, il m’arrivait quelquefois de le laisser trop longtemps sur le gaz, avec des résultats désastreux. Je ne sais pas combien d’entre vous se rappellent du film « Le vieil homme et l’enfant », mais pour ma part, je me souviens de Michel Simon qui disait : « café bouillu, café foutu ».

Par Ariel Fenster, professeur à l’Université McGill (Canada), et membre fondateur de l’Organisation pour la Science et la Société

Posté le par La rédaction


Réagissez à cet article

Commentaire sans connexion

Pour déposer un commentaire en mode invité (sans créer de compte ou sans vous connecter), c’est ici.

Captcha

Connectez-vous

Vous avez déjà un compte ? Connectez-vous et retrouvez plus tard tous vos commentaires dans votre espace personnel.

INSCRIVEZ-VOUS
AUX NEWSLETTERS GRATUITES !